Que vous y soyez juste maintenant, que vous en reveniez, ou que vous imaginiez tout juste embarquer pour un dernier chassé-croisé, voici une lecture d’une singulière actualité pour une grande partie de nous autres, qui embarquons périodiquement notre petite tribu dans notre logeable véhicule, rempli à ras bord de filets à crevettes, bouées gonflables et autres ustensiles plagistes.
Villa avec Piscine – il s’agit d’une villa louée quelque part sur l’Atlantique. Herman Koch, vous vous souvenez de lui, c’était « le Dîner », bestseller hollandais qui nous parlait des affres de parents comme vous et moi confrontés à quelques bêtises d’adolescentes, descendances aux conséquences tragiques et dramatiques. Herman Koch avait su capter l’esprit du temps, les contradictions de parents surprotecteurs, le drame du quotidien qui se noue dans la banalité et qui devient inextricable.
Dans « Villa avec Piscine » Herman Koch récidive. Il s’agit d’un médecin généraliste dont la clientèle est composée de vedettes et semi-vedettes de la télévision et du cinéma. Et qui reste un citoyen moyen, avec famille, enfants, et rêves de camping en France, rivages ensoleillés, parties de ping-pong avec les petits. Confronté à un ami-client-patient aux tendances sexuelles inquiétantes et à l’épouse séduisante... la faute médicale est au tournant. Cela nous le savons dès les 50 premières pages. Comment on en vient là, voilà l’objet des 400 pages suivantes.
Cela paraît long, et en effet Herman Koch se laisse aller, plus encore que dans « le dîner », à des considérations digressives et redondantes qui pourtant, prises en elles-mêmes , sont autant de piques dans l’affreuse banalité du quotidien, décortiquée avec une précision et une cruauté de scalpel. Travers de style d’autant plus déroutant que l’art de Koch est justement, quant à l’action de ses romans, dans l’ellipse, le non-dit, le suggéré. Il y a donc deux manières de lire : rentrer dans le détail des réflexions caustiques et sarcastiques de l’auteur sur ce qui fait la routine de nos vies... et une action qui prend son temps pour se mettre en place et se déroule ensuite dans l’acidité de ressenti qui nous a fait nous pâmer pour « le dîner ».
Autant dire que cela ne finit pas bien... mais pas en tragédie non plus... simplement dans un compromis douloureux, où personne n’est plus vraiment pur et où les impurs ont leurs excuses.
On peut reprocher à ce roman quelques longueurs, mais dans son ensemble, c’est une suite logique au « Dîner », et le contrat est donc rempli. Koch mériterait de ne pas être néerlandais : ce qu’il nous raconte n’a aucune résonance nationale, son histoire, une fois de plus, pourrait arriver, arrive à n’importe qui d’entre nous. Elle se lit avec plaisir, mais elle laisse des arrière-goûts très amers. La vie au XXIe siècle, quoi !