Rap US, acid-jazz et grosses pointures au TLV
Une première partie placée sous le signe de l’éclectisme, où les artistes avaient emmenés dans leur bagages, des amis d’amis, eux-mêmes rappeurs/chanteurs. Entre deux tours de platine de DJ OBD, le niçois Ebola entouré de quelques comparses, et le collectif Atletico auront su tenir en haleine un public impatient. Une flopée d’artistes inventifs, qui iront jusqu’à mêler des rifs de guitare et de basse, à des textes issus du slam et du rap. Entre acid jazz, soul et hip-hop old school, la soirée était prometteuse pour les connaisseurs. Pari gagné pour les organisateurs du concert. Rencontre avec les stars de la soirée : Slum Village.
Slum Village, son DJ et ses deux rappeurs, avaient fait une halte dans leur périple autour du monde. Quatre dates en France, autant dire qu’il ne fallait pas rater la soirée du Lino Ventura. Fans et mordus de vieux son hip-hop s’étaient donc donnés rendez-vous pour quatre heures de musique urbaine comme on l’aime. Une ambiance « made in US » où la casquette vissée était de rigueur.
En quelques mots, Slum Village c’est du talent à l’état pur, un incontournable du rap américain. Issu de Détroit , le groupe doit ses débuts inspirés à Baatin et Jay Dee, plus connu sous le nom de J-Dilla. Le premier disparait cet été, le second quitte le groupe en 2002 et meurt quatre ans plus tard. Mais l’aventure « Slum » continue, T3, présent depuis les premiers textes, est rejoint par Elzhi (alias Jason Powers). Le nouvel et sixième album du groupe est déjà dans les bacs, l’occasion d’évoquer avec eux leurs projets.
Rencontre
Vous êtes ce soir à Nice pour la première fois, avant de vous envoler vers Bruxelles et Londres, une vraie tournée internationale…
T3 : C’est vrai qu’on n’est pas venus souvent en France, mais on se rattrape ! C’est vraiment important pour nous de voyager… Très stimulant, très motivant. A Paris les gens étaient déchaînés, certains sont même venus sur la scène pour danser. Parfois le public est plus excité que nous, ce qui est déjà difficile ! Ce soir aussi il y avait de l’ambiance. Je ne voyais qu’un mur de mains levées pendant le concert.
Elzhi : C’était un super moment ! On a le sentiment d’avoir partagé avec le public. Les gens étaient vraiment avec nous...
Un reproche tout de même… On aurait aimé que vous restiez encore un peu plus sur scène…
T3 : Mais les gens veulent toujours plus ! On a joué quatre titres supplémentaires, le DJ est resté mixer pendant quelques minutes après notre sortie de scène… On ne vient pas ici souvent, c’est pour ça que vous attendez plus de notre part !
Elzhi : Mettons tout le monde d’accord : on reviendra !
Votre rencontre, c’était où, c’était quand ?
T3 : J’ai croisé Elzhi en 2000 je crois bien. Slum Village était déjà établi, Dila était encore manager, j’ai choisi Elzhi parce que j’aimais son potentiel, mais on ne jouait pas vraiment ensemble. Il fait officiellement partie de Slum depuis 2002.
Un cocktail qui marche plutôt bien : vous avez déjà sorti plusieurs EP, quelques maxis, et maintenant un nouvel opus. 13 titres qui peuvent être perçus comme un retour aux sources, aux vraies valeurs du hip-hop en quelques sortes…
T3 : Tout à fait... Teinté de soul, de funk, du bon vieux Slum ! (rires) On a essayé de faire quelque chose qui plaise à ceux qui nous suivent, on espère leur faire plaisir avec ce nouvel album. On en sortira encore un en mars prochain.
L’occasion de refaire une tournée ?
T3 : Bien sûr. De toutes façons on ne quitte jamais la scène. On est toujours en tournée. On vit pour ça !
Y-a-t’il des artistes avec qui vous aimeriez travailler ?
T3 : Je ne sais pas trop. Peut-être une collaboration avec l’artiste le plus ridicule, le plus déjanté, le plus fou… Un artiste comme Prince par exemple. Le hip-hop évolue, on se doit de le faire évoluer, alors pourquoi ne pas tenter ce genre de collaboration ?
C’était une évidence pour vous de faire de la musique ?
T3 : Complètement ! J’ai commencé à l’école, tout petit déjà. C’est important de pouvoir dire ce que l’on a à dire. C’est une bonne thérapie qui a fait ses preuves avec moi !
Où puisez-vous votre inspiration ? Chacun ramène un petit peu de son vécu ? Comment vous travaillez ?
T3 : On puise un maximum d’énergie et d’inspiration dans de vieux disques de soul, de rock, de jazz. On écoute vraiment beaucoup de musique, en permanence. Et bien sûr on puise dans notre quotidien. La plupart du temps, nos paroles évoquent ce que l’on vit, ce que l’on connait de près ou de loin. On essaye aussi beaucoup de choses lors des concerts. Ca aussi c’est une bonne source d’inspiration : le public.
Elzhi : On essaie de travailler ensemble. On pose tout sur la table, on écoute ce que l’autre a apporté et ensuite, petit à petit, chacun y ajoute son grain de sel, on construit un son après l’autre. Parfois on s’assoit des heures en studio, on passe de la musique en continu pour trouver LE bon morceau, LE bon rythme. On travaille de plusieurs façons. Comme on le disait, il nous arrive aussi de tester des choses sur scène. On a justement un morceau, sur lequel on entend Baatin, on ne l’a pas encore mis sur un CD officiellement, mais il nous accompagne pendant les tournées. On est contents de voir quand ça plait !
Ce n’est pas difficile de continuer à créer, à jouer sans vos amis (Baatin et Jay Dee), deux artistes qui ont beaucoup apporté à ce groupe…
T3 : C’est toujours difficile mais on continue pour eux ! On essaye même toujours de se dépasser. Sans eux et sans la musique, je ne sais pas ce que je ferai… Je retournerai peut-être à l’école…
Elzhi : Nous sommes là pour perpétuer ce qu’ils ont commencé. Garder la « tradition Slum ». Je ne connais pas d’artiste aussi grand que Baatin, c’est aussi pour ça que je veux continuer ce qu’il faisait. C’est un moyen de les garder avec nous même s’ils ne sont plus là.
Pour conclure, que diriez-vous aux gens qui ne connaissent pas encore Slum Village ?
Elzhi : Je leur dirai que c’est une grave erreur ! Slum Village c’est une histoire de musiques, de bonne musique, on essaye toujours de s’évader dans ce qu’on fait, d’offrir un peu d’évasion aux gens par la même occasion… On tente d’être créatifs…
T3 : On n’arrive pas vraiment à se définir ; c’est de la musique à écouter entre copains, de la musique faite pour les filles, de la chanson, du hip-hop… Disons juste que nous sommes bons ! (rires)