Le film commence lors du 40ème anniversaire, de l’Impératrice, moment où elle manifeste sa souffrance ainsi que son rejet des conventions de la Cour et de la discipline qui s’ensuit pour son rang.
L’excellente Vicky Krieps fait parfaitement ressentir ce tourment (Prix d’interprétation féminine de la sélection Un Certain Regard au Festival de Cannes).
Loin du visage juvénile d’une Romy Schneider capricieuse dans ce même personnage, Vicky Krieps se montre angoissée, tourmentée, et exprime à sa manière sa révolte face aux attentes d’un régime rigoureux quant aux principes. Parfois, on pourrait prendre cette impératrice pour « cinglée », alors que simplement elle suffoque de voir que son désir d’humanité soit sans cesse bridé et opprimé, et toujours mal compris.
« Sois belle et tais-toi ! »
Et pour rester belle, elle doit conserver une taille fine à force de régimes rigoureux et de corsets étouffants, serrés jusqu’à l’évanouissement. Son poids et son tour de taille sont ainsi mesurés chaque jour. On lui dit qu’à 40 ans, le teint d’une femme se fane, elle n’a donc plus l’éclat nécessaire à son rôle au sein de la Cour.
Son unique distraction est de librement galoper à cheval. Avide d’une vie plus exaltante, cette Impératrice devient capricieuse, irascible, péremptoire, sans ménager son entourage de réflexions acerbes. Ce qu’elle regrette au-delà de sa rage. Cependant, ses désirs sont sans cesse bridés, contrariés, et son désespoir refoulé s’exprime de façon détournée. Alors, parfois elle semble frôler la folie ce qui entraîne des actes désespérés qui parfois lui coûtent cher. Ses désirs sont sans cesse bridés. Avec son titre et de sa place, elle pourrait aujourd’hui influencer pour de multiples réformes et changements dans son pays et dans cette société qui la brime totalement.
Elle fume, ce qui est incongru pour une femme à l’époque, sa fille ne se prive pas de lui dire. Quant à son exaltation, reprochée par son mari, elle semble sans limites, manifestant des exigences ressenties comme des caprices et une marginalité par rapports aux codes de la Cour. Alors qu’en fait, ce n’est que l’expression de la souffrance ancrée profondément en elle.
Elle ne parvient plus à subir les mondanités imposées par le Protocole, ainsi, lors d’une réception en son honneur, elle ose mettre à sa place sa dame de compagnie dissimulée derrière une épaisse voilette.
Malgré les dorures du Palais, il n’y a pas d’académisme dans ce film tourné par une réalisatrice autrichienne, Marie Kreutzer, également auteur du scénario.
Elle a pris de multiples libertés, particulièrement pour la mort de l’Impératrice, qu’elle montre volontaire, alors que dans nos connaissances historiques c’était un assassinat commis par un anarchiste italien (vérifié dans le Larousse).
Ainsi Marie Kreutzer ose des fantaisies et des anachronismes pour faire de Sissi une féministe avant l’heure, voulant que son désir de femme soit pris en compte et qu’elle ait le droit d’exister par elle-même.
Caroline Boudet-Lefort