Sophia enseigne la philosophie à la faculté de Montréal. Mariée depuis dix ans avec Xavier (Francis –William Rhéaume), leur vie conjugale, devenue ronronnante, est remise en question par la rencontre avec ce séduisant menuisier, charpentier dans les Laurentides.
Sophia est venue dans leur maison de campagne au bord d’un lac, car il est question de quelques travaux à y faire. Dès l’arrivée de ce menuisier, c’est le coup de foudre : une attirance sexuelle réciproque est évidente. Ils tombent aussitôt fougueusement dans les bras l’un de l’autre avec une rapidité déconcertante : leurs corps parlent le même langage. L’alchimie fusionnelle entre eux est manifeste, et, pour elle, c’est une révélation sur l’amour, très loin de toutes les théories cérébrales qu’elle enseigne !
Les comédiens savent parfaitement montrer ce déclic de l’attirance, et leurs ébats sont intenses avec des plans très crus sans être impudiques.
Pourtant, à l’attirance sexuelle - même désir impératif -, s’opposera la raison.
L’histoire d’amour entre eux est sincère, mais contrariée par des barrières sociales et culturelles. Si celles-ci n’apparaissent pas de prime abord, elles vont peu à peu se manifester, dès que Sylvain sera mis en contact avec les amis et relations habituelles de Sophia. Elle sera mortifiée par le décalage intellectuel ...
De même, à l’occasion d’une rencontre avec les copains de Sylvain, Sophia sera ridiculisée comme étant une bourgeoise pleine de manières. Leurs valeurs ne sont pas les mêmes ». C’est plutôt « la chasse et la pêche » avec sa « blonde » habituelle, dit-il, selon l’expression québécoise qu’utilise Sylvain pour parler de sa « petite amie ». Cependant, ce n’est peut-être pas que la question de différence de leurs milieux. C’est aussi la question de l’attirance physique : aussi fougueuse et impérative soit-elle, peut-elle dominer un amour en profondeur, même si celui-ci ne semble plus apporter quoique ce soit de stimulant ? Et même si l’habitude ternit le quotidien ?
Mona Chokri pose en pointillés ces questions et filme la relation amoureuse comme rarement
Elle est experte aussi dans les scènes de groupe où chacun parle en même temps que d’autres. Le premier film de la réalisatrice québécoise, « La femme de mon frère », avait déjà été remarqué à Cannes en 2019, dans la même sélection - « Un Certain Regard »- que « Simple comme Sylvain » où ce film était présenté cette année.
Pour interpréter ce couple confronté à des barrières sociales et culturelles, la réalisatrice retrouve sa comédienne habituelle Magalie Lépine-Blondeau (excellente) et elle a également déjà tourné avec Pierre-Yves Cardinal. Une certaine intimité avec ses interprètes lui est nécessaire, dit-elle. Cela se ressent et lui permet davantage d’audace !
Caroline Boudet-Lefort