De ses tout premiers travaux, il n’est rien resté à part un petit paysage peint à seize ans à Livourne, sa ville natale.
Pourtant, dès l’âge de quatorze ans, il quittait l’école pour se consacrer à l’art. De ses études aux Académies de Livourne, de Florence et de Venise, de ses dessins, de ses peintures, de ses sculptures, rien ne nous est parvenu (probablement ont-ils été détruits par l’artiste lui-même). Ce n’est qu’à partir de 1906 que datent ses dessins et peintures connues.
Bien formé et imprégné de toute la tradition picturale italienne, des primitifs aux artistes de la Renaissance, Modigliani décide (il a alors 22 ans) d’aller vivre à Paris, la Mecque des peintres.
Confronté à l’effervescence artistique, influencé par Toulouse-Lautrec et Cézanne, il cherche sa voie. Quelques peintures vont le faire connaître : La Juive, le Nu Dolent, le Violoncelliste (Room 2), mais poussé par son ami Brancusi, c’est à la sculpture qu’il consacre toute son énergie.
Il s’attaque au plus difficile, à la pierre dure, mais avant, il prépare son projet par de très nombreux dessins.
Dans la superbe série de neuf têtes sculptées joliment scénographiés dans une salle blanche (Room 5), on devine le chemin qu’il a choisi d’emprunter : la simplicité des lignes, la courbe idéale, la pureté. Il dessine également une série de cariatides, colonnes d’un futur Temple de l’Amour, malheureusement jamais réalisé.
Au bout de trois années de travail intense, ses poumons déjà très affaiblis par des maladies infantiles ne vont plus pouvoir supporter les poussières dues à la sculpture.
Dans le nouvel atelier où il vient de s’installer, n’ayant plus de cour où travailler en plein air, il abandonne la sculpture.
Ses premiers marchands, Paul Alexandre et Paul Guillaume préfèrent la peinture, plus facile à vendre.
À Paris, après 1908, le centre de la création se déplace vers le sud et le carrefour Vavin. Quittant les petites rues escarpées et difficiles d’accès de Montmartre, les artistes sont attirés par les grandes avenues et les cafés bondés de Montparnasse fréquentés par des collectionneurs, des marchands et amateurs d’art.
À l’instar de ses amis peintres, Modigliani mène une vie de Bohème, trouvant parfois refuge dans l’alcool et les drogues.
Dans son nouvel atelier de La Ruche, il retrouve Picasso, Fernand Léger et de nombreux artistes d’Europe Centrale (Soutine, Chagal, Kremègne, Kisling, etc.)
Vivant dans l’épicentre de l’effervescence créatrice parisienne, des remises en questions picturales, son travail devrait détonner car dans ses tableaux, il n’y a ni paysages, ni scènes de rues, ni animaux, mais seulement des portraits aux pauses plutôt statiques et aux formes simplifiées.
C’est la représentation de la figure et de l’âme humaine qui l’occupe toute sa courte existence.
Dans la Salle des « Kindred Spirit » (Room 7) sont présentés les portraits de ses amis proches : Max Jacob, Cocteau, Juan Gris, Picasso, Diego Rivera, Survage, etc.
Malgré la guerre, il participe à quelques expositions au Salon des Indépendants, au Salon d’Automne, mais vit difficilement de ses ventes et des maigres subsides que lui envoie sa mère.
Sa peinture, enrichie par son activité de sculpteur, évolue vers plus de simplicité, une recherche de pureté des lignes et d’expression des émotions.
Il rencontre Jeanne Hébuterne, dite Jeannette, une étudiante en art qui va devenir son grand amour, sa muse et son principal modèle. Il peindra d’elle plus de 25 portraits.
Léopold Zborowski, un poète d’origine polonaise converti dans la vente de livres précieux et d’œuvres d’art va devenir son marchand.
Passionné par la peinture de Modigliani qui, pour lui, « vaut deux fois Picasso », il vend des toiles et organise une exposition personnelle, la seule du vivant de l’artiste, à la galerie Berthe Weill, pour laquelle il peint des nus somptueux.
Cette exposition, l’anecdote est connue, fera scandale. Un commissaire menacera de la faire fermer si on n’enlevait pas les toiles de la vitrine... car les nus avaient des poils ! Un scandale qui fera parler, contribuant à la célébrité de l’artiste.
Dix nus parmi les plus beaux sont présentés (bien trop sagement) dans la salle des « Modern Nudes » (Room 8).
Ses nus : Almaisa, le Nu Blond, la Belle Romaine, etc., montre des chairs érotisées, vibrantes, jamais vulgaires, avec toujours cette apparence d’élégance alanguie (le célèbre nu vendu en 2016 à 170 millions de dollars n’a pas été prêté pour l’occasion !)
En 1918, la guerre se rapproche, les bombardements touchent Paris. Modigliani est malade et Jeannette enceinte. Zborowski les convainc de se réfugier dans le sud.
Zborowski et sa femme Hanka, Foujita et sa compagne, Soutine, Amedeo et Jeannette et la mère de Jeannette (inquiète pour sa fille), s’installent quelques mois dans le petit village du haut de Cagnes.
Au soleil du midi, sa palette s’éclaire, dominée d’orangé (abricot), de rouge, de bleu, son pinceau se libère et son style s’affine. À Nice et Cagnes, il peint plus souvent qu’à Paris et dans de plus grands formats.
La salle consacrée à cette période est somptueuse, remplie de chefs d’œuvres : le Petit Paysan, la Belle Épicière, Elvire, etc..
À Cagnes, il peint une très belle série d’enfants et de jeunes femmes du village.
Quelques mois plus tard, ils s’installent à Nice où il réalise quelques portraits de commandes comme ceux du chocolatier Menier, de l’acteur Gaston Modot et sa femme, de très nombreux portraits d’amis et de gens de rencontre.
Sur les conseils de son ami peintre Survage, il s’essaie au paysage et peint quatre vues de Cagnes. Le joli petit paysage où on voit la fermette qu’à habitée Soutine (et où, probablement il a dû aussi travailler) est présent dans l’exposition.
Une unité de style s’affirme. La forme du corps est ultra simplifiée, les traits sont fins et précis, les visages ovales, sans ombre, généralement orangés avec quelques touches rouge (abricot mûr) pour les joues.
Ce « dernier Modigliani », est plus simple, plus pur, d’une expressivité douce mais lumineuse.
Apres treize mois passés dans le Sud, il regagne Paris où, six mois après son retour, épuisé par la tuberculose, il décède. Jeannette, sa compagne, de nouveau enceinte, se suicidera le lendemain de son enterrement. Son émouvant dernier autoportrait est présenté à la fin de l’exposition.
L’exposition s’attache à montrer qu’au-delà du mythe qui entoure l’homme, la délicate beauté et la richesse colorée de ses œuvres sont impressionnantes. L’émotion que chacune dégage montre combien la peinture sait exprimer l’âme humaine.
À ne pas manquer : dans une petite salle, une expérience originale de réalité virtuelle (grâce à des casques) vous fera pénétrer dans le dernier atelier de l’artiste.