Aujourd’hui je vous présente le premier Film « Karaoké » de Mosche Rosenthal jeune réalisateur et scénariste. Il a fait son premier film à l’âge de 22 ans. Il est connu pour « Arei Neory » (2012), « Confess » (2016) et « Our Way Back » (2028). Il a d’ailleurs remporté un Israëli Academy Award pour le dernier film.
Ce long-métrage suit l’obsession d’un couple vivant dans un quartier chic de Tel Aviv, marié depuis 46 ans pour leur nouveau voisin charismatique qui va les amener à se révéler à eux-mêmes. Il se présente tout d’abord comme une comédie et vire petit à petit vers le côté dramatique.
Meir et Tova, couple à l’apparence tranquille, communiquent très peu l’un avec l’autre ; ils sont un peu dans leur monde, chacun ne sachant pas ce que l’autre ressent ou pense. Leurs enfants n’ont pas l’air de s’intéresser à eux. Chaque année ils font le même voyage sur l’ile de Rhodes en Grèce et n’ont jamais ressenti le besoin de découvrir d’autres univers.
Meir a du mal à exprimer tout ce qu’il ressent ; les mots sortent difficilement de sa bouche. Son regard est à la fois profond et triste. Il sourit peu. De gros plans de la caméra se concentrent sur son visage filmant au ralenti les différentes expressions au fur et à mesure des regrets et des sentiments vécus. Il admire sa femme mais en même temps il lui en veut de le rabaisser, de l’humilier et d’être égoïste.
Tova est une très belle femme vivant dans son monde et regrettant sa jeunesse passée. Le spectateur la ressent prisonnière de sa vie. Elle est passionnée mais elle se retient de tout son être. Elle souhaite créer de l’intérêt autour d’elle. Elle parle beaucoup, critique tout et n’écoute pas l’autre.
Un jour, un mystérieux voisin, Itzik, s’installe au dernier étage de leur immeuble et va petit à petit bousculer leur routine.
Le mystère sur ce personnage reste entier. Jusqu’au bout ; le spectateur n’a comme information que ce qu’il confie à son entourage mais il n’en n’a pas la certitude.
Meir et Tova sont attirés comme des aimants par Itzik ; ils éprouvent incessamment le besoin de reconnaissance exclusive à son contact. Ils ont l’impression d’être libres, compris, écoutés et acceptés. En fait, Itzik, flamboyant dans un premier temps se révèle petit à petit comme un sombre manipulateur des esprits.
La tension monte crescendo au sein du couple jusqu’à l’autodestruction ; des rancœurs et des jalousies se dévoilent ; la dénonciation met fin à cette psychose.
Le couple va-t-il résister ou se briser ? S’élever ou se laisser mourir ?
Malgré un dénouement décevant, le spectateur s’attend jusqu’au bout du film à un imprévu psychotique ou une violence entre les personnages.
La ville est très présente. Elle fait partie d’un personnage à part entière. Elle est surtout filmée de nuit, déserte, faiblement illuminée comme si le couple était seul au monde. Parfois, nous dirons même qu’elle fait partie du passé. La jeunesse d’aujourd’hui semble avoir disparu.
Les couleurs du long-métrage ont leurs propres intonations et significations : le jaune ’faiblard’ pour la tristesse et le regret, les couleurs vives pour la fête ou la renaissance. Ces métaphores visuelles sont développées pour souligner le mélodrame de l’histoire.
La musique est très présente dans le film sous toutes ses formes : le karaoké, la danse grecque traditionnelle... Elle est à la fois profonde et envoutante.
Evoque –t-elle la nostalgie des jours heureux ou au contraire une vie de regrets et de remords ?
Nous ne présentons plus les acteurs Lior Ashkénazi et Sasson Gabay ; le premier ayant reçu la notoriété internationale avec deux films dont « mariage Tardif » réalisé par Dover Kosashvili en 2001 face à Ronit Elkabetz aujourd’hui disparue (voir dans ce site l’hommage rendu à cette immense actrice) et « Tu marcheras sur l’eau » en 2004 d’Eytan Fox
Je vous propose de découvrir ou de revoir ces deux films.
« Mariage tardif » (vu à un Certain regard au Festival de Cannes en 2001) dénonce avec la même fermeté blessée, la survivance du mariage arrangé dans la société israélienne d’aujourd’hui. Ronit Elkabetz y joue Judith, une femme divorcée et désespérée, qui, malgré l’amour fou et « interdit » que lui porte son homme Zaza interprété par Lior Ashkénazi, est condamnée à la solitude. En effet, la tradition l’emportera sur l’amour.
« Tu marcheras sur l’eau » brosse le portrait d’un agent du mossad qui ne vit que pour les missions demandées, délaissant sa femme, qui se suicide. Il va peu à peu se découvrir et se reconstruire grâce à deux jeunes allemands qui vont l’aider dans sa dernière mission : dénoncer un criminel de guerre nazi qui se révèle être leur grand-père ; toute une crise d’identité est évoquée dans ce film tout comme la culpabilité des allemands vis-à-vis des crimes contre l’humanité commis par leurs ancêtres.
Le second, Sasson Gabay est reconnu pour ses rôles dans « la visite de la fanfare » (2007) d’Eran Kolirin et « Le Cochon de Gaza »(2011) de Sylvain Estibal, ainsi que dans la série télévisée « Shtisel » (2013).
A voir également.
Le programme du NIFF 2024 est à retrouver par ici.