Si l’œuvre de Martine Doytier était tombée partiellement dans l’oubli, par la volonté de Marc Sanchez et de quelques amis, la rétrospective de son travail présentée à l’Artistique a permis de mettre au jour son œuvre exceptionnelle. Des peintures oubliées ont pu réapparaître après des recherches poussées, des appels dans la presse, la consultation de différentes archives pour tenter de les repérer… Enfin on a pu réunir et convaincre les collectionneurs de prêter leurs trésors, non sans difficulté, et d’offrir ses découvertes à un nombreux public.
Martine Doytier n’a peint que quelques années, de 1970 à 1984, mais cette rétrospective a montré les progrès fulgurants qu’elle a faits. De ses premières peintures « naïves » aux chefs-d’œuvre de ses derniers jours, on a pu admirer son parcours singulier.
Dans une mise en scène remarquable ont été exposées pendant près de six mois son automate impressionnant, personnage sans bouche entouré de ferrailles surmonté d’un petit bonhomme animé casseur de montres ainsi que deux peintures somptueuses : L’Hommage au Facteur Cheval et l’original de la plus belle affiche du Carnaval de Nice. On a pu voir aussi ses tableaux oniriques et fantastiques (Jérôme Bosh croisant Magritte et Dali) et l’immense et dernier chef-d’œuvre : « L’Autoportrait » non fini accompagnés de nombreux croquis et dessins préparatoires, qui ont suscité un grand intérêt.
Cette rétrospective a été l’occasion de la réalisation de trois films sur l’artiste, de rencontres, de podcasts, de la genèse d’une association et d’un site Internet.
Cette réapparition éblouissante d’un ensemble important des œuvres de Martine Doytier ne pouvait s’arrêter là.
Marc Sanchez aidé du dynamique galeriste Franck Michel qui admirait ce travail et pour qui exposer cette artiste était inespéré ont organisé cette exposition-vente, car comme l’a expliqué Marc, pour que son œuvre perdure, un artiste doit voir ses travaux circuler et être vendus.
Si dans cette exposition, nous pouvons revoir certaines des œuvres exposées à l’Artistique : la Bergère, le Jardin d’enfant, les Sept pêchés capitaux, le Passant et les grandes toiles de l’Exil, du Train de banlieue et de L’Usine (une toile exceptionnelle qui représente nombre de personnalités artistiques de l’époque)...
On a pu découvrir une peinture complètement inconnue et étonnante : Le Rêve.
Un collectionneur qui l’avait hérité de son père s’est fait connaître et a signalé qu’il avait cette grande peinture dont personne ne se souvenait. Peinte en 1971, ce tableau illustre la transition de la (courte) période naïve de l’artiste à celle du monde fantastique et fantasmagorique qu’elle a élaboré par la suite.
On y voit au premier plan, un homme endormi, ses lunettes carrées à la main, une bouteille posée sur la table sur laquelle il s’accoude, indiquant peut-être l’ivresse. De sa tête semble sortir une sorte de nuage, contenant son « rêve ». Un rêve aux multiples personnages, tous bizarres, extravagants et déconcertants : un enfant au pantalon à rayures qui lève les bras au premier plan, un homme avec des seins (ou une femme avec un pénis) qui danse avec une bonne sœur à cornette et à moustaches, une autre bonne sœur de dos, fesses nues, jouant avec un enfant. À sa droite, une ronde entourant une femme nue à genoux, un couple qui gravit des escaliers menant à une allée de cyprès à droite de laquelle on voit une balance avec un bébé allongé dans le plateau de droite. Au centre, une procession de couples montant en se rapetissant vers des nuages, un homme nu qui tombe au milieu des barres d’immeubles qui l’entourent, une ville à dômes au loin, un enfant qui fait du vélo sur le dos de nuages bleutés et d’un arc en ciel, et enfin, tout en haut, à droite, la cuve de toilette d’une prison avec deux champignons qui semblent s’en échapper…
Un ensemble qu’un psychanalyste chevronné aurait dû mal à démêler, une énigme à déchiffrer comme dans tous les tableaux de Martine.
Deux personnages sont néanmoins récurrents : les sœurs à cornettes, et surtout l’enfant (son fils Brice ?) trois fois présent. qu’on retrouve souvent dans d’autres tableaux.
Comme tous les rêves, il est complexe et étrange…
À chacun de l’interpréter. D’ailleurs on peut jouer à ce jeu avec tous les tableaux de Martine. Marc l’a tenté dans un joli petit livre qui rassemble et nous aide à pénétrer son monde. (réf ci-dessous)
Il ne vous reste qu’à plonger dans cet univers.
Atelier Franck MICHEL
Village Ségurane - 28 rue Catherine Ségurane -06300 Nice
+33 6 63 49 66 80
[email protected] - latelierfranckmichel.fr
– Marc Sanchez, « Les Histoires peintes de Martine Doytier« , éditions Fat Label
– Site (très complet) consacré à Martine : martinedoytier.com