Dès le berceau, Gabriel Bianco, jeune virtuose de 28 ans, a été biberonné de musique, sa mère étant violoniste et son père guitariste. Très vite le talent de Gabriel a dépassé ceux de ses parents et il n’avait que 14 ans quand il a commencé à donner ses premiers concerts publics, avant d’être sollicité pour jouer dans le monde entier. Il a remporté très tôt des premiers prix de multiples concours internationaux, dont, en 2008, le prestigieux « Guitar Foundation of America » à San Francisco. En 2011, ADAMI le consacre « Révélation classique de l’année ». Il a enregistré deux CD où l’on peut découvrir toute sa virtuosité. Son physique romantique a une classe folle qui correspond à ce qu’on imagine d’un musicien classique.
Malgré sa jeunesse, Gabriel Bianco fait preuve, dans son jeu, d’une surprenante maturité.
Ses doigts évoluent avec éloquence et agilité sur son instrument et son oreille est sensible à la moindre sonorité de sa guitare. En communion avec elle, il la regarde sans cesse presque amoureusement. Sans être mis à l’épreuve (sinon celle de la virtuosité), l’instrument dégage d’emblée un lyrisme intense.
Il faut à Gabriel Bianco un temps pour se détacher de la musique à la fin d’un morceau, comme s’il était parti dans un autre univers et qu’il lui fallait un temps pour sortir d’une sorte d’enchantement.
Le silence après un morceau appartient encore au morceau, dit-on.
Fort d’une maîtrise technique sidérante, mais aussi d’un discours musical pensé dans les moindres détails, dont l’extrême rigueur n’implique ni austérité ni froideur, le jeune virtuose se montre capable de saisir l’auditeur et de l’entraîner vers des hauteurs inespérées. Avec tout à la fois fermeté et douceur, il exploite élégamment toutes les possibilités de son instrument en soignant les nuances comme les ruptures de rythme.
Au cours du concert à Cannes, le guitariste s’est fait un plaisir d’aiguiser les oreilles des mélomanes en associant, de manière volontariste, grand répertoire et pièces rarement programmées.
L’itinéraire n’était pas chronologique ou thématique, mais une sélection de morceaux que Gabriel Bianco a faite par associations d’idées dans un univers inventif. Et, en fait, il y avait de la joie, de la poésie et du romantisme dans son choix, sa constante sonorité claire et chaude s’accordant à la variété de son programme. Il a joué avec liberté et raffinement.
Il a donc fait son programme et assume ses choix. Après « Sevillana » de Joachim Turina, ce sont les enthousiasmantes « Variations à travers les siècles » de Mario Castelnuovo-Tedesco, puis les « Variations sur le Carnaval de Venise » de Francesco Tarrega, un morceau qui demande une grande dextérité technique et donne à l’auditeur une impression festive et colorée. Ces pièces imaginatives et très structurées sont parcourues d’une excessive énergie de pièges dissimulées par une apparente simplicité.
Avec une stupéfiante richesse d’expression, le jeune virtuose poursuit son programme en interprétant la « Première Fantaisie » de François De Fossa, « Les Soirées d’Auteuil » de Napoléon Coste, et « Asturias », écrites pour piano par Isaac Albéniz, mais transcrites pour guitare par Tarrega, ce qui a grandement participé à sa renommée. Généreusement, Gabriel a joué en rappel « Madonos » de Fédérico Moreno Torroba et a terminé par un « Prélude » de Bach, installant l’auditeur en terrain connu.
Le public était ravi de ce concert qui lui a procuré un si grand plaisir !
Il n’y a plus qu’à espérer qu’un nouveau récital de Gabriel Bianco soit rapidement programmé dans la région, car il nous rappelle combien cette musique dite « classique » est totalement vivante.
Caroline Boudet-Lefort