D’abord musicien virtuose, compositeur, Ben Patterson est aussi poète et plasticien. Autant dire qu’il a exercé dans toutes les formes d’art, et si on s’intéresse quelque peu à cette personnalité, on s’aperçoit vite qu’il est un "monstre" en la matière. Son œuvre dans tous les domaines est subversive. Il refuse l’esprit de sérieux et a fait des adeptes que l’on retrouve regroupés au sein de la Fondation du Doute à Blois qui est un partenaire privilégié de la galerie.
"Trop d’images tuent l’imagination"
Cette exposition revêt donc un caractère exceptionnel. La place d’honneur au rez de chaussée de la galerie est réservée aux installations radicales et collages d’objets de Ben Patterson réunies sous le titre "No More Pink ?"
Le premier étage est dévolu à Mauro Ghiglione, qui avait été invité par Ben, et dont c’est la première apparition en France. Trop jeune pour se présenter comme partie prenante de Fluxus, il ne cache pas cependant une certaine filiation avec ce mouvement. Il est présenté par l’une des premières et ferventes avocate du mouvement, Caterina Gualco (galerie
Unimediamodern de Gènes). Elle a aimé chez cet artiste l’engagement, la clarté qui manque à beaucoup de jeunes créateurs qui pour elle "font surtout de la déco".
Mauro Ghiglione remet en question la notion d’œuvre d’art en relayant les questions souvent abordées par Umberto Eco ou le philosophe Antonio Gramsci selon lesquels "l’excès d’information tue l’information". Ce que l’artiste italien reprend comme en écho : "la profusion de l’image détruit l’image en même temps que l’imagination". La meilleure illustration qu’il puisse donner de ce point de vue est ce petit objet tableau intitulé sobrement "Remember", titre de son exposition, sur lequel il a imprimé une image sur un bloc de sel. Cette œuvre est appelée à se détruire progressivement, mais pas trop vite non plus, car elle a été acquise par Caterina Gualco qui espère bien la garder le plus longtemps possible. Sa réflexion sur la disparition de l’image est déclinée puissamment de diverses manières fort différentes. Certaines sont déchirées, et la trace de ce geste symbolique est conservée dans une boîte de plexiglass. Mauro n’a rien contre le paradoxe…
- Mauro Ghiglione, défendu par la galerie Unimediamodern de Gênes, invité chez Eva Vautier. (AC)