"Alchimie", Daniela Zuñiga-Arancibia
Souvent confondue avec la kabbale, l’alchimie, dans la tradition hébraïque, a toujours été assimilée à une doctrine secrète. À ce titre, la symbolique omniprésente des gravures issues de la tradition judeo-chrétiennes relèvent de l’hermétisme et de l’ésotérisme. En déterminant les moyens de changer le plomb en or, l’alchimie est aussi, et peut être avant tout, l’art de purifier les passions du corps. Elle renvoie de ce point de vue à une quête spirituelle qu’il n’est guère possible de communiquer par des moyens conventionnels. Et quoi ! Faut-il que notre innocence perdue ne soit
rendue accessible qu’à une élite imprégnée de mystère et d’occultisme ? Daniela Zuñiga a voulu confronter ces deux dimensions que véhiculent indistinctement les mystères : d’un côté l’innocence, à travers des coloriages d’enfants, de l’autre l’ultra-symbolisme des représentations kabbalistiques inspirées de l’alchimie.
Le concept d’invocation étant inhérent à toute mythologie, il est difficile d’échapper à la
question de savoir ce qui pourra jaillir de ces dessins étranges en noirs et blancs une fois coloriés.
Comme il n’est pas certain que ce qui est illustré dans ces gravures échappent complètement à la conscience de l’enfant, un certain malaise pourra jaillir de cette indétermination. Et sans doute cela aura été le cas chez les parents d’enfants et responsables pédagogiques du centre où cette démarche a eu lieu.
Néanmoins l’alchimie fonctionne. Certes il arrive que les épées de feu se transforment en sabres lasers, que des maisons tombent du ciel et que de nombreux =) se glissent dans l’ordonnancement du dessin. Un doux chaos vient alors contraster avec l’ordre algébrique des figures ésotériques. Mais il arrive aussi que les choix de couleurs soient heureux, les contours bien définis et les rencontres inattendues. Une nouvelle mythologie, plus proche de nos yeux de spectateurs, se dégage alors de ces dessins.
Cette exposition, la performance qui la sous-tend, relève sans doute autant de l’expérimentation que de la démarche artistique.
On perçoit alors, dans le trait et l’aplat de l’enfant, une certaine reconnaissance à l’égard ce qui est représenté, quelquefois de la lassitude, mais toujours une innocence qui, tantôt épouse le support, tantôt l’isole ou l’efface complètement. Rien,
en définitive, qui désacralise ce support, et rien non plus qui puisse nuire au développement de l’enfant, et plus probablement au contraire. Cette innocence du geste, l’artiste a voulu la reproduire à son tour, et ainsi briser ses propres habitus. C’est pourquoi elle a endossé le trait et la couleur de X, que nous vous invitons à retrouver dans cette série.
Christophe Bruno 10 novembre 2014
Daniela Zuñiga-Arancibia est née à Valparaiso, au Chili, le 8 Juin 1979, Elle grandit dans un Chili encore en dictature jusqu’à l’age de 9 ans. Après avoir fini ses études en Ingenierie Mecanique et Énergie, elle déménage en France pour commencer ses études aux Beaux-Arts de Clermont- Ferrand, où elle obtient son DNSEP. Aujourd’hui, elle vit et travaille à Clermont-Ferrand