On les parque ! Cependant, ils errent, s’éloignent des bâches noires des bidonvilles. La nuit, à la lumière des phares, frrt ! On dirait des lapins quittant la route par peur d’être fauchés comme les blés. Les blés, ceux du Plat pays où ils rêvent d’un autre blé. Fallait choisir la bourse ou la vie. Ils ont donné leur bourse pour une vie provisoire, mauvaises graines urticantes dans cette morne plaine qui en a vu d’autres.
C’était une autre guerre que la leur qui a duré longtemps, Cent ans avec six héros, des bourgeois de Calais qui ont réussi l’exploit de sauver la ville en offrant leur vie à l’Anglais envahisseur. Aujourd’hui, l’Anglais est le Sauveur sur une terre promise à des sans-papiers errants dans des communes de sans-dents. Il y a un bail que son ventre gargouille. Il a faim depuis longtemps, vu le pain qu’il mastique longuement pour se bourrer l’estomac. Arrive une mixture qu’il partage avec son pote, deux fourchettes pour un plat servi à deux ex-menottés dans la jungle calaisienne, appelée officiellement Cité de la dentelle, sic !
Téméraire, un de ces voleurs de poules a sonné chez un Blanc à Oye-Plage, 20km au compteur depuis Sangatte. Le dur cherchait un hébergement provisoire à défaut de durable. Le Charitable lui a désigné un cabanon propret. Bingo ! Le laissé-pour-compte, passager de la pluie sauvé par Moïse et sa bergère a gagné des clefs de purgatoire. Les voisins observent en catimini ce Pierrot lunaire arpenter inlassablement le bitume, ils l’ont surnommé le Bouseux des Flandres. Il pleut des cordes, des cordes pour se pendre. Mais pas lui qui a la rage. Il purge sa peine sans broncher, sans barreaux.
Et voilà qu’un jour de chaleur de four, quel foin ! Le basané a trouvé du travail, au noir. Petit boulot deviendra grand. Depuis, il est aux abonnés absents des registres, c’est un paumé de moins.
Dites ! Charlot des Temps modernes, somnambule à vos heures, frère venu d’ailleurs, c’est quoi votre rêve ? Rester !