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Fin de cet événement Novembre 2017 - Date du 6 mai 2017 au 12 novembre 2017

Poésie, de Joseph Inguimberty à découvrir dès le 6 mai au Musée Regards de Provence

Du 6 mai au 12 novembre 2017, le Musée Regards de Provence met à l’honneur le peintre originaire de Marseille, Joseph Inguimberty (1896-1971). Son parcours artistique est un regard croisé entre la Provence et l’Indochine. Son œuvre incarne deux vies et expériences hors du commun, que sont celles de l’hôte du delta tonkinois et du peintre de la Provence. Deux pays : deux lumières et deux natures, qui révèlent pourtant les mêmes qualités fondamentales, le même souci de franchise d’une œuvre intense, solide et sensible à la fois. Il s’inscrit dans la double filiation des paysagistes et des impressionnistes, en restituant une nature franche, une atmosphère traduite directement du motif, une description honnête et poétisée du paysage, entre harmonie et équilibre.

Menton, huile sur toile 53 x 81 cm, collection particulière. (crédit : Aleksander Rabczuk)

Cette exposition réunit près de 80 œuvres, liées à ses vingt années passées en Indochine, illustrant paysages, travailleurs dans les rizières, scènes de vie, intimités des femmes, et d’autres révélant l’activité portuaire de Marseille, des paysages des calanques, de l’arrière-pays provençal, de la Côte d’Azur jusqu’à la frontière italienne.

Son parcours

Inguimberty nait à Marseille en janvier 1896. Jeune, il intègre l’Ecole des Beaux-arts de Marseille, alors dirigée par Alphonse Moutte et suit parallèlement les cours d’Eugène Senès, architecte en chef de la ville.
A 17 ans, Inguimberty poursuit sa formation à Paris à l’Ecole nationale supérieure des Arts Décoratifs.
Son travail, pour lequel il a déjà obtenu plusieurs récompenses, a été couronné du Prix National de peinture au Salon de 1924. Il obtient des bourses pour voyager dans plusieurs pays du continent européen, et accepte, en 1928, le poste de professeur d’arts décoratifs à l’Ecole des beaux-arts de Hanoï, sous l’impulsion de Victor Tardieu et de l’artiste Nam Son. Il y restera plus de vingt ans, à vivre et travailler au plus près de la jeune génération d’artistes locaux. En 1946, le contexte politique l’oblige à rentrer en France avec sa famille, où il continue sa carrière de peintre. Si l’expérience asiatique a profondément marqué à la fois l’artiste et l’homme, Inguimberty reprend peu à peu sa place dans un monde qui n’est assurément plus celui qu’il a quitté. Il se raccroche à la tradition, à l’expérience, au solide métier acquis avec peine, qui lui permettent de ne pas s’égarer sur le chemin du retour. Ainsi, l’art d’Inguimberty est fait d’un lent labeur, d’une douce constance.

Son Sud natal - entre subtilité et honnêteté

Fasciné par l’animation du port, il tire trois immenses compositions de 20 m2 consacrées à l’animation des quais et au labeur des hommes : Marseille, Le débarquement du plâtre et Le débarquement des arachides, dont l’une d’entre elles obtient le Prix National de peinture au Salon de 1924. Chaque tableau constitue un assemblage de saynètes où se dégagent une force et une puissance.
La robustesse des dockers crée l’équilibre dans cet univers exclusivement masculin fait de formes épaisses, lourdement unies au sol ; la tension physique est palpable.

Le Vieux-Port de Marseille, Huile sur toile 80 x 130 cm, collection Banque Martin Maurel. (crédit : Aleksander Rabczuk)

Les couleurs ne sont jamais éclatantes comme on pourrait s’y attendre dans le Midi mais semblent voilées, ternies, grisées. La lumière ne s’y accroche pas par petites touches, elle se distribue plus lourdement, comme par coulées, de manière à enrober certaines formes, renforçant le sentiment de solidité.

Sa vision est plus subtile et sa démarche se veut plus honnête. « Le soleil ardent de la Méditerranée mange la couleur et n’offre à l’œil qu’une palette de tons gris aux nuances d’ailleurs infiniment variées. »
Le Sud natal ne lui inspire ni exubérance, ni volupté, ni aucun des artifices de la séduction.

Joseph Inguimberty se trouve donc être l’un des représentants d’une approche différente de la Provence, si longtemps prisée des peintres pour l’éclatante lumière qui la baigne. Comme Auguste Chabaud, Inguimberty perçoit dans sa région d’origine une dimension supplémentaire, une intensité presque dramatique, héritée de l’Antique et qui s’exprime en une palette sourde.

