Compagnie FAYR Play : Yvan Richard et Alexia Falavel
Yvan Richard et Alexia Falavel se sont penchés sur « la démocratie » et ils en ont fait un spectacle : « Démokratie ou le Triomphe de l’Amour ». Seul, Yvan est sur scène pour partager tout ce que ce mot lui a suggéré. En tant que maïeuticienne, Alexia est l’accoucheuse du spectacle. Aussitôt, les idées ont commencé à fourmiller dans leurs têtes, l’une en entraînant une autre.
Alors qu’il traçait sa route pour devenir ingénieur, Yvan abandonne ses études pour s’initier au théâtre qu’il n’a plus lâché, aimant tous ses domaines, de l’acteur à la régie. De plus – et surtout - il se soucie de son évolution personnelle, avant de se passionner pour la démocratie athénienne, début d’une belle aventure. Il a lu des bouquins, tout ce qu’il a trouvé sur ce sujet en remontant jusqu’à Démosthène.
D’abord, il interroge le public afin de le faire participer : « Qu’est-ce que la démocratie vous évoque ? » Et les mots fusent : Cicéron ! Politique ! Illusion ! Rêve ! Populaire ! Mensonge ! Communication ! Pouvoir ! Partage ! Système ! Consensus !...
Avec Yvan, on passe par une partie de Monopoly (guère démocratique !) et on enchaîne sur les élections présidentielles de 2017, où la moitié des électeurs ne sont pas allés voter, laissant alors un seul décider de tout pour eux quel que soit leur désir. Après, ils pourront toujours râler... Chacun chemine dans ses contradictions et ses avis sur tout. La terre est-elle ronde ou pas ? Un sérieux pourcentage reste persuadé qu’elle est plate... Et pour tout, c’est pareil ! Alors la démocratie....
Yvan poursuit. Il ne lâche pas les spectateurs qui ne sont jamais aussi proches. Il a joué ce même spectacle sur de vraies scènes, dans de vrais théâtres. Parfois il semble improviser. Son jeu est persuasif, sa diction impeccable, ses mimiques multiples ! Il gambade sur scène, s’agite, n’hésite pas à interpeller le public, à l’interroger à nouveau, à jouer à une forme d’élections. Que faut-il pour gagner ?
De nouveau le public participe : pour gagner, il faut de l’argent ! Des médias ! De l’ambition ! Des amis ! Des idées ... Et que font de la démocratie les hommes politiques ?
On nous ment, on n’est pas en démocratie !
Arguments et contre arguments s’affrontent. Le débat est stérile ! Le pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple, il le fait lui-même dans son propre intérêt. On est en démocratie... Mais la souveraineté appartient-elle à un ensemble de citoyens égalitaires ?
Que faudrait-il donc pour vivre réellement en démocratie ?
Il faudrait que chacun creuse en lui-même, qu’il creuse dans son inconscient pour en extraire du sens. Que, débarrassé d’une archaïque pollution intérieure, il s’intéresse réellement à l’autre, au groupe, à la société, en étant totalement disponible au bien commun et au « vivre en société ». Chacun fait-il ce travail intérieur nécessaire pour que la démocratie évolue sans pollution personnelle qui rejaillit à l’extérieur ? Dans tout groupe – associatif, alternatif, ou autre – des problèmes de domination apparaissent vite. Yvan Richard rappelle que, pour chaque être humain, tout se joue avant 6 ans et que ce serait dans l’enfant qu’il faudrait mettre les graines de la démocratie, dès la maternelle.
Même si la démocratie est le projet de la société actuelle, nous sommes loin de l’idéal des Grecs. Il y a toujours des « esclaves » et toujours la domination de l’homme par l’homme. Chacun de nous y a sa responsabilité. C’est ce que démontre Yvan en multipliant les expressions dans son visage de plus en plus mobile, en gesticulant de gauche à droite sur l’espace scénique, en sautillant s’il le faut pour sembler être plus persuasif.
Tout y passe : les élus, Gandhi, le climat, l’argent, les vieux mâles blancs dominants, la liberté de l’acteur... Jouant de toutes les intonations possibles, il passe sans hésiter d’un interlocuteur à un autre. Avec beaucoup d’humour, le comédien met le public dans sa poche, en créant une multiplication de points de vue, un chaos de pensées et de mots. Il rend proche cette société sans idéal où chacun est dépassé par l’aujourd’hui. Et Yvan Richard permet un véritable moment de partage.
Chaque spectateur quitte ce petit théâtre de poche complètement conquis, enrichi de multiples idées qu’il a envie d’approfondir, d’échanger...
Pendant plus de 2 heures, de façon ludique, l’acteur a conduit le public aux limites des questions sans fin ni réponse. Et il a incité chacun à faire son propre chemin pour améliorer alentour.
Merci de nous avoir guidés dans cet humoristique voyage - initiatique et interactif - sur un sujet profond, analysé et transmis de manière légère : chacun peut rire de sa propre démocratie !
Caroline Boudet-Lefort