L’exposition Nivèse, Altmann, un parcours à deux voies présente photographies, tableaux et documents témoignant de la diversité de l’engagement culturel de Frédéric Altman et permet de découvrir un ensemble d’œuvres de Nivèse : tableaux, sculptures et pièces monumentales peu exposées ou récentes retraçant le parcours artistique de Nivèse.
Des conférences accompagneront cette exposition
– Samedi 15 janvier à 15 heures :
A la recherche de l’Ecole de Nice par Frédéric Altmann et Pierre Marchou.
– Samedi 22 janvier à 15 heures :
Fluxus à la Galerie d’Art Contemporain par Frédéric Altmann.
– Vendredi 28 janvier à 17 heures
L’œuvre de Nivèse par Frédéric Altmann.
(Entrée libre sous réserve de places disponibles, renseignements au 04 97 13 48 00).
« Oscari Nivèse X Frédéric Altmann. L’art à la puissance 2. » Par Raphaël Monticelli
« Pour moi, Frédéric Altmann, ce fut d’abord une voix... Belle voix grave et profonde de ce jeune homme du conservatoire d’art dramatique de Nice, puis de la compagnie des Vaguants, déjà rompu aux concerts et aux tournées, pour avoir été la voix cristalline et fluide des petits chanteurs de la Côte d’Azur. Voix fascinante chargée de corps, minérale, terrienne...
Dois-je évoquer ces souvenirs très personnels ? C’est lui qui fut la voix off du poète dans ma première pièce de théâtre, mise en scène par Victor Sayac. C’est lui qui fut le personnage, seul sur scène, de ma deuxième pièce.
Frédéric Altmann, ce fut donc, pour moi, une voix, avant d’être un regard. Je ne m’étendrai pas sur le photographe, ce témoin vivant de la vie artistique de la région niçoise, toujours prêt à vous croquer, tout en balançant une boutade ; ce témoin là, doublé d’un archiviste impénitent, beaucoup de gens le connaissent et peuvent en parler...
J’aimerais évoquer le regard de l’amateur d’art... Comme quelques autres, à Nice, Frédéric Altmann a su voir ce qu’il y avait de particulier chez les artistes des avant-gardes niçoises... Et son regard sur l’école de Nice nous est précieux. Mais ce que Frédéric Altmann a su regarder, comme personne, c’était l’art singulier, l’art des singuliers de l’art, et je ne me rendais jamais sans trouble dans la galerie qu’il tenait à la rue de la Préfecture. Tout un monde ignoré de moi, dédaigné par beaucoup, l’art que l’on disait « naïf » ou « brut »... Frédéric Altmann a eu, dans notre région, ce mérite rare, sinon unique, de défendre les artistes de ces régions particulières où l’art vient au monde comme une impérieuse nécessité de la vie. C’est ainsi que notre région lui doit d’être dotée du musée Anatole Jakovsky, l’une des collections les plus complètes et les plus diversifiées de l’art naïf.
C’est dans ces régions-là de l’art qu’il a connu et fait connaître celle qui est devenue sa compagne, Oscari Nivese... Je me rappelle les premières oeuvres que j’ai vues d’elle, dans la galerie de Frédéric Altmann : des sortes de reliquaires, des poupées tout ornées dans leurs boites ornées, femmes et filles que l’art transfigurait comme de très antiques déesses. Et Frédéric Altmann a su me faire comprendre et aimer l’art premier d’Oscari Nivese.
Parce qu’elle vivait à Nice, peut-être aussi parce qu’elle vivait avec Frédéric Altmann, et parce qu’elle était curieuse de toutes les formes de l’art, Oscari Nivese a fait évoluer son art... Quand on l’évoque aujourd’hui, on pense à une artiste proche d’une abstraction que l’on pourrait dire géométrique. Mais ses formes, si abstraites soient elles, gardent toujours une relation forte avec les douleurs et les rumeurs du monde.
Je me souviens de ses formes des années 90... Dans chacune revenait un petit rectangle blanc... Intrigué, j’avais regardé ça de très près et l’avais interrogée... Dans ce rectangle, peinte en blanc sur le fond blanc, reposait la forme ancienne de ses anciennes poupées... Peu d’oeuvres m’ont autant ému que celles-là : l’image de la femme ne faisait pas que reposer dans son carré blanc... Elle organisait la production des autres formes, leur disposition et leur sens.
