| Retour

(La) Horde : Exposition performative du Ballet National de Marseille au Palais des Festivals de Cannes

(La) Horde a déboulé à Cannes avec une « exposition performative » et a totalement investi le Palais des Festivals pour lequel elle a été spécialement conçue ! Première mondiale (les 28 et 29 juillet) pour ce spectacle insolite qui n’en est pas un, mais une multitude de mini spectacles éparpillés dans tout le Palais de haut en bas jusque dans ses sous-sols.

Tout commence par ses marches, les fameuses marches avec son tapis rouge où aiment être photographié les plus célèbres stars de cinéma. Le tapis rouge est en partie brûlé, noirci. Pourquoi ? Est-ce pour le geste, pour le désigner comme faisant partie intégrante du spectacle ? Sur ces mêmes marches, trois cascadeurs s’agressent, s’écroulent, dégringolent, font des roulés-boulés spectaculaires en hommage à Belmondo qui prenait des risques très audacieux. Ils attirent les regards des badauds tout autant que ceux des « visiteurs » de cette exposition- spectacle où sont mêlés danse, cinéma et performance...

En pénétrant dans le Palais, chacun suit le parcours qu’il veut : aller dans les grandes salles de spectacles ou dans ses salons de réceptions, sur ses terrasses ou ses paliers, dans ses moindres recoins... Les yeux sont attirés partout. Chaque visiteur peut voir des films sur d’immenses écrans, ainsi l’un d’eux avec des images de foules ni joyeuses, ni hostiles, ni arrogantes... Des foules où les visages sont très visibles avec des expressions déconcertantes. Et perchée tout en haut à gauche de l’écran, une danseuse, à peine visible, attire le regard par sa solitude animée de gestes.

Durant trois heures, le spectateur déambule, se balade dans le Palais fait des découvertes plus ou moins insolites de cette exposition performative intitulée « We should have never walked on the moon  » (en français, «  Nous n’aurions jamais dû marcher sur la lune  »), une phrase qu’aurait citée Gene Kelly. Ce danseur, aux pieds magiques, trouvait que ce premier pas de l’homme sur la lune était lourd et maladroit et il l’aurait dit à l’astronaute Buzz Aldrin. Les trois performeurs (Marine Brutti, Jonathan Debrouwer et Arthur Harel) qui sont à la tête du collectif « (La) Horde » voulait ainsi rendre hommage à Gene Kelly qu’ils adorent !

Ces trois trentenaires ont désiré réunir leurs talents multiformes autour de l’expression du corps entre danse, théâtre, hip-hop, vidéo, cinéma ...

Bref, des performances en tout genre qui débordent du plateau ! Le spectacle surgit partout ! Il y a 25 danseurs du Ballet National de Marseille, des cascadeurs, 7 jumpers... S’ils ne sont pas professionnels, ils sont cependant experts dans leur domaine. Cinquante artistes qui ont pris possession du Palais.

Ils apportent un regard critique et pas uniquement esthétique sur la société actuelle, aussi la voiture prend-elle une place prépondérante : il y a une immense limousine accidentée autour (ou sur) laquelle rampent des performeurs morts ou blessés, assommés par la situation... Il y a aussi cette carcasse d’auto qui est une véritable sculpture métallique toute en ferraille sans carrosserie et sur laquelle (ou avec laquelle) des performeurs dansent amoureusement et gesticulent tandis que la ferraille cahote, grince, soupire, gémit, jouit ... et même danse elle aussi.

Mais évidemment, le clou de la soirée ce sont les trois pièces des chorégraphes Lucinda Childs, Oona Doherty, Cécilia Bengolea et François Chaignaud que danse le Ballet National de Marseille soit dans la salle Debussy ou dans le Salon des Ambassadeurs.

Malgré leur talent, ils font partie de cet ensemble un peu pagailleur où toute cohérence est impossible. Il y a quelques belles trouvailles et quelques « trucs » piqués un peu partout telles des inscriptions sur le sol (« Demain est annulé »).

Tandis que chacun dans le public s’invente sa propre histoire, à son gré. Ce « spectateur » doit accepter de louper des « numéros », le principal pour lui est de s’en mettre plein les mirettes et de laisser cheminer ses pensées sur ce qui se révèle devant lui : drôle ou tragique.

Ce « cirque d’aujourd’hui » peut le réjouir et le décider à renouveler l’expérience qui ne peut que s’améliorer. A suivre, donc !

Caroline Boudet-Lefort
Représentation ce 29 juil. 2022. 21h00

Toutes photos DR

Artiste(s)