Certes, la pièce, fort bien écrite de Yasmina Reza, est très astucieuse ! Elle est devenue un chef d’œuvre de la scène théâtrale – la pièce française contemporaine la plus jouée dans le monde entier -, cependant l’interprétation y tient un rôle primordial.
François Morel, Olivier Broche et Olivier Saladin forment un trio formidable jouant magnifiquement avec les répliques qui fusent en s’enchaînant à toute allure comme des balles de ping pong. Il y a eut le trio Vaneck, Luchini et Arditi et plus récemment la pièce a été interprétée – toujours fort bien - par Darroussin, Fromager et Berling.
Ce sont trois amis de longue date qui se voient souvent depuis une quinzaine d’années. Et voilà que leur amitié se trouve ébréchée – cassée même - par l’achat d’un tableau qu’a fait l’un d’eux, Serge.
C’est un tableau uniformément blanc, acheté très cher parce que c’est l’oeuvre d’un artiste qui a la cote. Mais lorsque Serge montre son acquisition à Marc, celui-ci reste atterré par la fortune qu’a couté à son ami cette œuvre sans forme et sans couleur. C’est « une merde ! » décrète-t-il …
À quoi tient l’amitié ?
Parfois un « rien » peut la défaire, la remettre en question, donner lieu à toutes sortes d’interrogations, de rancunes réchauffées, de vieux règlements de comptes tapis dans les séquelles de l’oubli. Et fragiliser à jamais le lien qui la nouait.
Au bout de cette longue amitié, des non-dits surgissent qui les amènent à se questionner sur le fondement de leur amitié.
Certes, la pièce de Yasmina Reza est très habile, mais cette habilité tient beaucoup grâce à l’interprétation qui en est faite, comment les trois acteurs placent leurs répliques. Le rythme est important. La cadence même, comme dans une danse. Les répliques vont à toute allure, s’entrechoquent, presque se superposent …
A Anthéa, la pièce a été ovationnée et très longuement applaudie !
Caroline Boudet-Lefort