Dites-moi quelque chose de Philippe Lafosse
– Le jeudi 14 octobre à 19h
– (vidéo dv, 94 minutes 14 secondes, 2007-2010)
Novembre 2007 – mars 2008 à Paris, au Reflet Médicis. Lors de la rétrospective Straub-Huillet qu’il organise,
Philippe Lafosse fait enregistrer les rencontres entre Jean-Marie Straub et le public. Ce film est en quelque
sorte la suite du recueil des débats issus de la rétrospective de Jean-Marie Straub et Danielle Huillet, au cinéma
Jean Vigo de Nice (2004).
Europa 2005 – 27 octobre de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub
– Le vendredi 15 octobre à 19h
– (vidéo dv, 10 min, 2006)
Joachim Gatti de Jean-Marie Straub
– (vidéo HD, 1 min, 30 s, 2009)
Corneille/Brecht ou Rome l’unique objet de mon ressentiment de Jean-Marie Straub
– (vidéo dv, 26 min, 17 s, 2009)
O somma luce (Dante) de Jean-Marie Straub
– (vidéo HD, 16 min, 24 s, 2009)
Ecoutons, regardons…
Incontestablement, Joachim Gatti, ciné-tract de
Jean-Marie Straub tourné en 2009 résonne avec
Europa 2005, autre ciné-tract et dernier film tourné
avec Danièle Huillet, décédée en octobre 2006. Aux
meurtres et aux injustices, conséquences d’un
pouvoir de plus en plus policier et dangereux,
résister par les plans et le son, donner à étudier et
à entendre pour combattre le fatras et les impostures
médiatiques.
Souvenons-nous aussi…
Après Othon de Corneille en 1969, après le Brecht de
Introduction à la “Musique d’accompagnement pour
une scène de film” de Arnold Schoenberg et de
Leçons d’histoire en 1972 et celui d’Antigone en
1991, voici Corneille/Brecht ou Rome l’unique objet
de mon ressentiment, autrement dit Corneille,
Brecht et Rome à nouveau, et les bruits et la vie de
la ville comme un appui, une irrigation – de l’air
entre les idées ? Aux intrigues des puissants qui
éveillent la peur et dont les affaires de ce monde
sans ordre se nourrissent de l’oppression et du sang
des subalternes, opposer la colère, le raisonnement
clair et la volonté solide de ceux et celles qui
finalement ne se résignent pas et savent ce que sera
demain.
Après le “O lumière céleste” du Hölderlin de La Mort
d’Empédocle en 1986 et le Cézanne en prise avec le
feu de la Montagne Sainte-Victoire en 1989, voici le
“O suprême lumière” de La Divine Comédie de Dante,
orphelin de Béatrice. A la mort et au désespoir, à la
perte et aux exclusions, répondent la plénitude et
“l’amour qui meut le soleil et les autres étoiles”.
Loin de la vraisemblance, du côté de l’étrange qui
dévoile et enrichit, des sources et ressources de la
subtilité liquide et rocailleuse des voix et des corps,
de 1962 à 2009 et à demain, de Böll à Pavese, en
passant par Duras, Barrès et quelques autres,
Jean-Marie Straub, toujours avec Danièle Huillet,
salue les humiliés d’hier et d’aujourd’hui, les
rendus muets et les oubliés, qu’ils soient
hommes et femmes des faubourgs et des cités,
enfants, paysans ou ouvriers. A ceux et celles
qui, esclaves et engloutis, sont toujours
poursuivis, bannis, étrangers, il offre le cadre, le
temps et l’espace, dont l’enfer sur terre les a
dépossédés. Jean-Marie Straub, inconsolable de
tout, persiste et signe. Et, du tribunal des
ombres que pourrait être le cinéma, en appelle
aux vivants.
Nous ne serons sauvés que par l’étrange et les
étrangers.
– Philippe Lafosse