Elle concluait la conversation mais surtout rappelait, très justement, que Gasiorowski « avait une oeuvre à accomplir et qu’il l’accomplissait ». Les spéculations, les analyses, les comparaisons devenaient inutiles pour un
destin d’artiste comme le sien. La phrase « Muss es sein ?, es muss sein ! »,
attribuée à Beethoven et écrite, par Gasiorowski, sur un autoportrait de
l’Atelier de Taïra l’indiquait déjà : « cela doit-il être ? cela doit être ! ».
L’oeuvre de Gasiorowski a été montrée de son vivant, notamment, dans
les galeries Laplace 3, Thelen, Eric Fabre, Adrien Maeght, au FRAC-Pays
de la Loire et au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris, puis, après sa
mort, au C.C.C. de Tours, au Château de Jau, à la Kunstalle de Berlin, au
Musée National d’Art Moderne de Villeneuve d’Ascq, au Centre
Pompidou, au Carré d’Art de Nîmes. Chaque exposition a permis une
lecture de son oeuvre.
Celle que la Fondation propose sera tout particulièrement consacrée à
sa peinture, ses dessins, ses tableaux. Elle présentera des travaux
inconnus ou montrés trop rarement. Adrien Maeght, qui fut le grand
collectionneur des dix dernières années de la vie de Gérard Gasiorowski
et qui en est l’exécuteur testamentaire, a réuni, au fil des ans, un grand
nombre de ses oeuvres.
Gasiorowski a souvent été comparé à Gerhard Richter, à Malcolm
Morley, mais plus encore il nous faut penser à Martin Kippenberger et à
la place essentielle que l’un et l’autre donnèrent à leur pratique
picturale. C’est cette pratique que nous chercherons tout
particulièrement à éclairer. Avec ces oeuvres, nous mettrons en scène
les rapports qu’il entretenait avec Chardin, Cézanne, Bonnard, Vuillard,
Braque, Picasso, Giacometti ou encore les peintures de Lascaux, du
Japon, et plus généralement, avec l’histoire de la peinture.
Alors qu’un grand nombre d’artistes des générations qui l’ont suivi
évoquent et citent sa création, il ne faut plus laisser s’écouler trop de
temps entre chacune de ses expositions, en montrant des pans entiers
de son travail encore méconnus. C’est pourquoi la Fondation Maeght,
où il se sentait chez lui, pour laquelle il avait fait des oeuvres spécifiques
qui n’ont pas encore été exposées, a décidé de mettre en lumière ses
travaux.
L’exposition de la Fondation rendra hommage à ce grand artiste du XXe
siècle, à l’homme et à son immense talent. Gérard Gasiorowski, disparu
en 1986 était, à la fois, un être déchiré, animé par le tourment de vivre
et un observateur, très cultivé, critique raffiné, qui rappelait sans cesse, à
sa manière passionnée et ironique, que l’art était une affaire essentielle
« qui ne se faisait pas en habit de gala ».
La Fondation Maeght, en choisissant de consacrer cette exposition à
Gérard Gasiorowski, entend contribuer à sa consécration internationale
et à la reconnaissance par le plus grand nombre de ce « vrai peintre,
grand peintre, doté d’un humour redoutable, intelligent et subtil »,
comme l’écrit Adrien Maeght. Ce rendez-vous, explique Olivier
Kaeppelin, « rendra compte, grâce aux oeuvres réunies, d’un destin
d’artiste, tout aussi sauvage que savant, notre conviction est qu’il s’agit
d’une très grande oeuvre ».
Commissaire d’exposition : Olivier Kaeppelin