L’énorme pavé (660 pages !) est devenu une pièce de théâtre de moins de 2 heures
Elle est fort bien interprétée par Thibault de Montalembert et Mathilde Roehrich - débutante aux dents longues - pour les journalistes. Quant à Scali Delpeyrat, il campe majestueusement un étonnant François Hollande. Il y avait matière à rendre perceptible les coulisses du pouvoir, car jamais un Président de la République ne s’était livré aussi librement.
Dans cette pièce, soi-disant intemporelle, chaque spectateur a pourtant aussitôt reconnu Hollande qui avait accepté d’être interviewé chaque mois par deux journalistes du « Monde » durant la durée de son quinquennat à la Présidence de la République, afin qu’un livre soit publié.
D’abord, il faut découvrir le « mystère Hollande », en supposant qu’il existe : le « Président normal » a effectué une présidence anormale. « Gouverner, c’est une expérience » dit-il pour un de ses ministres, cela pourrait bien le concerner lui-même. Il vient de nulle part, mais se sent à l’aise partout... Quoique la lune de miel fut brève entre la France et son nouveau chef : très vite « place aux conflits, à la litanie des plans sociaux, ... ». Il découvre que « gouverner c’est subir ».
Mais, au théâtre, « Tout, ce soir, sera donc fiction ! » prévient le journaliste campé par Thibault de Montalembert. « Ce sera le livre de référence du quinquennat » annonce-t-il par ailleurs au Président qu’il juge « grand manipulateur, d’autant plus redoutable parce qu’en plus il est sympa ! ».
La scène est divisée en deux parties : l’une côté bureau des journalistes où, un instant, il y a une affiche de « Blow up », film d’Antonioni sur l’illusion de la réalité. L’autre partie de la scène est réservée aux rencontres avec Hollande qui va répéter plusieurs fois « C’est moi le Président ! », comme pour s’en persuader lui-même. Il déclare en expliquant sa fonction et surtout ses rapports avec ses ministres : « Si on est Président, il faut être amnésique et ne rien oublier ».
Si la pièce est voulue comme un hommage au métier de journaliste : « Le journalisme, c’est la proximité et la distance », elle montre aussi les contraintes imposées par la direction qui conteste la démarche de ses entretiens mensuels, ainsi que par le service politique (fort bien représenté par Hélène Babu) voyant un empiétement sur son territoire.
Mais aussi « la Presse se repaît de « couacs », ces sons discordants proférés de manière accidentelle », si on en croit le Larousse ! »
Tout y passe, même les match de foot « C’est le sujet le plus important pour un Président, après le Salon de l’Agriculture » dit Hollande !
Tant de phrases font rire le public qu’on voudrait toutes les citer !
Sous ses aspects sérieux, c’est vraiment une pièce amusante et très astucieusement mise en scène par Charles Templon. C’est un plaisir de la voir et de la recommander !
Caroline Boudet-Lefort