RETOUR AU PAYS APRES UN AN EN CHINE
Ces oeuvres ont été présentées, durant un an, dans les principaux musées de cinq grandes villes chinoises, à l’initiative de la Fondation Volti.
Cette exposition itinérante, organisée dans le cadre des Manifestations du Cinquantenaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et la Chine, a été inaugurée à Pékin en juillet 2014 et vient de s’achever à Shanghai, après être passée, avec un succès remarquable, dans les villes de Tianjin, Chengdu et Wuhan.
A Villefranche-sur-Mer, l’exposition exceptionnelle sera présentée dans les espaces extérieurs de la Citadelle où se trouve déjà le remarquable Musée Volti.
Une scénographie nous permettra de découvrir et d’admirer, dans les courtines et sur les remparts, différentes oeuvres monumentales de cet artiste villefranchois de renommée mondiale dont l’inspiration s’est située à la jonction entre l’art classique méditerranéen et les expressions abstraites de l’art contemporain.
Le cadre privilégié du Château des Terrasses à Cap d’Ail accueillera une exposition-vente exceptionnelle composée de sculptures majeures de Volti, ainsi que de dessins, sanguines et tapisseries qui témoigneront de la diversité de la création de l’artiste.
Certaines oeuvres, en particulier les dessins de la période « Ecce homo », sont rarement présentées au public.
VOLTI - L’architecte des femmes
Au premier regard posé sur une sculpture de VOLTI, on est frappé par une impression de calme et de sérénité.
Amoureux de la femme, Volti sculpte indifféremment des corps féminins jeunes et élancés, opulents et sereins, lourds et maternels : c’est la femme « dans tous ses états », magnifiée par l’oeil et la main de l’artiste, quels que soient son âge et ses proportions.
Nous pourrions parler longuement du « Volti traditionnel » qui s’inscrit dans la lignée de Rodin, Maillol et Bourdelle ; comme eux il a le souci de la plénitude des formes, sacrifiant le détail au profit de l’harmonie de l’ensemble.
Nous pourrions parler aussi du « Volti moderne » qui accorde, comme Matisse et Picasso, une importance essentielle à la structure de l’oeuvre.
Nous pourrions évoquer également l’héritage incontestable de la statuaire méditerranéenne antique que l’on retrouve dans son goût pour les Vénus callipyges.
Nous pourrions enfin parler de la position unique de Volti dans le processus évolutif qui a conduit la sculpture de l’anthropomorphisme à une structure de rythme plus que de sujet.
Mais derrière VOLTI il y a VOLTIGERNO ANTONIUCCI, l’homme, le colosse rieur aux mains puissantes qui « croque » la vie et les femmes et qui pendant cinquante ans, faisant taire son mysticisme profond n’a d’autre but que de laisser par son oeuvre un témoignage d’ivresse de vivre et d’exaltation sensuelle.
Puis il y a une brisure, en 1985 ; le mal le prive de l’usage de son bras gauche.
L’artiste est mort à la sculpture… Plus jamais ses doigts nerveux ne modèleront la terre, plus jamais ses mains ne recréeront le volume et la vie.
Mais l’artiste ne crée pas qu’avec ses mains, il crée aussi et surtout avec sa tête… Et des mains il en reste une qui fonctionne encore et qu’il va rééduquer pendant de longs mois, pendant que dans sa tête il effectue un extraordinaire travail de réflexion et de retour sur lui-même.
Il est condamné à l’immobilité physique, mais son psychisme fonctionne à grande vitesse, effectuant une fascinante remise en question. Son mysticisme rejaillit des profondeurs où l’avait enfouit l’homme insouciant et comblé par la vie.
Sa souffrance d’homme diminué, d’homme brisé sécrète une puissance créatrice confondante, produisant ce qu’on appelle timidement les « nouveaux dessins » qui sont en fait des chefs-d’oeuvre graphique.
L’art de Volti, transcendé par la douleur et la souffrance, abandonne le vernis agréable de ces sanguines qui ont fait sa gloire, pour produire des dessins forts, puissants, torturés qui mettent à nu l’âme de l’artiste.
Ironie cruelle, le handicap qui l’empêche de sculpter agit comme un révélateur sur son génie créateur ; s’il avait recouvré l’usage de ses mains, on se prend à rêver aux volumes qu’il aurait pu créer…
Mais la mort l’a fauché le 14 décembre 1989.
Madeleine SERVERA-BOUTEFOY
Conservateur des Musées de la Citadelle