Dommage collatéral.
A la manière d’un Michel Houellebecq dont la personnalité controversée vient souvent éclabousser une oeuvre brillante, Lars Von Trier, talentueux cinéaste danois découvert à Cannes en 1984 avec "The Element of Crime " (Grand prix de la Commission Supérieure Technique), régulièrement récompensé depuis jusqu’à l’obtention de la Palme d’Or en 2000 avec "Dancer in the dark" a malheureusement bâti sa réputation à la fois sur une maîtrise cinématographique incontestable et sur un indécrottable sens de la provocation.
C’est ainsi qu’après avoir réalisé avec "Melancholia" présenté en compétition à Cannes en 2011, une de ses oeuvres les plus lisibles, visionnaires et abouties, et qui avait de très sérieuses chances de remporter la Palme d’Or, Mr VON TRIER, en conférence de presse, s’est une nouvelle fois laissé aller à ses nauséabondes divagations paranoïaques, cette fois-ci sur Hitler et les Juifs.
Trop c’est trop et ses délires d’adolescent boutonneux lui ont valu cette fois-ci l’exclusion immédiate et justifiée du Festival de Cannes.
Cet épisode douloureux et pathétique a corollairement éclipsé le film présenté alors que librement inspiré du livre de Jean Genet "les bonnes" il mettait en scène pas moins que la fin du Monde sous couvert de rivalité entre deux femmes, Justine et Claire, brillamment interprétées par Charlotte Gainsbourg et Kirsten Dunst (qui a malgré tout remporté le Prix d’interprétation féminine pour son rôle).
Ce film construit sur l’opposition entre deux sœurs, entre les hommes et les femmes, le Bien et le Mal, le trivial et le sacré, la joie et la mélancolie, les petites choses de la vie et la fin du Monde, est assurément l’œuvre la plus romantique de Lars Von Trier.
A ce titre, elle est débarrassée des habituelles scories provocatrices de ses films précédents (notamment "l’Antéchrist") et restera contre vents et marées, un grand film, hélas victime collatérale des déclarations outrancières de son réalisateur.
La provocation n’était pas cette fois-ci dans le film mais bien dans les propos de l’auteur que l’on dit gravement malade et dont on ne sait si les maladroites déclarations cannoises, à défaut de refléter la pensée réelle de "l’Artiste", ne constituaient pas finalement qu’une nouvelle posture.
Malheureusement, Lars Von Trier a désormais atteint un point de non retour dans la provocation (même s’il annonce vouloir réaliser pour son prochain film un vrai film porno hardcore !), ce qui devrait durablement l’écarter des honneurs de ce monde jusqu’à une fin prochaine.
En toute hypothèse, que cela ne vous empêche pas d’aller voir ou revoir "Melancholia"... en attendant la fin de l’Univers.