Elle met à l’épreuve toute matière jusqu’à ce qu’elle prenne le dessus.
Ainsi, elle travaille la terre ou la céramique la plus adéquate en la lissant de façon à imiter le cuir. Le cuir dans toutes ses couleurs ou du moins toutes les couleurs que pourrait proposer un commerçant pour des sacs en peau et en cuir.
Olivia Barisano n’hésite pas à aller sur les chantiers abandonnés pour y ramasser des caillasses, des éclats de divers matériaux restés en rade. Elle juge que toutes ces pierres ont une mémoire qu’elle cherche à canaliser grâce à ses oeuvres.
Elle dit se passionner pour la mémoire. Mais quelle mémoire ? Celle où chacun accumule en vrac ses souvenirs ? Ou celle du passé de l’Histoire gardant la trace des civilisations antérieures, terreau fertile pour insuffler toute création ?
Ainsi, s’inspirant des récipients en tout genre, créés par les artistes des temps anciens - toutes ces poteries en forme de vases, d’écuelles, marmites ou autres, telles des pignattes (anciens pots de terre de Vallauris).
Reprenant l’idée du contenant, elle s’est donc interrogé sur celui le plus en vogue actuellement et, comme une évidence, elle s’est penché sur les sacs cabas que chacun porte avec soi, aussi bien pour voyager que pour faire ses emplettes les plus quotidiennes.
Pour cette « imitation », Olivia Barisano a cherché la matière – ou plutôt le matériau – qui lui permettait d’imiter au mieux le cuir
En pierre, elle en a fait des oeuvres brutes ou raffinées en donnant l’illusion d’un cuir bien lisse et de diverses formes, et travaillant les sacs empilés ou pas. L’illusion est parfaite.
Avec ce recyclage continuel en forme de produit de consommation, elle travaille aussi avec la vaisselle de porcelaine concassée, et n’hésite pas à aller fouiner dans les « marchés aux puces » pour découvrir des « merveilles » qu’elle va ainsi renouveler en oeuvres artistiques qui lui sont personnelles.
Actuellement, elle vit et travaille à Vallauris, nom qui signifie la « vallée d’or »
C’est, de longue date, une cité de potiers, même Picasso s’y produisit. Mais, c’est à Antibes, ville de sa naissance, qu’Olivia Barisano expose actuellement aux « Casemates de la création » jusqu’au 4 novembre.
Cette exposition « En face du temps » rend compte de l’extraordinaire vitalité de l’artiste ! Elle est une promenade au coeur de la matière qui s’effrite, s’érode, s’efface, se sculpte avec le temps, en dessinant des arabesques murales consignées dans un écrin qui se déploie en triptyque appelé « Wall ».
Il y a des sacs, bien sûr. En pierre, ils sont trompeurs et donnent l’illusion du cuir. Imitant des lingots d’or, des lingots de pierre de différentes couleurs, ...
Craignant les limites, elle ne s’arrête pas et va vers d’autres territoires chargés de passé, de souvenirs qui reviennent en se répétant dans une mémoire à l’infini. C’est très loin, dans la mémoire de l’humanité qu’elle va chercher les souvenirs qui construisent son oeuvre et son expression qui se qualifie grâce à son immense talent artistique.
Caroline Boudet-Lefort