D’autres sauront mieux que moi dire le travail de Frédéric Altmann au MAMAC, dont il fut le premier archiviste, celui à qui l’on doit les catalogues sur la situation niçoise, ou évoquer la carrière artistique d’Oscari Nivese. D’autres sauront dire le rôle de Frédéric Altmann dans la création et l’animation du CIAC de Carros.
À mes yeux, Frédéric Altmann, la voix, le regard, la mémoire, et Oscari Nivese, l’art, la femme, l’enfoui et l’apparent, forment un couple lumineux qui, tout en évoluant dans le « milieu de l’art » est toujours comme « à côté » ou ailleurs, dans l’espace et le temps. »
« Lettre à un ami » Par Frédéric Ballester
« C’est sous la forme d’une lettre, conçue autour d’une pensée spontanée et exprimée en toute modestie, que j’adresse avec sincérité toute ma reconnaissance à un confrère et ami. A toi Frédéric Altmann, éternel enfant qui dans l’improvisation et sous le ton de la plaisanterie s’est inventé avec naïveté un personnage qui use depuis des décennies de l’art de l’équivoque. Il s’entretient chez toi une relation narrative qui s’improvise dans une forme d’esprit douteuse, parfois à faire rougir les dames, ou provocatrice afin d’irriter au plus profond des choses ce qu’il paraît être du plus sérieux et qui n’en est rien. Ne voyons-nous pas dans cette attitude l’esprit qui a forgé en toi l’humeur nécessaire à un critique en art et le sens du reflexe pour saisir des instantanés photographiques simples et des plus libres dans le cadrage ? C’est au cours d’une singulière carrière naissante au sein d’une configuration labyrinthique partagée entre des moments excessifs, parmi les hommes, que toutes ces forces t’ont donné le vertige qui aide à surmonter nos passions. Ce personnage émérite que tu es, c’est dans ta progression humaniste que tu as su l’engager avec pathétisme vers une sensibilité ouverte sur un mode de recherche spontanée et sans prétention. Cet art s’invente et se libère par de fructueuses découvertes, une aventure qui se situe en aparté au centre d’unmoment de vie privilégié de l’histoire de notre civilisation.
Cher Frédéric, tu n’existes pas à travers une formation universitaire classique, mais tu détiens un savoir qui se mérite par ta persistance aux sources-mêmes des territoires artistiques vécus où s’improvisent les joies et les souffrances. C’est là que tu te reconnais et que tu t’essaies à des gestes d’écriture reliés à la photographie, des témoignages saisis au coeur des forces du vivant. Tu es né de la résistance, ce qui fait de toi le meilleur historien.
Ces tentatives sont aussi des traces répertoriées et favorables pour comprendre et reconnaître les divers éléments qui ont constitué jusqu’à présent l’École de Nice, que tu
défends avec ferveur, et c’est plus encore par ton acharnement pour analyser les situations que tes recherches deviennent l’un des plus sérieux témoignages pour évoquer les circonstances d’une époque révolue. N’es-tu pas aussi grâce à ton amitié, au sein des Nouveaux Réalistes, un des derniers garants qui jusqu’à la fin du XXème siècle ont immortalisé par l’écrit et la photographie un des plus innovants mouvements de l’histoire de l’art ?
Ta vie, comme une oeuvre conçue autour d’un engagement, se partage entre le milieu de la création et ton épouse, l’artiste Nivèse. Ces vies entrecroisées se méritent aussi grâce à une même passion, l’amour pour l’art. Ton savoir-faire va bien au-delà de ta région, qui borde la Méditerranée, puisque tu as su par ton enthousiasme offrir tes découvertes à des hommes et des femmes de nombreux pays éloignés de notre culture, tels que le Japon, la Corée, mais aussi la Belgique et bien d’autres pays qui restent pour toi à conquérir.
L’acteur, montreur d’images, conteur et philosophe que tu es, reste gravé dans nos coeurs comme l’image d’un poète humoriste en quête d’offrir son savoir puisé dans des multiples expériences fructueuses qui font de sa raison sa fureur de vivre. »
– Frédéric Ballester
Directeur de Centre d’art/ La Malmaison, Cannes
« En hommage aux deux héros lumineux d’un quotidien trop souvent incertain – Henriette ELOY et Armand ALTMANN – qui nous ont donné la vie et la force de ne plus subir la nôtre, mais de la choisir. » Par Jean-Sébastien Eloy-Altmann
« Mon cher Frédéric,
Qui aurait imaginé en 1904, en rencontrant le peintre russe Alexandre Altmann à « La Ruche », que son petit fils Gérard serait lui-même peintre à Tourrettes-sur-Loup puis à Paris ?
