Jusqu’au 2 mars, le musée biotois nous ouvre à nouveau les carnets de Léger, divulguant un autre aspect du travail d’un artiste plus connu pour ses peintures du monde de la ville, de la mécanisation et du travail. Il s’agit là de simples portraits tracés à l’encre ou au crayon, qui avaient pour lui valeur d’œuvres à part entière.
La "spontanéité du vif"
Il nous reste une quantité d’esquisses de Maud Dale, la femme du banquier, réalisées à l’occasion de plusieurs séances de pose, pour répondre à une commande de son mari. Le portrait final de la dame, réalisé à la peinture, est rigoureusement fidèle, sans que le peintre ait eu à sacrifier sa propre objectivité. Dans cette série, on découvre un Fernand Léger qui suit les règles de la tradition académique, on touche du doigt cette absolue rigueur dans le travail.
Son aptitude à l’observation se révèle dans son quotidien. Son premier modèle, il l’a sous les yeux, c’est Nadia, la femme qui partage son existence. Il met à l’épreuve son coup de crayon ou trempe dans l’encre ses pinceaux. Ces portraits ont le naturel et la spontanéité du vif.
Son autoportrait est sans concession, comme les esquisses de jeunes ouvriers qui resserviront dans ses grandes compositions. Témoin des classes populaires au travail, Fernand léger se mue en chroniqueur de son temps. Il dessine de nombreuses fois les pieds et les mains des travailleurs, une partie de l’anatomie humaine qui assez difficile à
saisir. "Ces mains ressemblent à leurs outils et leurs outils à leurs mains" écrit-il.
Une nouvelle expo en juin
Quand l’artiste trace les portraits d’une jeune femme inconnue, c’est parce qu’il en est amoureux, et qu’avec ce geste il a l’impression de se rapprocher d’elle. Il revendique "des dessins précis au trait rien qu’au trait" qui vont à l’essentiel, et nous touchent par leur grâce.
Il y a aussi sur les cimaises du musée national ce portait saisissant du jeune mécanicien Henri Martin qui, de 1945 à 1950, mena une propagande intense contre la guerre et fut condamné à l’emprisonnement pour "atteinte à la morale et à l’agitation politique illégale". On découvre à cette occasion un
Fernand Léger engagé, aux côtés de Paul Éluard, Jean-Paul Sartre et Picasso, dans l’exécution d’une plaquette où apparait le visage
d’Henri Martin derrière des barreaux.
Comme un intemporel appel à la justice, qui traverse les époques.