Au cours de cette soirée, l’harmonie de la chorégraphie inaugurale va se transformer en un chaos morbide qui devient un cauchemar.
Au bout d’une heure tout se déglingue. Qu’y avait-il dans cette bonne sangria ? Quelqu’un aurait-il mis « quelque chose » dedans ?
La fête dégénère, passant de l’harmonie collective à la destruction individuelle.
Les corps ne parlent plus la même langue, tandis que la troupe se disloque inexorablement donnant une sensation de fin du monde.
Une étrange folie s’empare de chacun des danseurs.
Une femme pisse debout sur la piste, une autre enferme son jeune gamin dans un local électrique, provoquant un court-circuit général. Une fille enceinte se taillade le visage, les bras, le ventre, un autre prend feu... La violence surgit : on prend un couteau, on brûle, on s’agresse... Le sang, le sexe, le feu, le vomi, les larmes, la peur, les hurlements, les pires pulsions... Lynchage, lâchage, overdoses... Il est question de sexe, de drogue, de cocaïne, de LSD... La danse, d’abord furieusement entraînante dans les scènes de « voguing », s’exacerbe peu à peu dans des dérapages incontrôlés et dans une spontanéité qui entraîne les danseurs à des états de totale possession.
La caméra fulgurante, déchaînée, énergique, délire totalement, filmant dans tous les sens.
Et la danse, toujours et encore.... Gaspar Noé brouille les pistes, épuise le spectateur par les comportements extrêmes des danseurs. Parmi ceux-là se détache Sofia Boutella, véritable amazone parmi les « street dancers ». Tourbillonnante avec sa souplesse et ses longues jambes, elle apporte un indéniable mouvement supplémentaire au film.
Sélectionnée pour correspondre à l’époque où se situe le film, la musique est électro, disco et new-wave des années 80-90. Une musique à fond les manettes, une musique électrisante qui cogne les tempes, une musique souvent angoissante qui entraîne un état émotionnel.
On pense au cinéma de Zulawski, à celui de Pasolini, ou encore Fassbinder ou Bunuel, des cinéastes qui n’hésitaient pas à dépasser les bornes.
Sans scénario, sans dialogues, sans stars, le film a été tourné en accéléré, dans l’urgence en plan séquences et monté aussi vite, afin d’être prêt, en catastrophe, pour sa présentation à la Quinzaine des Réalisateurs du dernier Festival de Cannes où il était attendu avec excitation par les aficionados de Gaspar Noé. Le titre a été choisi pour être international et commercial et le générique défile au milieu du film, permettant à « Climax » de rejoindre la liste des films qui se divisent en deux.
Gaspar Noé aime que le chaos surgisse dans ses films et qu’il crée un malaise (Irréversible, Seul contre tous, Enter the Void...). Ici comme ailleurs, ça fait quand même du bien quand ça s’arrête !
Caroline Boudet-Lefort