Qui aurait imaginé que toi-même, Frédéric, serais dès ton plus jeune âge initié à l’art sous toutes ses formes ?
Qui aurait pressenti le trajet que tu es en train d’accomplir et dont cette exposition rend témoignage ?
Tu me fais l’honneur de m’inviter à exprimer ma perception de ton parcours personnel dans la pétillante sphère artistique et culturelle de notre Côte d’Azur.
Ce choix me touche et m’enthousiasme mais l’exercice pourrait devenir périlleux si je ne me contentais pas de dire simplement ceci : l’abondance et la diversité de tes activités, tu en es le seul vrai comptable, comme tu l’es aussi des différents regards que tu as toujours portés sur l’Art, quelles que fussent les modalités qu’il empruntât.
L’Art nous donne sans cesse à réfléchir, à nous révolter, à sortir de nos torpeurs et parfois dans une belle fulgurance, à nous transporter dans le monde d’Apollon, le Dieu de la Beauté, de la Lumière et des Arts !
Toi, démiurge solitaire, au milieu de tes fameuses archives, tu as eu la prévenance de prendre le pouls quotidien des pulsations artistiques de notre région.
Ta vigilance et les précautions dont tu t’es entouré, ont rendu ces documents précieux car quiconque -artistes, collectionneurs, historiens, institutionnels, fondations ou musées les sollicite, trouve son bonheur grâce à ton anticipation et à ton savoir-faire.
M’exprimer est aussi un exercice périlleux car tu es devenu ce qu’on appelle communément une personnalité marquante de notre région.
Je retrouve en toi, vivante et prospère, cette qualité morale que les Anciens appelaient la Fortitude. Elle consiste en une force de l’esprit, une énergie et un vrai courage déployés sans relâche et quelles que soient les circonstances de la vie.
Cette qualité, que tu transformes en vertu, te rend souvent différent des autres par ta personnalité authentique animée d’une conscience professionnelle et éprise de la liberté d’expression dont Antonin Artaud semble t’avoir soufflé l’esprit.
Evoquer la fortitude n’est donc pas une simple facilité de langage lorsque je m’adresse à Frédéric ALTMANN.
En effet, tu es un éveilleur de talents, un informateur avisé, un critique réservé, un historien d’art averti et tes photographies témoignent discrètement de toutes les émergences.
M’exprimer est enfin un exercice périlleux car on s’accorde à reconnaître généralement que la
nature humaine n’est plus, depuis une certaine Chute, un cristal pur et sans scories.
Ses facettes sont diverses et multiples et la Lumière d’Apollon n’arrive pas toujours à percer leur opacité. C’est alors que l’animal mord la main de celui dont il a reçu les bienfaits. Il y a, en effet, en chacun de nous une part d’ombre où prospèrent l’absurde et l’égoïsme, contre lesquels tu n’es pas préparé ni disposé par ta nature à lutter très longtemps.
Ton émotion et ta sensibilité te portent davantage à jouer le maïeuticien génial qui accouche les créateurs de leur potentialité et qui convertit tant de regards vers les avancées parfois décoiffantes de l’art contemporain.
Contre les adversités endémiques de notre société moderne et des conventions qui te paraissent souvent ridicules, ton arme, c’est l’humour érigé en système de dérision.
Systématiquement, tu mets en relief, avec drôlerie, le caractère absurde, insolite ou tellement figé de cette réalité dans laquelle nous baignons. Manifestement cette réalité ne s’impose pas à tous de la même façon et là encore tu fais la différence.
Face à ton humour, des conventions volent en éclat mais certaines mériteraient sûrement que tu leur fasses plus souvent une place plus confortable dans le palais idéal de tes rêves ! Au moment où la BMVR de Nice désire te rendre ce bel hommage, voilà tressés là, sans retenue, quelques brins de ta vie.
Comment ne pas étoffer ce lien avec les brins que Nivèse a de son côté confectionnés et assemblés, riches de sa belle personnalité artistique au sein de l’Ecole de Nice, de sa présence et de l’indépendance qu’on lui connaît ?
A vous deux, c’est un parcours parfaitement complémentaire que vous accomplissez : « le parcours à deux voies ».