L’hôte du delta tonkinois - Son aventure de 20 ans

Paysannes dans les rizières, huile sur toile 96 x 152 cm, collection particulière. (crédit : Aleksander Rabczuk)

Nommé professeur d’arts décoratifs à l’Ecole des Beaux-arts de Hanoï, Joseph Inguimberty guidera, avec passion et dévouement, son enseignement auprès d’une vingtaine de promotions d’étudiants. Représentant d’une tradition moins classique, héritée des paysagistes et des impressionnistes français, il va entrainer les élèves de l’Ecole à peindre directement sur le motif, les invitant à écouter la nature, à l’observer, dans une vision assez libre de la transmission du savoir. Impressionné par le décor des temples de la région de Hanoï et intéressé à la technique de la laque, il va favoriser le développement d’un véritable art de la laque en fondant un atelier à l’Ecole. Inguimberty y a probablement trouvé le moyen d’inculquer à ses élèves application, persévérance et modestie.

En Indochine, Inguimberty enseigne tout autant qu’il apprend. Sa peinture se nourrit des paysages qu’il découvre, bien différents de ceux de sa Provence d’origine. Le peintre continue à participer aux Salons parisiens, et ses envois font souvent forte impression. Ces tableaux, représentant l’Indochine, conduisent la critique à ne jamais intégrer Inguimberty à aucun des mouvements ou des groupes qui s’étaient constitués autour des peintres de sa génération. Comme si le sujet seul de ses toiles, par son exotisme, empêchait d’envisager les qualités intrinsèques de l’œuvre autrement que sous le prisme du dépaysement.

Dans le sillage des paysagistes et des impressionnistes français, le peintre travaille sur le motif, se tournant d’emblée vers la campagne environnante, la baie d’Halong et les Hauts Plateaux pour appréhender et observer ses paysages et les restituer dans la plus grande simplicité. Le paysage n’est plus anecdotique, il devient sujet, un concert de forme et de couleurs qui vit, si puissant qu’il n’a plus besoin d’autres éléments pour exister sur la toile.

Joseph Inguimberty a souhaité inscrire sur la toile la vie quotidienne des humbles travailleurs : paysans des rizières, pêcheurs ou porteuses de ganh, assistés des animaux qui les aident dans leurs tâches. Par un traitement original de la couleur et de la lumière, ces thèmes « sociaux » sont abordés sur un mode réaliste, tout en gardant une certaine distance avec le sujet, qui permet, par-delà les frontières, une réflexion universelle sur la condition humaine.

Parfois, la femme est mise en scène dans une nature luxuriante, dans un univers féminin presque onirique ou féérique, hors du temps. Sensuelles mais inaccessibles, évanescentes évocations d’une infinie douceur, jusqu’à leur regard, ces femmes semblent plutôt vouloir ressusciter un paradis perdu, l’innocence de l’enfance. Dans ces évocations, la vision du peintre n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle de Paul Gauguin.

De retour en Provence

A la fin de l’année 1946, à peine rentré à Menton, il se met en quête de nouveaux motifs qui pourraient l’inspirer et s’efforce de réapprendre à inscrire sur la toile la lumière méridionale. Le peintre retourne à Marseille et retrouve avec bonheur les quais de sa jeunesse qui ont beaucoup changé. De nombreuses infrastructures ont été détruites par la Seconde Guerre mondiale et le port est en pleine reconversion.
L’Estaque retient aussi les faveurs de l’artiste, à l’instar d’autres lieux côtiers emblématiques tels que le Vallon des Auffes, les Goudes ou les calanques.

Le peintre explore aussi l’arrière-pays provençal et les villages des environs de Menton où il vit désormais.
Il se rend régulièrement au pied des Alpilles pour peindre autour notamment des villages d’Eyguières et d’Eygalières, d’Orgon, de Saint-Rémy. Dans le Luberon, il s’attarde dans les champs et les oliveraies des environs de Murs.
La géométrie de ces terrains cultivés n’est pas sans rappeler celle des paysages du Tonkin. Mais ici, l’espace est plus composite. Si le vert domine, la palette déploie l’éventail de toutes les humeurs du minéral et du végétal. Du jaune, de l’ocre terreux, du blanc rocailleux, jusqu’au gris bleuté.

La calanque de Sormiou, 1931, huile sur toile 73 x 116 cm, collection particulière.(crédit : Aleksander Rabczuk)

Artiste modeste et simple, il fuit les mondanités, et préfère vivre à l’écart de la capitale. Pourtant, les plus grandes galeries parisiennes s’intéressent à son parcours atypique. Il expose chez Drouant-David, à la galerie Romanet…
La galerie Charpentier, en 1936, lui avait déjà consacré une exposition personnelle, présentant des toiles d’Indochine et d’autres, réalisées avant son départ ou pendant ses congés en France.

