Cette adaptation par Valérie Lesort du célèbre « Premier voyage de Gulliver », de l’Irlandais Jonathan Swift (1667-1745), présente un Gulliver interprété par Renan Carteaux qui garde un air ahuri et gentiment amusé durant toutes ses aventures. De toute façon, il se sait en position de force vu son gabarit par rapport aux nains qui l’entourent.
Au début, Gulliver raconte le naufrage de son bateau, alors que, seul rescapé, il s’écroule sur une île, tandis que des oiseaux (mécaniques) volètent autour de lui. Il est vu comme un monstre - un géant – par les minuscules habitants de cette île, mi-marionnettes, mi-comédiens qui ne conservent que leur tête et leurs mains. Tout petits, ils sont donc méfiants face à cet être qui leur semble monstrueux. « C’est un espion, j’en ai la preuve scientifique ! » dit l’un d’eux. Aussi, est-il attaché « comme une bête » constate une belle !
C’est donc en ennemi que Gulliver commence son séjour chez les Lilliputiens. Et il faudra quelques complices pour qu’il puisse s’en sortir. Personnages de contes pour enfants, ces nains bizarres vont montrer toutes les abjections dont est capable l’humain, et, en utilisant sa force, ils vont faire de Gulliver leur esclave.
Sous des allures d’une histoire pour enfants, c’est plutôt d’un conte philosophique dont il s’agit.
Et, s’ils aiment le merveilleux, les adultes en feront leur miel ! Ils seront comblés autant par l’aventure de Gulliver que leur regard peut l’être par les petits personnages aux vêtements couleurs pop qui dansent et qui chantent allègrement.
Transposé par le théâtre, le livre sert de trame, et le lecteur retrouve les oeufs au plat pour remplacer les oeufs à la coque, la sortie de l’eau de cinquante vaisseaux ennemis, l’incendie de l’appartement de l’Impératrice que Gulliver éteint rapidement en urinant ce qui provoque un scandale qui le conduira à « la peine de mort pour avoir fait son pipi sur le Palais de Sa Majesté l’Impératrice »....
Ce spectacle offre une vision modernisée de l’univers de Swift.
Une palette de personnages époustouflants s’aventure dans des zones inconnues de scènes étranges et cocasses. Avec des gestes parfois codés, toutes les situations se jouent et deviennent possibles, en chantant, en dansant... C’est très joyeux !
De minuscules décors sont installés à vue, alors que la scène reste bien souvent dans un noir qui permet de dissimuler la manipulation des marionnettes arpentant la scène au gré de miraculeuses surprises du côté d’une audacieuse fantaisie.
Avec des gestes parfois codés, toutes les situations du livre se jouent et deviennent possibles, en chantant, en dansant, et le spectacle ravit tous les spectateurs, petits ou grands.
« Le voyage de Gulliver » est vraiment un spectacle enthousiasmant. Totalement génial !
Caroline Boudet-Lefort