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Verna : ni affreux, ni sale, ni méchant !

Jean-Luc Verna, né à Nice, étudiant de la villa Arson, devenu professeur de dessin dans cette même école, parti de cet établissement "très en colère", y est revenu le temps de donner une conférence devant ses anciens collègues, amis et étudiants. Il s’est livré à un long soliloque élégant, railleur, incisif et plein de drôlerie. Le retour d’un enfant de Nice dans toute sa notoriété est un événement. Artiste polymorphe, reconnu davantage au niveau national et à l’étranger que dans sa propre région, il est désormais apaisé. Il expose à la Galerie Espace à Vendre, rue Assalit, sous le titre "Vous n’êtes pas un peu beaucoup maquillé ? -Non".

Foule bigarrée

Il tient un discours sans fard dans lequel il se décrit, présente sa famille "mère moqueuse et beau père homophobe" glissant de sujets autour de l’art, de la société, de la mort et de son statut d’artiste homo. Il clarifie les choses : "je ne suis pas fier d’être homosexuel, je déteste les gens fiers, la fierté déclenche les guerres. Je ne suis pas un artiste gay, je suis violemment féministe de la première heure".
Jean-Luc Verna, cent pour cent gothique, sculptural, entièrement dessiné, recouvert de tatouages, piercings, un éventail noir ébène en main. Son côté glamour passe inaperçu à
Liverpool où la foule est comme lui souvent "bigarrée", mais "à Nice c’est une autre histoire" dit-il en levant au plafond des yeux très maquillés. Les réactions à son endroit ont pu ici être très violentes : "j’étais déjà collectionné au MOMA mais méprisé à Nice". Il dressera de lui un portrait plein de bémols : "j’étais un peintre exécrable, j’étais pauvre et dans la m..., j’ai choisi le dessin parce qu’un atelier de dessin tient dans une valise". Ajoutant : "je dessine super bien, comme plusieurs millards de gens sur terre", mais pas dans le but de plaire "sinon je me tire une balle".

Le dessin d’abord

Il commence donc par dessiner des oiseaux parce que le genre était considéré comme ringard. Il résiste à ce qui est en vogue : "ce qui me plait, c’est de faire des choses douces avec quelque chose d’atroce, et de provoquer un petit frisson esthétique. L’art doit diffuser des choses contradictoires. J’aime les choses vulgaire et je déteste la grossièreté. La vulgarité est la vacance de l’intelligence".
Devançant les critiques : "si l’on se donne la peine de réfléchir devant mes dessins, on s’aperçoit que je parle de la société dans une vision très désespérée, car l’humanité est désespérante", mais il déteste l’art sociologique quand il se résume à des slogans.
Après son départ de Nice, Jean-Luc Verna a fait une carrière tous azimuts : "un petit parcours très honnête" concède-t-il. Il chante Barbara et Leo Ferré au cabaret, puis devient chorégraphe : "pas un grand, mais je suis chorégraphe quand même". Interprète fétiche du réalisateur Brice Dellsperger, il joue tous les rôles aussi bien féminins que masculins dans les remakes de séquences de films cultes complètement branques, comme Eyes Wide Shut de
Stanley Kubrick, (un film "de vieux pour vieux" qu’il déteste) dans lequel il incarne à la fois Tom Cruise et Nicole Kidman.

C’est cela Jean-Luc Verna, un artiste qui brouille les frontières dans un mélange de haute culture et de culture populaire

Visuel de Une (détail) Jean-Luc Verna, artiste polymorphe, vu au travers de l’objectif de Guy Géant. ©Guy Géant

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