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QUATORZE, comédie documentée relatant les 38 jours qui précédèrent la Première Guerre Mondiale

Très documentée, la pièce raconte sur le mode comique les événements qui entraînèrent la guerre de 14-18, la Grande Guerre qui fit 30 millions de morts. Elle montre, de rencontre en rencontre, ces hommes haut placés qui sont en fait des pantins ignares prenant des décisions lourdement conséquentes. Une seule représentation a été donnée à ANTHEA le 5 décembre, alors pour ceux qui n’ont pu y assister compte-rendu !

Pour marquer le centenaire de la fin de la Première Guerre Mondiale, Sébastien Valignat a mis en scène, pour la Compagnie Cassandre, les 38 jours avant le début du carnage.

Il a fait appel à Vincent Fouquet pour écrire les transactions souvent insensées entre les représentants des divers pays concernés. L’auteur a trouvé une écriture inventive et drôle afin de motiver l’intérêt de chaque spectateur sur ces 38 jours qui se déroulent sous ses yeux.
Pour que ne recommence pas un inutile carnage humain, il faut d’abord s’interroger sur ce qui a causé le déclenchement de cette abominable guerre que pourtant personne ne voulait. De quel engrenage, certains hommes au pouvoir décisionnaire sont-ils responsables ?

Tout commence le « 28 juin 1914 de notre ère », c’est précisé sur un écran où défilent les dates.

Ce jour-là, l’archiduc François-Ferdinand, héritier du trône d’Autriche, est assassiné à Sarajevo par un étudiant serbe.

En présentant ces événements sous forme de comédie, l’auteur prenait un risque audacieux, c’est pourtant réussi !

Il fait rire, tout en donnant une multitude d’informations instructives et en présentant les personnages dans leurs dérisoires rivalités, mensonges et vantardises. Outre s’amuser, le spectateur révise ses notions d’Histoire et découvre toutes sortes de révélations sur l’insouciance des dirigeants qui ne mesurent pas les conséquences de leurs folles décisions. Le spectacle permet de comprendre les enjeux et autorise à rire des bafouillages des responsables de la situation – pas du tout responsable de leurs agissements !
Sous couvert de farce, le tableau est impitoyable. Auteur et metteur en scène ont imaginé une satire virulente des hypocrisies des puissants. C’est comique alors que la situation n’est vraiment pas drôle.
Quoique caricaturaux - pour en montrer l’aspect ridicule et dérisoire – ceux qui tirent les ficelles de cette partie du globe lui préparent, en toute inconscience, un avenir tragique. Ils avaient de faibles connaissances de la géopolitique : une scène très amusante les montre devant une carte du monde en train de bafouiller et se s’emmêler sur l’espace de chaque pays. Ils voient la situation comme une simple querelle de voisinage. « Traversons le Danube et fouettons les Russes ! », ils confondent Bucarest et Budapest, se méfient les uns des autres, signent des décrets, n’importe quoi !

Cette comédie, admirablement tissée, est interprétée avec fougue par six jeunes comédiens, trois garçons et trois filles, qui prennent plaisir à occuper chacun plusieurs rôles. Evitant de tomber dans la monotonie, leur jeu d’acteur est stimulé par des changements de ton ou de débit de paroles, tout en laissant paraître les failles de leurs odieux personnages - mais pas question de les rendre sympathiques -. Ils sont eux-mêmes comme des marionnettes manipulées, alors que ce sont leurs décisions qui manipulent toute une partie du globe, puisque chacun personnifie un pays : l’un incarne la France, l’autre la Serbie, un troisième l’Allemagne.... C’est drôle, méchant et tragique ! Pourrait-on craindre que cela puisse ressembler à notre temps ?

La scénographie est contemporaine avec un décor peu chargé compensé par des images vidéo.

Les mails ou textos que s’expédient les dirigeants donnent une allure potache revendiquée et la télévision, pas encore inventée alors, les informe. Loin de tout effet, le metteur en scène a visiblement choisi de ne pas chercher à provoquer quelque émotion, mais la pièce donne à réfléchir sur les causes de cette guerre et les dialogues offrent quelques piques bien senties. Certaines répliques sont si décapantes qu’elles électrisent la scène.
Aucun pays européen n’a vraiment gagné cette guerre. « Les Russes d’un côté, l’Allemagne et l’Autriche de l’autre pour un match nul, comme au football ! » C’est alors que s’inscrit sur l’écran « 30 millions de morts ». Rideau !
Caroline Boudet-Lefort

Photo de Une : Comment est née la Grande Guerre ? Quatorze se charge de nous l’apprendre et sa leçon, libérée de toute la pesanteur de l’histoire officielle, vaut pour tous les conflits. DR Anthéa

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