Pour Paolo, le dessin est premier. Prolongement de la pensée en lien avec l’inconscient, son trait ultra fin se délie, s’enroule, faisant apparaître une matière dense de lignes entremêlées d’où émergent des volumes, des cavités, des formes indéfinissables.
Chaque dessin du sculpteur est une préparation à la confrontation avec la matière.
Si le trait peut se poursuivre à l’infini, la sculpture, elle, est un geste arrêté dans le temps, jamais terminée : "on ne finit pas une œuvre, on l’abandonne" (Picasso), mais la réflexion qu’elle a suscité se poursuit nécessairement dans celle qui suivra.
Paolo Bosi respecte dans le bois sa simplicité (dans Bosi, il y a bois). La matière guide toujours ses gestes. Il creuse le bois, le met à nu, crée des vides, des espaces intérieurs plus intimes. La terre vient ensuite couvrir ou s’encastrer dans la sculpture, agissant comme système de blocage ou élément de protection.
Chaque sculpture de l’artiste est à la fois nourrie du bois qui a marqué son enfance (les tas de bois immenses dans sa maison familiale des bords du Lac Majeur) et de la terre de Vallauris, sa ville d’adoption.
Si quelques unes de ses premières œuvres pouvaient faire penser à des outils, les sculptures verticales présentées sur les murs blancs de la galerie Bazik prennent une autre dimension, un sens plus profond, ainsi sa récente série des Otages.
A partir de troncs de bouleau, une matière proche de la peau humaine, tendre, claire et douce quand on enlève l’écorce, Bosi fait apparaître des corps amaigris, blessés, douloureux.
Les chambres à air qui sont là pour tenir la terre prennent alors l’apparence de bâillons, d’entraves. Elles bandent les yeux, attachent le corps, les enchaînent, faisant apparaître l’otage dans toute sa fragilité, sa vulnérabilité, son impuissance.
Si dans les sculptures de Berlinde de Bruyckere, le bois, en souffrance, est réparé à l’aide de cautèles, tissus enroulés autour de plaies supposés, chez Paolo, le bois est dressé, impassible dans l’attente, dans l’espoir d’une libération qui ne vient pas.
Autre sculpture remarquable, celle d’un totem de deux mètres de haut, une œuvre particulière née d’un tronc de tilleul ouvert en deux. Mis côte à côte, les deux parties prennent l’apparence d’un linceul, d’un suaire où est lisible l’image d’une femme, d’une Vierge ou d’une mère bienveillante (avec ses coudes à la périphérie du bois). Tout est déjà là. La terre blanche, une forme de croix suffisent à compléter le sens.
Dans les œuvres récentes de l’artiste, la rugosité, l’aspect brut du bois a laissé place à une approche plus lisse, plus zen, quasi hiératique à l’instar des figures primitives, des masques africains ou des figures christiques du Moyen Age. Une mixité réalisée entre plusieurs mondes, plusieurs cultures.