Pour cette nouvelle version du conte populaire allemand recueilli par les frères Grimm, Christian Roux s’est sacrément bien débrouillé avec son histoire de bique et de biquette pour flanquer une peur bleue à ses jeunes lecteurs... et rendre chèvre les grands.
Pour arriver à ses fins, il y a mis les moyens. Des mois à plancher sur la conception d’illustrations entièrement travaillées à la mine de plomb, à la main, qui sont, par la suite, scannées et transférées sur Photoshop au moment de poser les couleurs.
A première vue, son travail paraît simple alors qu’il est en fait très élaboré, très réfléchi. Pas d’esbroufe, ni de maniérisme chez cet artiste qui aime aller à l’essentiel pour mieux frapper les esprits et servir l’histoire. Dans ses dessins, on est séduit d’emblée par les effets de transparence, le flouté des contours, le grain et le choix des couleurs réduit au stricte nécessaire : un dégradé de vert, de rouge et un jaune timide. Sans oublier le noir, spectaculaire, qui personnifie son effrayant loup prêt à toutes les supercheries pour croquer les sept chevreaux. Le noir aussi des ombres et des ciseaux surdimensionnés fait frissonner.
De ces illustrations se dégagent une tension captivante, un mystère émouvant que l’on doit à la façon dont Christian Roux réussit à composer des images très graphiques, dans une grande économie des détails, et à l’esthétique cinématographique.
L’alternance de gros plans et plans larges, de travellings et de zooms, s’enchaînent pour faire basculer l’univers tranquille des petits herbivores et de leur maman chèvre super star dans le chaos le plus total jusqu’à la revanche bien calculée et le happy end !