Avec son air d’ado naïve, Natacha passe allègrement les postes de contrôles, sans fouille de son coffre de voiture ...
C’est donc un film très ancré dans la réalité qu’a réalisé Thierry Binisti
À la fois sur les problèmes du quotidien, quand on n’arrive pas à joindre les deux bouts et sur l’immense question des clandestins cherchant à rejoindre la Grande-Bretagne. Chacun d’eux a une histoire singulière, ce qui nous permet de voir les multiples situations où se trouvent ces migrants accumulés misérablement dans des camps de fortune où ils sont parqués.
Il n’y a guère plus de 40 kms entre Calais et Douvres. Pourtant, combien sont-ils à avoir tenté de franchir cette distance par tous les moyens ! Jusqu’à en perdre fréquemment la vie !
Après « L’outremangeur », en 2002, avec Eric Cantona et « Une bouteille à la mer » d’après un roman de Valérie Zenatti, Thierry Binisti a été confronté à de multiples difficultés pour son 3ème long-métrage. Il lui a été impossible de tourner à Calais un film sur les migrants : la ville est confrontée à trop de demandes, aussi le refus est-il devenu systématique.
Le réalisateur a donc choisi d’aller à Dunkerque et à Boulogne-sur-mer pour y trouver des paysages assez similaires et un point de passage désaffecté - avec le désir de rester toujours dans le réel - pour les trajets qu’effectue Natacha.
Le choix d’acteurs peu connus rend le scénario d’autant plus crédible et permet à chaque spectateur de s’attacher aux personnages : l’authenticité est présente.
Comment ne pas garder un inoubliable souvenir d’Alice Isaaz dans « Mademoiselle de Jonquières » pour son rôle de jeune fille restée pure malgré les souillures subies ? Ici, pour la première fois dans un premier rôle, elle montre une énergie à toute épreuve avec un personnage pourtant totalement différent. De même qu’est également très émouvant Adam Bessa : né à Grasse, cet acteur franco-tunisien est de plus en plus souvent à l’affiche.
Pour la figuration, ne pouvant tourner dans la « jungle de Calais », Thierry Binisti a dû faire appel à des associations de bénévoles qui accueillent souvent des immigrés parmi elles, au maximum de leurs possibilités.
Ainsi ce film, très attachant, est marqué d’une authenticité vraiment appréciable !
Caroline Boudet-Lefort