A l’occasion de cette exposition, je formule le voeu qu’à ce présent témoignage viennent s’ajouter les réactions du plus grand nombre : réserve, critique, symphatie, amitié, affection.
Avec tout mon attachement admiratif à tous les deux,
– Ton frère Jean-Sébastien »
« Dualité de l’œil » Par Tita Reut
« S’il est vrai, comme l’affirmait Bakounine, que « la liberté des autres étend la (nôtre) à l’infini », alors on comprend la légitimité d’une exposition conjointe entre deux visions qui se sont associées et complétées sur un même espace, des années 1960 à 2010. Il s’agit, par les photographies de Frédéric Altmann, d’une capture d’instants et d’êtres dans le champ des créateurs régionaux et nationaux, voire internationaux, et de l’activité artistique -picturale et volumique- de son épouse Nivese. Convergence de « voyants », dans plusieurs acceptions de ce terme. D’une part, le terrain que le voyeur caractérise entre Nice et ses environs, fixant la mémoire des présences et des côtoiements ; d’autre part, le territoire que définissent le projet et l’œuvre de Nivese. Et il n’est pas banal que cette œuvre sculpturale s’agrège aux architectures de la ville (le Mamac), dans la mesure où elle s’affirme largement en tant qu’architectonie : sculpture ouverte, frontière en découpe qui délimite un dehors et un dedans, mais dans l’esprit d’une traversée possible. En creux, le passage porte la marque de la masse ; l’interdit d’une lisière suscite la marge comme topos. L’idée de franchissement contenant déjà une réalité : celle de l’incitation. La démarcation qui borne le terrain impose, à rebours, la notion de territoire. A ce titre, l’esprit de cette sculpture suggère une politique, au sens premier d’une philosophie « pratique » de la cité : si la terre des hommes est ainsi morcelée, seule l’ouverture modère l’appartenance.
Du voir à la vision, la formulation des confins, et donc des espaces, affirme un rythme, c’est-à-dire variation et progression. Les monumentales grilles monochromes qui cernent les jardins du musée et « La Tête carré » selon Sosno, aux marches de la ville ancienne et de ses élargissements, élève une partition verticale entre deux lieux. Si couper est réduire, ponctuer met en valeur deux latéralités. Le détail circonscrit par la découpe accentue ce qui se perdait dans un ensemble. Problématique de l’objectif photographique. Un cadrage, un cerclage peuvent servir de support d’espace.
Cette œuvre de circonscription trouve son pendant, autrement dit réintroduit une présence humaine, dans le constructivisme des collages. Les petits formats originaux sur papier donnant lieu à des agrandissements numériques sur toile de grande taille. La perfection des écritures incorporées aux images, leur propos sociologique et critique ne sont pas sans rappeler les effets de surprise (mais non de surréalité) de la « Femme cent têtes » de Max Ernst. Ici, en revanche, couleurs et frontalité nous rapprochent d’une dominante picturale.
L’ensemble est déterminé par une maîtrise des techniques et du discours ; l’élégance née de l’homogénéité s’accomplit dans la démultiplication du format, qui en est la démonstration, la miniature contenant le monumental, de même que dans les stèles découpées, initialement maquettées dans des feuillets cartonnés.
Cette série de vingt-six collages, on le constate, est le prolongement d’une pensée duelle entre limite et débordement, bien-fondé et outrance. Nivese confirme l’influence toujours prégnante des constructivistes russes et la référence à Rodchenko a ici toute sa place. Le lien à cet esprit, et à l’univers premier des dentelles d’acier trouve sa continuité dans les fragments des murs et
de leurs ouvertures, les stries de lumière devenant lignes de force et direction, dans la mise en abyme et le recouvrement des plans. Grilles d’ascenseurs, barreaux de prison, façades de gratte-ciel structurent l’ensemble de cette alternance impeccablement ordonnée et urbanisée. Ainsi une rythmique est-elle toujours à l’œuvre sous le discours. Dans cette perspective, la
dominance des fonds noirs sur la couleur pure crée, a contrario, un effet de volume sous les collages. Et une impression de diagonale, telle que valorisée dans les découpes métalliques, est sans cesse rétablie par le fuselage de la composition.
