Bel évènement la semaine dernière à Cannes, la résidence Tiers-Temps s’est vu rebaptisée et a accueilli de nouveaux résidents, pas tout à fait comme les autres… Quatre artistes, venus s’exposer sur les murs de la (désormais) Villa Seren. « Supplément d’art, Supplément d’âme », un vernissage touchant auquel la centaine de personnes âgées à résidence, personnel soignant et direction ont assisté, loin des paillettes cannoises mais bel et bien sous les pins, sur les hauteurs de la ville. Un moment suspendu entre calme et culture où l’humain prend tout son sens.
Domus Vi accueille 14 000 personnes âgées fragiles en France, l’équipe fait preuve d’un esprit novateur et ouvert sur le monde, ainsi l’art contemporain et l’abstrait ont été introduits dans ces résidences retraite médicalisées. La Villa Seren est la première a participé à cette dynamique. Les œuvres ont été choisies par un jury de résident, personnel de l’établissement, familles et associations locales. Ce vernissage pourrait bien donner lieu à des conférences sur l’art contemporain, mais aussi des partenariats avec les lycées, des écoles de dessin, des ateliers.
Si l’art a un impact thérapeutique évident, il laisse aussi entrer de la couleur, de la vie et permet de rêvasser, d’imaginer, se projeter : « C’est beau ! », « Des artistes de Paris dans nos couloirs ! », « Quelle audace ! », « Toutes ces couleurs, on se croirait à la maison ! », « Ça nous change les idées, et c’est moins bruyant que la télévision, la voisine de chambre ne peut rien dire ! » s’amusent les résidents. Certains passent devant sans sourciller car les tableaux font déjà partie de leur promenades quotidiennes, d’autres s’émerveillent encore devant la grandeur de certains cadres et la puissance des œuvres.
Tantôt le tourbillon rouge et or venu de l’orient de Julie Botton, tantôt une tempête de bleu nous emportant dans les abîmes de la Méditerranée au côté de Fanny Ferry-Bailly, ou encore quelques pièces de l’œuvre géante de Marc Ash et puis l’air goguenard du pingouin en résine rougeoyant de Pascal Masi pour nous accueillir en ces lieux rénovés.
Ces œuvres solliciteront l’affectif, l’imaginaire et la mémoire des personnes dépendantes. Une dimension à laquelle les quatre artistes sélectionnés par la galerie Art Way (spécialiste de l’art en entreprise) sont ravis de participer.
Julie Botton, artiste peintre travaillant essentiellement l’abstraction lyrique (inspirée par Debré, Soulages, Zao Wou-Ki), travaillant également la matière, la lumière, en modelant les couleurs à leur origine, sans trop faire de mélange, des couleurs à l’état pur. L’or est présent depuis le départ dans son œuvre, par des feuilles, des pigments, de la poudre… Des œuvres qui ne se limitent pas au format du châssis mais qui amènent à quelque chose de plus universel et à l’évasion de par leurs tailles. Julie Botton est coloriste dans l’âme, elle utilise très peu de formes, mais de la matière, laissant agir les fusions, les oxydations, comme sur ces deux toiles japonisantes. www.juliebotton.com
Marc Ash, peintre présent dans une quinzaine de galeries à travers le monde. Depuis ses deux ateliers (Paris et Miami), Marc Ash crée des œuvres, des minis toiles, des cubes qui existe seul pour s’assembler à de plus grandes formations et exister en groupe. Un artiste « au service » de ses clients, car chacun compose sa toile, une composition unique qui donne vie à de nouveaux mariages de couleurs, de matières, d’élégances. Un matiériste qui transforme sa matière première, la poudre de marbre en la mélangeant aux pigments et en appliquant plusieurs couches pour finaliser un aspect de collage. www.marc-ash.com
Fanny Ferry-Bailly, artiste peintre (émue de se retrouver dans ce lieu atypique, « un très beau cadeau qu’ils nous font plus que nous ne pouvons leur faire »). Sur cette toile « Lame de fond », elle s’amuse à pervertir les codes plastiques de la peinture, en peignant une tourmente, une violence, mais bleue. Une toile réalisée à l’aide d’acrylique, d’huile, de collage de papier de soie au moment du tsunami, sans en avoir vraiment conscience. Sa peinture abstraite parle de l’humanité, des émotions, de l’évasion… www.fyby71.com
Pascal Masi, sculpteur et papa du pingouin en résine rouge d’1m12. Pascal utilise une résine type polymère comme pour les bateaux associée aux peintures des carrosseries de voiture, pour des sculptures qui résisteront au temps, aux intempéries, que ce soit la pluie comme les brûlures du soleil. Intrigué par les animaux de la banquise, l’artiste affectionne manchots et autres ours polaires. La vivacité du rouge contraste avec la légèreté du sujet un peu anthropomorphe, qui rappelle le côté serein de certaines personnes. Un pingouin debout, à forme humaine, un animal apprivoisable… Peut-être pas à l’image de son créateur ! www.pascal-masi.com