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Fin de cet événement Mars 2015 - Date du 17 janvier 2015 au 14 mars 2015

Migrant poetry

Présenté pour la première fois à Nice, à La Station, Babi BADALOV (né en 1959) est un voyageur, un nomade forcé d’Azerbaïdjan. Réfugié politique en France depuis 2011, Babi BADALOV construit un univers poétique, puisant à la fois dans ses souvenirs personnels et des questions sociétales : peinture, poésie, performance et dessins se mêlent dans des installations qui questionnent le sens, le signifiant et la norme dans nos sociétés contemporaines. Sa « poésie visuelle » apparaît également sous la forme de carnets de dessins et de collages, combinant des recherches artistiques et linguistiques et commentant la manipulation des images par les médias.

Cette exposition, réalisée en partenariat avec la galerie Gandy (Bratislava), fera l’objet courant 2015 de la publication d’un catalogue réalisé avec le concours de Matali Crasset pour le graphisme, Andrey Misiano et Vit Havranek pour la rédaction des textes et Catherine Facerias pour la traduction (une production de la galerie Gandy et des éditions Balléor).

Lettres, mots, dessins, photos, tissus, sacs, T-shirts, chaussures, papiers, cartons, murs, détritus, objets perdus ou jetés, puis glanés dans la rue par l’artiste, Babi Badalov transforme tout en matériau artistique, surtout lorsqu’il est pauvre dans sa valeur d’usage.

Lettre, mot, phrase, image, tout est déconstruit, libéré de la contrainte de la norme, de la logique convenue. Signifiants et signifiés sont amplifiés, séparés, déliés pour acquérir une autre forme, un sens nouveau ouvert à une multitude d’interprétations pour muter vers une poésie très personnelle et très politique à la fois, ce qu’il appelle « Poésie visuelle ». Contrepèteries, jeux de mots basculent les conventions, moquent les grands noms et les phrases toutes faites. Même les acquis des quatre années de formation au collège artistique de Bakou volent en éclats. Les langues, la structure des signes, les alphabets, les sujets personnels et politiques, la mort de sa mère, la nostalgie du village de Lerik, l’histoire de l’art, sa détention au Royaume-Uni, son identité sexuelle, son image et celle des autres, les abus et les dérives du pouvoir sur toute la planète. Tout se confond, tout est déhiérarchisé. Une confusion des langages, un brouillage des frontières, une déliquescence des systèmes qu’il provoque pour questionner la vraie signification de la rigueur de la norme.

Pourtant, entre les mots et les images, Babi dessinent des lignes, comme les liens invisibles unissant pensée et langage. Comme si des lignes se formaient entre l’intérieur de sa tête et le monde qui l’entoure. Des lignes sur du papier marqué par les stries du stylo qui se changent en boyaux, en arborescence végétale ou damier d’un échiquier. La ligne est passage, la ligne est trait d’union, la ligne est lien. Elle est pensée, lettre, mot, elle est visage. La lettre aussi peut devenir visage. Babi cherche avec le dessin automatique qu’il pratique méthodiquement à mettre du liant. Dans un élan pulsionnel, il donne une forme à des processus psychique d’association et de mise en relation. Le dessin, le signe, le mot, l’ornement sont aussi réparateurs de l’image souvent meurtrie des humains. Ils viennent combler une béance, permettre les passages, mettre en liaison, reconstituer une identité questionnée.

Les matériaux sont pauvres, comme les techniques : collage, coloriage, écriture griffonnée sur des cahiers, des feuilles de papier, des bouts de draps qui font office de tenture, de panneau d’écriture. Babi Badalov ne cherche pas le beau, la maîtrise, la virtuosité. Son ornementation reste celle d’un enfant coloriant son cahier d’écolier. L’artiste se fait aussi quotidiennement chiffonnier pour collecter toutes ces photos, cartes de visite, étiquettes et prospectus qu’il utilise dans ses collages. Cet attachement au matériau de récupération, au geste de tous les jours se veut même, chez lui, plus qu’un reliquat d’habitude soviétique, un acte, une posture politique. Même la réutilisation des courriers administratifs comme support de collage et de dessin est un pied de nez à l’Etat français dévoreur de papier. Tout ce qui l’entoure et l’assaille au quotidien, est ingurgité et digéré et transformé. Ainsi en va-t-il de ses nombreuses expériences de vie, que ce soit les foisonnantes années de l’underground pétersbourgeois ou l’humiliante expulsion du Royaume-Uni, jusqu’aux tracas consulaires d’un simple détenteur d’un « Titre de voyage », passeport du réfugié pour voyager hors d’Europe. Plus, il fait de ses difficultés sa force, ses atouts : la confusion des langues (l’artiste en parle six, mais aucune parfaitement), l’isolement social et culturel (il a grandi dans un village de la frontière iranienne en Azerbaïdjan alors soviétique), le statut d’exilé, homosexuel, banni de chez lui. Il en fait chronique sur tout ce qu’il trouve de supports simples et légers quitte à remplir les espaces d’exposition de son journal mural. Car pour Babi Badalov l’art est existentiel, l’art est politique.
Mireille Besnard

http://www.gandy-gallery.com

http://www.babibadalov.com

Artiste(s)

Babi BADALOV

Lettres, mots, dessins, photos, tissus, sacs, T-shirts, chaussures, papiers, cartons, murs, détritus, objets perdus ou jetés, puis glanés dans la rue par l’artiste, Babi Badalov transforme tout en matériau artistique, surtout lorsqu’il est pauvre dans sa valeur d’usage. Lettre, mot, phrase, (…)

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