A travers les superpositions, l’univers de Nivese se réfère aussi aux Combine Paintings de Rauschenberg où onirisme et flashes de réalité se confondent. Messages et slogans s’y trouvent voilés/révélés. Un graphisme de l’espace joue de l’ombre et de la couleur, ainsi que mis en jeu dans les sculpures mobiles. Il semble que l’on retrouve dans cette série une déclinaison de concepts manifeste dans les tôles pliées : l’orientation change le sens, l’un contient le multiple, le retour du même montre sa diversité, le simple contient le complexe, le pli n’opacifie pas, mais atteste une autre instance qui la complète sans la contredire… Enfin, la profession de foi de Nivese n’est-elle pas inscrite dans le poème qu’elle publie sur l’affiche de 2° colloque de l’Université de Nice Sophia Antipolis-C.R.I.S.E. : « la porte des traîtres/était peinte en jaune/l’escalier revêt/un aspect négatif/la descente au retour/ au terre à terre/au monde souterrain/il se prête aussi bien/à la régression/qu’à l’ascension/c’est tout le drame/de la verticalité/qu’il assume/le rouge/l’interdiction/le bleu/le malaise/(la peur bleue)/les barreaux/la prison ».
Il s’agit du « Malaise dans la civilisation ? »
Une question en acte… »
– A Nice, le 6 septembre 2010.
Tita Reut. Texte © Tita Reut
« Frédéric Altmann et Nivèse : entre communication et liberté créative. » Par Rosemary O’Neill
Lorsqu’on examine la photographie de 1979 prise par Frédéric Altmann où Nivèse fixe l’objectif à travers la voilette noire de son chapeau, on y perçoit à la fois un sentiment d’assurance et de vulnérabilité. Ce témoignage photographique nous donne l’impression d’un engagement intime et profond pour l’art, d’une complicité créative.
Au moment où cette photographie a été prise, Nivèse apportait une voix féminine au discours artistique de Nice en reprenant les ex-voto de la tradition populaire locale sous forme d’assemblages, de « mises-en-boîtes » qui représentent la femme-objet.
En associant aux prostituées des objets liés aux occupations traditionnellement féminines - broderie, dentelles, perles et couture - Nivèse les détourne pour en faire des « Ex-voto à la putain », elle-même objet de désir et pourvoyeuse de plaisir anonyme.
Elle explore ainsi les tensions inhérentes au désir et à la répulsion provoquées par ces travailleuses du sexe et les représente par leur tenue provocante et leur maquillage outrancier.
Alors que la composition finale semble être d’une facilité apparente, ces œuvres ne sont pas sans profondeur et sa série des « Ex-voto » fait contrepoids au thème du nu masculin récurrent en art, déplaçant ainsi avec pathos la notion de transgression.
Depuis le début de sa carrière jusqu’à ses séries de 2004 consacrées à Marilyn Monroe, elle interroge le côté artificiel du rôle féminin. L’interaction entre ce qu’elle donne à voir et la signification cachée reste une thématique constante dans les travaux de Nivèse.
Ceci est encore plus évident dans ses paravents d’inspiration constructiviste et dans ses palissades qui intègrent structures linéaires changeantes et couleurs audacieuses, superposant plan et espace avec des jeux d’ombre et de lumière ; le meilleur exemple en est ces monumentales grilles installées en 2002 autour des jardins de la Bibliothèque Louis Nucéra à Nice.
En même temps l’engagement social de Nivèse la mène à poser son regard critique sur l’omniprésence de la culture populaire et sur l’inégalité sociale. Cet engagement se manifeste dans ses derniers travaux où se côtoient sur de grandes bannières le langage artistique et celui de la culture de masse et toutes les ambigüités découlant de cette cohabitation.
Quant à Frédéric Altmann, conservateur à l’esprit universel, il se révèle au mieux dans son oeuvre humaniste ; il s’intéresse à la recherche historique et considère la scène artistique comme un espace de collaboration sociale tout en l’animant. C’est un individualiste doté d’un généreux sens de l’humour.
Altmann est un visionnaire et cela se retrouve dans ses pratiques culturelles riches et variées : enfant chanteur se produisant au Carnegie Hall à New York, acteur dans Les Comédiens Associés, personnalité théâtrale de la troupe Les Vaguants, acteur-spectateur à des événements Fluxus, amoureux de la nature, directeur-fondateur du Musée d’Art Naïf à Flayosc, fondateur et directeur de la Galerie d’Art Marginal à Nice.
A ses dires, le Festival de 1961 du Nouveau Réalisme à Nice a enflammé sa passion pour l’art contemporain et ses possibilités illimitées de création.
