Ils sont une dizaine de danseurs, mais ils en paraissent mille dans leurs fuites, courses, retournements, chutes...
Tous sont jeunes, dynamiques, et commencent par une « mise en corps » - ou un genre d’apéritif ! - par une danse endiablée sur la musique du « French Cancan » qu’ils s’approprient pour en secouer les codes et en faire « autre chose ». Si les mouvements semblent désordonnés, ils sont cependant bien calés.
Tous cavalent avec une formidable rapidité et une énergie farouche, avec des arrêts soudain, inattendus, brutaux. ... Le tout recouvert par une nappe musicale très sonore, pour soutenir des éclats de meurtres, de morts... Cette musique tonitruante (signée également Hofesh Shechter) entraîne les danseurs dans des mouvements saccadés, violents les uns vis-à-vis des autres : la violence est en question.
Ces danseurs, tous jeunes et dynamiques, secouent les codes, les attentes et le reste !
Ils se soutiennent, s’affaissent, se frottent ou se détachent mollement, s’échappent ou se consolent. Tous semblent plongés dans un précipité électrisant avec des corps désarticulés, avant de s’écrouler au sol, après des enchaînements surprenants. Déconcertants même, mais pourquoi pas ?
Ce n’est pas uniquement leur technique impeccable qui relie les danseurs, mais, sans doute, y a-t-il aussi un sentiment commun entre eux pour un genre de cérémonie magique que serait cette danse sur la violence. Et, également, sur l’absurdité de la violence, puisque ce morceau s’intitule « Clowns ».
Des gestes, symbolisant des fusils, des poignards et autres armes, montrent que le temps est aussi en mouvement : la mort prend le pas sur la vie.
Au final, soudain un coup de feu, puis un silence total...
La chorégraphie suivante est douce, apaisée. Dans « The fix » les interprètent se soutiennent ou s’affaissent, se frottent ou se détachent mollement, s’échappent ou se consolent dans cette deuxième partie.
Les danseurs développent alors un style fluide, privilégiant l’harmonie. En parades souples, les groupes se forment et se déforment dans un continuum hypnotique de mouvements bienveillants. Des moments doux et tendres, après des moments de grande violence et de meurtres, tout s’achève dans une sage gentillesse ! Jusqu’à descendre dans la salle enlacer quelques spectateurs. Le public semble sidéré, mais accepte volontiers cette tendresse !
Caroline Boudet-Lefort