« Decision to leave » se complait dans cette histoire d’attirance amoureuse de ce flic expérimenté à l’égard d’une femme fascinante, malgré la suspicion de crime dont elle se trouve affublée pour en faire une potentielle coupable idéale. Et ce qui permet au flic des interrogatoires à répétitions où son trouble vis-à-vis d’elle ne fait qu’augmenter.
A la suite de la mort accidentelle d’un fana d’alpinisme, dont le corps a été retrouvé écrabouillé en bas d’une falaise, sa femme est interrogée. Elle devient aussitôt suspecte d’autant plus que cette épouse chinoise ne manifeste aucun chagrin en apprenant la mort de son mari suite à sa chute.
Avec la multiplication d’interrogatoires, une complicité incongrue s’installe entre enquêteur et suspecte. Il la suit, la surveille. Est-elle sincère ? Le trouble très ambigu qu’il ressent à son égard le manipule au point de passer des nuits à suivre tous les mouvements qu’elle fait, comme si cela pouvait l’aider à résoudre son enquête. Elle le devine, le sait, en joue. Ce quotidien partagé engendre des liens et du désir. Il suggère combien les identités sont volatiles et les sentiments réversibles dans une rationalité précaire, friable, prête à exploser à tout moment.
Pour cet ambitieux thriller, le choix des interprètes est parfaitement réussi afin d’exprimer l’ambiguïté de leur relation, que ce soit la comédienne Tang Wei (venue de chez Ang Lee), idéale dans sa séduction retenue, ou l’acteur Park Hae-il, en enquêteur expérimenté, mais troublé par son désir et donc chancelant.
Après six ans de silence, Park Chan-wook revient à la réalisation avec ce film
D’une beauté esthétique remarquable, « Decision to leave » laisse cependant le spectateur un peu indifférent et même lassé à la longue par ses scènes répétitives (le film dure 2 h 18 !) sans qu’il ne ressente aucune émotion pour un drame vénéneux à souhait où elle aurait trouvé une place totalement justifiée.
Il est pourtant incontestable que ce thriller romantique du maître coréen est d’une virtuosité et d’une invention formelle permanentes.
Avec ce Prix de la mise en scène, Park Chan-wook, grand habitué du Festival, accumule ainsi tous les prix, après avoir obtenu, en 2009, le Prix du Jury pour « Thirst, ceci est mon sang » et, en 2004, le Grand prix pour « Old Boy ».
Caroline Boudet-Lefort