"La photo est un sport de combat"
Ces mots de Patrick Swirc définissent parfaitement son art. Photographe qui tire plus vite que son ombre, il promène dans le monde les focales de ses appareils pour immortaliser ce qui attire son œil.
La photographie ayant le don d’octroyer l’éternité, il en profite pour remplir son monde d’un nombre infini d’images. Rien ne lui est étranger : mode, reportage, studio, voyages..., il prend tout, se délecte de chaque univers.
Après une courte formation à Vevey, il arrive à Paris, se spécialise dans le portrait sans l’avoir décidé. Ou peut-être est-ce Deneuve, son icône, qui le met sur cette voie : "J’ai toujours voulu la photographier, je devais la photographier. Alors un jour, j’ai décidé de lui écrire, de lui adresser une véritable déclaration. Et un matin, le téléphone a sonné..."
De nombreuses célébrités vont défiler devant son objectif, d’autres, il a dû leur courir après.
Dalida, la première, puis Clint Eastwood (un portrait en profondeur), David Lynch, Gérard Depardieu, Jane Fonda, Laetitia Casta, Juliette Binoche (en sainte de la Renaissance italienne), Cantona (en Bacchus), Adjani en... Adjani ("Photographier Adjani, c’est marcher sur un fil, ça peut casser à tout moment") et des dizaines d’autres.
Quand ces stars viennent dans son studio, il met de la musique à fond, déclenche des ventilateurs, dit tout ce qui lui passe par la tête pour faire "tomber les défenses", dit-il, qu’ils se découvrent, enlèvent le masque de ceux qui ont l’habitude qu’on les regarde, qui sont beaucoup trop photographiés (pour les anciens, chaque photo enlève un peu de l’âme de la personne)...
Swirc cherche dans tous ces visages l’émotion qui va déclencher son doigt.
Être ailleurs aussi l’intéresse : Vietnam. Iran, Brésil, Turquie où il se promène parfois avec des mannequins.
Des commandes pour la publicité un peu spéciales, des photos "de mode" étonnantes comme cette collection des sacs à main à Istanbul et en Grèce avec des éléphants, des cormorans, etc., pour le moins inhabituelle.
D’autres séries sont plus discrètes, plus intérieures, quasi ésotériques, mises en scène à l’aide d’éclairages raffinés : femmes charnues et nues aux ombres épaisses ("Portraits posthumes"), masques, linceuls, dents de requins sur sein de jeune fille, scénarios macabres, comme pour exorciser ce qui l’inquiète ("La mère des morts").
Ses photos de Chine ou du Japon en noir et blanc sont aussi très mystérieuses, embrumées, brouillardeuses, comme issues de vieux films super 8, celles de Russie sont colorées de teintes douces, de bronze, d’or éteint.
Avec cette exposition, le TPI offre, plus qu’une rétrospective, une descente dans les profondeurs des différents styles de l’artiste, "un artiste très attachant", nous dit Marie-France Bouhours.
Le dénominateur commun, l’origine de ce travail aux multiples facettes est peut-être caché dans ses carnets de voyage remplis de bouts d’images, d’écritures, de billets de trains collés, de cartes postales, de photos déchirées, de petits dessins, etc., qui matérialisent ses visions et ses percepts, mais aussi se fixent dans une mémoire où il pourra puiser ses futures images.