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Roberd Sixto Saurin Pua, peintre de l’Amazonie

La rédaction vous propose une découverte artistique sensible : Alain Amiel dresse le portrait du peintre Roberd Sixto Saurin Pua est né à Barranca, région de Loreto, province datem del Marañon, au bord du fleuve Maranon, au cœur de l’Amazonie péruvienne.
A vécu avec les Shawi qui vivent essentiellement de l’agriculture, de la chasse et de la pêche. Cette communauté voit son environnement de plus en plus menacé et déstabilisé par les activités économiques pétrolières et minières, par la déforestation lié à l’huile de palme.

Protecteurs de la forêt et défenseurs de l’Amazonie, les Shawi se battent contre le pillage de leurs ressources et la négation de leur histoire et de leur culture.

Comme beaucoup d’ethnies amazoniennes, ils ont choisi de renoncer au mythe de la croissance infinie pour pratiquer une économie respectueuse de l’environnement.
Leur philosophie, le Buen vivir, renoue avec celle ancestrale d’un développement humain en harmonie avec la nature, qui, selon la cosmogonie indigène, est une personne vivante généreuse et fragile, à l’image de l’homme.

Egaux, complémentaires et interdépendants, hommes et nature doivent veiller avec respect l’un sur l’autre.

Vivant et travaillant actuellement à Yurimaguas, Roberto Sixto pratique un art qui puise ses sources au plus profond de l’imaginaire des peuples indigènes. Ses « cosmovisions », renvoient à un univers magique ou chaque élément prend sens et contribue à une vision subjective et mystique du monde amazonien.

Dans les méandres de ses traits et de ses couleurs, les corps se font arbres ou champignons. Sans séparation, végétaux, animaux et êtres humains émergent, semblant naître l’un de l’autre : les plantes se transforment en visages, en corps féminins immergés dans une nature luxuriante, magique et parfois anxiogène.

Revisitant les légendes et les mythes de l’Amazonie (comme celle du dauphin rose voleur de jeunes filles, du Dieu Tonnerre, de la Déesse Brouillard ou du Diable Rouge), l’artiste chamane nous initie aux mystères de la Selva en nous rendant sensible à un monde invisible peupl ? d’esprits.

Sur les bords de l’Amazone-Grand Serpent, force ancestrale de la connaissance et de la culture, le peintre nous fait rencontrer Chullachaqui, le lutin défenseur de la forêt, Yacuruna, l’esprit de l’eau, l’Anaconda à deux têtes qui vit dans les abysses du fleuve, le Grand Alligator, le Yagua, arbre à serpents, la Guarana, plante grimpante dont le fruit ressemble à un œil humain, et l’ayahuasca, plante médicinale hallucinogène utilisée pour les cérémonies (en la mélangeant avec les feuilles de la chakruna), etc., tout un univers dans lequel les plantes, les animaux et les objets sont dotés d’âmes et de pouvoirs.

Grâce à sa palette colorée et à des formes stylisées et ondulantes, Sixto se réapproprie les éléments de la nature qu’il simplifie pour n’en garder que l’essence, l’impression, l’émotion.

Très actif, il s’intéresse également à la photographie, à l’écriture. Défenseur des cultures vivantes, il a dirigé une école d’art autochtone Shawi à Fray Martín, Varadero, district de Balsapuerto et actuellement crée une école d’art à Munichis sur le fleuve Paranapura.
Alain Amiel

© photos (sauf portrait) : Jean-Claude Fraicher

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