Et c’est avec une grande empathie qu’il photographiera les cicatrices laissées par la ségrégation dans le Sud des Etats-Unis et fixera sur la pellicule avec le regard distancié d’un grand voyageur, l’héritage culturel et les coutumes du Japon et de la Corée. Avec plus de cent mille négatifs, les photographies d’Altmann illustrent son amour et son intérêt pour la Culture, porteuse d’Histoire.
Depuis 1975, la vie du couple Nivèse -Altmann n’aura été que parcours commun sur le chemin de la création, inspiration, soutien réciproque et admiration constante.Ils exercent des métiers différents et s’affirment en toute liberté.
Avec les expositions personnelles à Pusan où Nivèse représente la France à la Biennale de 1998, à New York, avec les publications de poètes et critiques d’art comme Michel Butor, Pierre Restany, Robert Pincus-Witten, Raphaël Monticelli et France Delville, avec le Premier Prix à la Biennale de Sculpture de Quenza en Corse en 2009, la vie artistique de Nivèse est aboutie et apporte sa part au monde de la création.
Tandis que Frédéric Altmann s’érige en personnage-clé faisant partie activement de l’histoire de l’Ecole de Nice, il est nommé Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres en 1994, un honneur bien mérité et dont il est fier.
En parallèle, chacun a mené une vie créative au sein d’une union où les partenaires et le couple ne font qu’un - exploit qui lui-même peut être considéré comme une réalisation artistique à part entière –. »
– Rosemary O’Neill, Ph.D.
Associate Professor of Art History
Parsons The New School for Design of New York
La bibliothèque Louis Nucéra, tête du réseau BMVR de Nice
Inaugurée le 29 juin 2002, la bibliothèque Louis Nucéra a été conçue par les architectes Bayard et Chapus et par le sculpteur Sacha Sosno. Cet outil culturel est constitué de deux bâtiments distincts la Tête Carré et la Bibliothèque Louis Nucéra elle-même.
La Tête Carrée que l’originalité architecturale a converti très rapidement en un des symboles forts de Nice, a été imaginée par le sculpteur Sacha Sosno. Ce monument-sculpture haut de trente mètres, large de quatorze, accueille les bureaux de la bibliothèque Louis Nucéra.
La Bibliothèque Louis Nucéra, baptisée ainsi en hommage à l’écrivain niçois tragiquement disparu en août 2000, s’articule autour d’une grande nef centrale. Elle est organisée sur un principe d’espaces ouverts : la circulation des usagers va de la zone la plus animée (le hall d’accueil) à la zone la plus calme (la salle de consultation). Chaque salle est parfaitement identifiée, tout en conservant un maximum de transparence et de continuité visuelle.
Dans ses 10 600 m², la bibliothèque Louis Nucéra propose : une bibliothèque adultes, une bibliothèque enfants, un espace actualités, une vidéothèque, un espace multimédia avec accès à Internet, une bibliothèque musicale, un auditorium et un espace expositions. Plus de 200 000 documents sont en accès libre (livres, périodiques, cassettes, CD, CD Rom, DVD, partitions...). Des équipements informatiques pour malvoyants rendent possible la lecture de documents sur place, un cheminement au sol garantit la circulation autonome.
La bibliothèque Louis Nucéra est la tête du Réseau B.M.V.R. de Nice (Bibliothèque Municipale à Vocation Régionale) qui est l’ensemble des bibliothèques municipales de la ville (14 bibliothèques et discothèques de quartier, un réseau de médiabus urbains et des dépôts de livres auprès de certaines institutions).
L’accès au réseau de bibliothèques est libre. La carte de lecteur est indispensable pour emprunter des documents et avoir accès à certains services.
L’inscription et le prêt sont gratuits. La carte de lecteur est valable pour l’ensemble du réseau, médiabus compris.
Afin de s’inscrire il est nécessaire de fournir une photo d’identité récente et de présenter une pièce d’identité et un justificatif de domicile. Une autorisation parentale sera demandée pour les lecteurs de moins de 18 ans.
Le réseau BMVR propose régulièrement des expositions et des animations gratuites pour adultes et enfants.
BIBLIOTHEQUE LOUIS NUCERA - 2 - PLACE YVES KLEIN – Entrée libre. 04 97 13 48 91
Mardi-mercredi 10h-19h Jeudi-Vendredi 14h-19h
Samedi 10h-18h Dimanche (d’octobre à juin) 14h-18h
La bibliothèque sera fermée du 23 décembre au soir, jusqu’au 3 janvier inclus.