A la fin des années 90, on ne rigole pas en Afghanistan alors sous le joug des Taliban. Après la guerre et l’occupation russe, Kaboul est une ville en ruines et la mort rôde encore. Ici, une lapidation de femme, là des exécutions publiques. La société civile est sous haute surveillance et tout ce qui pourrait être culturel a été évincé en premier. Les Taliban veillent et considèrent que la joie et le rire sont suspects.
« Kaboul est devenue l’antichambre de l’au-delà. Une antichambre obscure où les repaires sont falsifiés... Les hirondelles effarouchées se dispersèrent dans les ballets de missiles. La guerre était là. Elle venait de se trouver une patrie... » écrit Yasmina Khadra qui a choisi les deux prénoms de sa femme comme nom d’écrivain.
Deux histoires parallèles vont se croiser.
Deux couples qui traînent leurs peines tout en rêvant de modernité. Le goût de vivre les a abandonné. Condamnées à une obscurité grillagée, les femmes sont tenues de porter le tchadri et les fillettes sont interdites d’école. On suit parfaitement le déroulement des événements racontés dans le roman où l’un des personnages va hurler au milieu des loups et, au cours d’une lapidation, il lancera lui-même une pierre meurtrière sur une femme adultère. Pourquoi l’a-t-il fait ? Il va s’interroger sur cet acte qu’il avait le choix de ne pas faire et qui, ensuite, le culpabilise, lui victime de ce fondamentalisme funeste.
Pour cette transposition de l’écrit à l’écran, le dessin est parfait (Eléa Gobé-Mévellec avait déjà participé au « Chat du Rabbin » de Joann Sfar et Delesvaux), mais il semble trop démonstratif pour dénoncer efficacement toutes les horreurs de cet obscurantisme. Chaque personnage est cependant porté par le jeu d’un acteur qui prête sa voix sans être au service d’une gestuelle ou de mimiques préétablies.
Dans la très riche distribution, citons : Simon Abkarian, Jean-Claude Deret (père de Zabou Breitman, mort en 2016, après les enregistrements), Zita Hanrot, Swann Arlaud, Hiam Abbass, Michel Jonasz, Pascal Elbé, Sébastien Pouderoux...
Victime d’attentats à répétition., Kaboul n’est aujourd’hui pas davantage paisible.
Caroline Boudet-Lefort