Poésie visuelle
Pour la première fois, le graphiste Jean Widmer se voit attribuer une grande exposition personnelle. Ses créations ne sont pourtant pas inconnues puisque le Centre Georges Pompidou, le musée d’Orsay, l’Institut du Monde Arabe, la galerie Nationale du Jeu de Paume, la BNF ou le théâtre de la Colline en ont déjà présentées. Arrivé de Suisse en France dans les années 50, il a bousculé et révolutionné l’image publicitaire par l’humour, la sensibilité, et par un traitement typographique proche de la poésie visuelle, ce qui a fait de lui une figure emblématique du graphisme.
Avec toutes ces qualités mises en évidence sur les cimaises, la visite, au-delà de son intérêt didactique, tient du parcours ludique. Hautement conseillée aux enfants comme aux adultes ! Lors de cette exploration, on concevra les différentes étapes du travail de l’artiste à partir des simples dessins au feutre, réunis sous les vitrines, jusqu’aux programmes
visuels définitifs, empreints de simplicité, par la grâce de formes et de couleurs d’une forte densité qui s’impriment immédiatement et sans chichis sur la rétine et jusque dans la mémoire. L’ensemble forme un tout cohérent et immédiatement identifiable pour le public.
On verra également à Mouans-Sartoux des œuvres plus personnelles, des sculptures, extraites de son atelier et encore jamais montrées. Elles illustrent le lien ininterrompu avec l’esthétique de l’art concret Zurichois et du Bauhaus.
"Hiéroglyphes" autoroutiers
Les pictogrammes de Jean Widmer ont émaillé les paysages autoroutiers : le castor de la vallée de Bièvre, le pavillon Baltard, la travée bordée de platanes du Cours Mirabeau. Ou encore le V de la Fondation Vasarely à Aix-en-Provence, le poisson toqué de la gastronomie marseillaise, la barque chargée de chèvres du Marais poitevin.
Il ne reste plus aujourd’hui que quelques vestiges de la signalisation d’animation touristique et culturelle sur les autoroutes en France. Ces "hiéroglyphes" dressant un inventaire précis, évocateur et plein d’humour du patrimoine français, ont été progressivement remplacés par les (tristes) panneaux sépia que l’on connaît.
La dernière salle de l’EAC est consacrée aux pictogrammes de Widmer. On s’amusera à reconnaître les différentes régions à travers ces dessins et ces épreuves d’artistes, tout en réalisant que cet important travail de simplification constitue la base de l’art pur.