A son retour en France, il a donc du mal à trouver sa place au sein d’un groupe d’artistes. Pourtant, le travail de Joseph Inguimberty offre une parenté évidente avec celui des peintres du groupe de la Réalité poétique, qui pour la plupart ont étudié avec lui aux Arts Décoratifs. Ceux-ci se rejoignent sur une approche poétique de la réalité dont le point de départ est la maîtrise de la technique, la défense du métier. Ils n’adhèrent pas aux évolutions de l’abstraction qui divisent alors le monde de l’art, refusent de sacrifier ce qu’ils tiennent pour important à une quête éperdue de la nouveauté. Ils s’attachent à rendre la réalité de manière sensible et délicate, passée au crible de leurs émotions, avec sincérité et optimisme. Ils transposent le réel le plus banal sur le plan de la poésie.
La nature est décidément l’atelier favori de l’artiste. Depuis Menton, en remontant vers l’arrière ?pays, l’artiste aime les lignes souples des montagnes où se blottissent les villages, la fraîcheur de ces terres escarpées. Comme en Indochine, il trouve l’inspiration dans une nature travaillée par l’Homme, qui peut être rude, parfois même hostile, mais sait se montrer généreuse pour qui fait l’effort de la travailler.

Même dans ses toiles plus intimes, la nature n’est jamais loin. La fenêtre ouverte, le jardin prolongé par la mer et l’ensoleillement qui en émane, le bouquet de fleurs fraichement cueillies, suggèrent sa présence à l’intérieur de la maison. Ses toiles sont particulièrement colorées, la palette s’illumine et s’anime de teintes que le peintre observe rarement au dehors : les coloris des tissus, des boiseries, les garnitures du mobilier... Jeannette, sa femme et Nikki, sa fille, sont ses modèles favoris. Nikki, portant de longues nattes ou les cheveux relevés en chignon, pose de longues heures durant, occupée à lire, arranger les fleurs dans un vase ou porter un panier de fruits.

L’artiste aux deux vies

L’œuvre d’Inguimberty incarne deux vies et expériences hors du commun que sont celles de l’hôte du delta tonkinois et du peintre de la Provence. Deux pays, deux lumières, et deux natures, qui révèlent pourtant les mêmes qualités fondamentales, le même souci de franchise. La peinture d’Inguimberty s’est construite à son image. Une œuvre intense, poétique, solide, honnête et sensible à la fois. Une force tranquille, qui prend tout son temps pour dévoiler les rythmes de la nature en une mate palette qui ne cherche pas à séduire, d’avantage à apprivoiser.
Avec humilité, dans l’apparente simplicité des choses, Inguimberty, nous surprend et nous invite à observer, patiemment, car la poésie contenue dans le réel ne se livre pas au premier coup d’œil.

Ateliers d’art plastique

Dans le cadre de l’exposition – Poésie de Joseph Inguimberty - le Musée Regards de Provence propose des ateliers d’art plastique, animés par la plasticienne, diplômée des Beaux-arts, Frederika von Maltzahn.
Concentrés sur le ressenti, les participants découvrent les œuvres de Inguimberty d’un nouvel œil et dans tous leurs détails :
Les dates des prochains ateliers seront mises en ligne début Mai.
 Frais de participation : 8 € (7 à 12 ans) / 12 € (à partir de 13 ans) comprenant entrée aux expositions et fournitures gratuites. Inscription obligatoire sur : [email protected] ou au 04 96 17 40 40

Photo de Une : Le Vieux-Port de Marseille, Huile sur toile 80 x 130 cm, collection Banque Martin Maurel.

Cette exposition est soutenue par AG2R LA MONDIALE, mécène principal.
L’Association Regards de Provence remercie ses Membres Fondateurs Prestiges : Aéroport Marseille Provence, Caisse d’Épargne Provence-Alpes-Corse, Econocom et Sodexo ; Membres Fondateurs Premiers : Air France, Banque Martin Maurel, CIC Lyonnaise de Banque et Deloitte ; Membres Fondateurs Historiques : Delta Assurances, Grant Thorton, La Provence, Marrou Traiteur, Prado Epargne, Transports Léon Aget, Tunnel Prado Carénage.
Exposition au Musée Regards de Provence, à Marseille
Du 6 mai au 12 novembre 2017
Informations pratiques et Visites
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h.
Billet expositions temporaires : Plein Tarif : 6,50 €. Tarifs réduits : 5,50 € - 4,70 € - 2,00 €.
Billet couplé expositions temporaires & scénographie permanente : Plein Tarif : 8,50 €. Tarifs réduits 7,50 €, 6,50 €
Visites commentées : tarif d’entrée + 6 € /pers., le mardi et samedi à 15h et tous les jours sur réservation.
Visite commentée gratuite le samedi à 10h30, hors droit d’entrée sur réservation (6 à 25 personnes).

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