Si on n’est pas au parfum, pas sûr de bien comprendre ce qui s’est passé entre eux et le Théâtre de Nice où ils travaillaient comme comédiens fort appréciés, et qu’ils ont dû quitter par la force des choses. Mais ce que l’on ressent c’est leur amertume, leur rancune ressassée qui devient emportement...
Dès que le bouchon du champagne saute, ils s’assoient autour de ce Monopoly niçois (!!) que Estrosi aurait distribué aux écoliers de la ville de Nice. Ainsi défilent les noms bien connus de rues à acheter ou pas. Ce n’est plus la rue de la Paix, l’avenue Foch, ou les Champs Elysées, mais l’avenue Jean Médecin ou le Boulevard de Carabacel et autres....
Mais, lorsque Sophie veut s’attribuer le Théâtre de Nice, Jonathan s’énerve « Non, tu n’achèteras pas le TNN ! Il n’y a plus de théâtre ! Au secours Jean Vilar ! Au secours André Malraux ! Il n’y a plus rien ! Ni Gauche, ni Droite... »
L’affaire est devenue politique. Ils se posent en victimes de l’époque !
Ils sont donc quatre comédiens : trois sont bien connus des amateurs de théâtre de la région : Jonathan Gensburger (inoubliable Scapin dans « Les Fourberies » mis en scène au début de cette année par Muriel Mayette-Holtz !), avec sa femme Sophie de Montgolfier, comédienne elle aussi.
Ils ont invité leur grand ami, Frédéric de Goldfiem, qui part bientôt en tournée du TNN avec « Bérénice » de Racine où il interprète un magnifique Titus. Il arrive à cette soirée « champagne et monopoly » avec Flor Lurienne, une étoile montante de la scène parisienne !
Ecrite par tous les quatre, cette pièce serait-elle un pied de nez potache divulgué par des déçus qui se sentent victimes d’un malentendu invraisemblable ? Ils incarnent superbement les exaspérations, dégoûts et compromissions, en démantelant leur situation nettement tragique et, dans un tour de passe-passe, la ridiculisent en pitreries de clowns tragiques. Ils ont l’audace de rire de tout malgré tout et manie l’humour comme une arme de combat.
Avec cet humour confinant à l’absurde, ce quatuor insolent n’a pas peur de dire tout haut ce qu’il pense tout bas
Non seulement, le public a la sensation d’assister en direct à la confection d’une écriture scénique, mais il éprouve un stimulant sentiment de partage immédiat. L’angoisse face à l’avenir perce ici et là dans cette oeuvre un peu bancale, mais avec une joyeuse mise à distance et un humour constant, elle offre au public une satisfaction évidente.
À la fin, Frédéric de Goldfiem clame, à l’instar de Belmondo dans « A bout de souffle » : « Si vous n’aimez pas la mer, si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas le théâtre, allez vous faire foutre ! »
Caroline Boudet-Lefort
Jusqu’au 29 Octobre 2023 - Jeudi 20H Vendredi 21H Samedi 21H Dimanche 17H
« Mon cul s’en accommode » nous a permis de découvrir à Nice le petit « Théâtre de l’eau vive » qui nous était inconnu : il évoque les multiples petites salles d’Avignon et c’est un plaisir ! Le programme à venir est fort alléchant et diversifié avec par exemple : « Le Don d’Adèle » de Barillet et Grédy mi-novembre, « Le médecin malgré lui » de Molière début décembre, suivi de « Le Père Noël est une ordure » ...