Pour avoir le plus de liberté possible, ne pas avoir à se soucier d’assurance, de ne pas se confronter aux egos des artistes (le sien lui suffit - il a même fait une théorie), Ben a choisi de montrer sa propre collection.
Toutes les œuvres exposées lui appartiennent, à part la superbe peinture de Martine Doytier (voir photo ci dessous) qui évoque le Festival du Nouveau Réalisme à l’Abbaye de Roseland en 1961, exposée en prémice de l’importante rétrospective qui aura lieu en septembre à l’Artistique.
Cette exposition-installation est également envahissante dans le temps : durant toute une année, Ben va créer des événements, des performances, des rencontres, des projections. Il a carte blanche et nous promet des surprises. Une salle de projection est prête pour montrer des films d’art et d’artistes. La Poste va même éditer un timbre à cette occasion.
Aidé d’Annie, sa vaillante femme, d’Eva, sa fille, de son petit-fils Benoît et des nombreux collaborateurs du musée dirigé par la souriante Frédérique, Ben a pendant plus de deux mois orchestré cet énorme accrochage.
Pour lui, c’est également une exposition de souvenirs. Il peut vous raconter l’histoire de chaque œuvre, vous parler de son auteur. Il faut l’entendre évoquer le jour de l’achat ou de l’échange, il mêle toujours des anecdotes à des analyses liées à un moment de l’art. Il a côtoyé des centaines, des milliers d’artistes qu’il a épinglés dans ses chroniques photocopiées, puis imprimées, et maintenant publiées sur Internet.
Tous ses amis sont là, les déjà morts et les vivants vieillis, mais aussi des plus jeunes car Ben est toujours à l’affût du « Nouveau ».
Il s’intéresse à ceux qui émergent, ne craint pas les remises en question. Il a tout digéré depuis le début du vingtième siècle : Dada, Duchamp, Fluxus, le Nouveau Réalisme, la Figuration Libre, le Street art, etc… Durant plus de soixante-dix ans, il n’a cessé de peindre, de sculpter et d’assembler des objets et des idées.
On y retrouve ses thèmes récurrents : les femmes, les ethnies, l’histoire de l’art, l’ego… Et bien sûr ses interrogations par dizaines : il m’a parlé de son projet de faire une exposition où il n’y aurait que des phrases interrogatives.
Il y a beaucoup à voir, à lire, à entendre, à photographier dans chaque salle plus ou moins thématisée : un petit salon, une chambre à coucher, un portant avec des robes qu’il a créées, une baignoire, un babyfoot, des tables et des chaises pour discuter ou faire des bras de fer, un petite estrade et un micro pour débattre... La cage d’escalier a été revisitée : les premières marches, on est autiste, puis bipolaire, puis mégalo, parano, etc. À l’extérieur, les jardins accueillent de nombreuses sculptures et un « ring » prêt à présenter des performances.
C’est une exposition pleine de vie, jubilatoire, festive, humoristique et qui fait réfléchir.
Avec Ben, l’art n’est ni triste, ni une affaire de spécialistes, il est un excellent pédagogue qui nous invite à entrer dans son univers.
Le soir de l’inauguration, un monde fou évidemment : Robert Roux en maître de cérémonie, le maire Christian Estrosi et les officiels, tous souriants et heureux d’être là, d’assister à la performance de Jean Mas épluchant trente kilos de patates qu’il distribue ensuite en tant qu’œuvres d’art (à conserver ou à déguster). On peut aussi admirer Marie-Noëlle, une sculpture vivante, ou l’œuvre invisible de Max Horde. Même les journalistes ont le sourire.
On attend la suite. C’est une expo qu’on peut voir et revoir sans s’ennuyer, surtout que nous attendent des surprises dont Ben ne manquera de nous tenir au courant.
Musée International d’Art Naïf Anatole Jakovsky
Château Sainte-Hélène
23, av. de Fabron – Nice
Tous les jours de 10h à 12h30 et de 13h30 à 18h sauf le mardi
Le Musée d’Art Naïf est maintenant facilement accessible par le tram.