On nous l’apprend à l’école, il existe trois couleurs primaires : le bleu, le jaune et le rouge. un imprimeur vous parlera de cyan, de jaune, de magenta et de noir. en théorie, il existe six couleurs : le bleu, le jaune, le vert, le noir, le blanc et le rouge auxquels s’ajoutent cinq demi-couleurs : le rose, le marron/brun, le gris, le violet/pourpre et l’orange. Mais les scientifiques vous prouveront qu’elles sont infiniment nombreuses et que le noir n’est pas une couleur.
Si philosophes, poètes et scientifiques ont de tous temps croisé leurs pensées pour écrire l’histoire des couleurs, c’est bien dans l’art que ces notions sont les plus subjectives et les approches les plus inventives. a la fois techniques et culturelles, elles véhiculent tout ce que nous sommes capables de penser, de voir et de percevoir. Parfois inconsciemment, l’exposition de ce 14e festival du Peu, préparée en collaboration avec le théoricien des couleurs Maurice elie*, interroge notre vision des couleurs, leurs charges culturelles et émotionnelles.
Dans la salle du conseil municipal, Jean Mas rend hommage aux couleurs du sud : bleus, jaunes, ocres, roses, violets ou verts sont les fragments d’un tout. Ces paysages morcelés font écho aux gravures de Silva usta. des villes imaginaires sur fond de couleurs franches, où nature et construction se confondent. la force de la couleur est symbolique pour Jean-Jacques Ninon qui retrace les événements historiques et politiques qui ont marqué le monde. son importante production joue avec les codes et les couleurs, à travers les cultures et les époques.
Valérie Arboireau emploie le rouge, tous les rouges... à lèvres. ici, la couleur est matière, elle est esthétique, intime, féminine. au presbytère, elle dépose des baisers sur la toile, aux côtés des œuvres de Alain Pontarelli. lui, recouvre ses œuvres d’une peau colorée et laquée. ses bas-reliefs et installations sont le fruit d’un travail minutieux où la couleur parle autant que la forme, dans une approche sculpturale, à la fois légère et sophistiquée. son installation en noir à la Chapelle saint-antoine — lieu dédié au noir et au blanc qui sont bien des couleurs ! — côtoie les grands dessins au fusain et à la craie de Christian vialard. Culture populaire et codes esthétiques apparaissent dans des contrastes forcés. Mais dans son travail pictural, ce peintre et musicien emploie toutes les couleurs. au presbytère, ses acryliques et huiles dialoguent avec la série monochrome de Cédric Teisseire pour qui la couleur est une matière. il emploie toutes les couleurs, quasiment sans distinction, et s’intéresse aux propriétés physiques de la matière dans un travail où la pesanteur est son alliée.
sur le parvis du Musée du Peu, Antoine Graff décline les couleurs Pantone, du nom du référencier mondialement utilisé, en chiffonnant les couleurs dans des sculptures de papier et de résine.
Enfin, à la Chapelle du Passet, Xavier Theunis construit des tableaux minimalistes de bandes adhésives colorées. Par les choix de couleurs qu’il fait, son intuition et les théories sur la couleur se rencontrent.
nous sommes tous des spécialistes des couleurs, puisque nous les pratiquons tous les jours, mais quel rôle joue la couleur dans la création artistique ? Chacun des artistes de cette édition a ses réponses.