Léon Pape, le messager
Léon Pape Gnacadja, dit « Léon Pape », est né en 1962 à Dakar au Sénégal de parents béninois. Il a fréquenté l’école catholique Daniel Brottier de Thiès (Sénégal), puis le petit séminaire de Ngazobil où a étudié le poète et ancien président, Léopold Sédar Senghor, puis le collège Saint Gabriel et le Lycée Malick Sy de Thiès. Après son bac, il passe six longues années de formation à la fois spirituelle, philosophique et théologique au grand Séminaire de Sébikothane dans le diocèse de Dakar.
Depuis, après un passage par le Var, il vit et travaille à Nice avec la double nationalité française et Sénégalaise… où il assure une prêtrise. Il a été longtemps le curé très aimé du Vieux-Nice, en charge entre autres des Eglises du Gésu et de Saint Augustin. Actuellement, il est provisoirement en mission à l’hôpital Saint Jean De Dieu au Sénégal.
Son parcours
Léon Pape a commencé à peindre alors qu’il était étudiant au grand séminaire de Sébikhotane entre 1986 et 1989. C’était une période où il lui fallait confirmer son choix de devenir prêtre. La peinture lui a permis comme il s’en confie facilement « de sublimer ses angoisses »…
En fait, l’artiste est essentiellement un autodidacte.
Entre 2000 et 2007, il eut à fréquenter les Beaux-arts de Toulon et nombre d’artistes de la Côte d’azur. Curieux et insatiable pour le savoir, il a poursuivi en parallèle tout un parcours universitaire à l’IAE de Toulon, l’université Sophia Antipolis de Nice. Il est actuellement chercheur-doctorant à Nice et à Dakar, tout en affirmant sa constance dans l’engagement à une idée de l’Art et à un rapport à l’Art. Il en résulte une approche profondément autonome et solitaire dans un feu d’artifice de productions diverses.
« Mon parcours est très simple. Je suis né artiste ! Très tôt je croquais pour mes copains et petit à petit j’ai construit mon style basé sur le non conformisme. Je peins ce qui me plaît, ce que je ressens que ça plaise ou pas. »
Interview de Léon Pape, janvier 2015
Sans que ses thèmes soient toujours directement théologiques, Léon Pape est marqué par 14 années de formation et 26 ans de vie de prêtre catholique. « C’est donc tout à fait normal que dans mes œuvres on ressent la fibre biblique et bien plus, le souffle de l’Esprit Saint », comme il le déclare.
Pourtant pas facile d’être à la fois prêtre et artiste, la hiérarchie a toujours quelques difficultés à l’accepter, comme ce fut le cas avant-guerre dans une autre direction avec les prêtres ouvriers…
« Oui, il m’arrive de travailler sur le thème de la pauvreté pour dire qu’aucun homme n’arrive au monde pauvre, comme on peut le lire dans la parabole des talents. Donc, l’Afrique qu’on qualifie, à tort de continent pauvre voire misérable, ne l’est pas d’après mon point de vue. Alors, j’incite, à travers certaines de mes œuvres, les africains à ne pas accepter d’être enfermés dans cette forme de caricature. »
Interview de Léon Pape, janvier 2015
Par exemple, une de ses œuvres « princept » est Talibe qui veut dire « enfant ». Le thème fait référence aux enfants de la rue qui sont souvent exploités par des chefs religieux (marabouts).
Photo enfant des rues du Sénégal
« On se sert aujourd’hui de la fragilité des enfants pour s’enrichir. Ces enfants sont logés dans de très mauvaises conditions. Ils arrivent, pour la plupart, de localités lointaines, coupés de leurs familles. Une fois chez le marabout, ils doivent se soumettre à tous niveaux. Autrefois on les reconnaissait facilement dans les rues des villes marchant pieds nus, mal habillés et munis chacun d’un pot de tomate pour la collecte de nourriture.
L’œuvre a pour but d’attirer l’attention des autorités sur ces pratiques qui rappellent l’esclavage. Elle dit également que les enfants ont des droits que nous devons respecter. Enfin, elle signifie que c’est par l’éducation que des continents comme l’Afrique arriveront à acquérir un niveau de développement qui permettra aux habitants d’avoir une vie plus digne."
Interview de Léon Pape, avril 2015
A suivre : mercredi prochain deuxième partie, ses oeuvres !
Retrouvez toutes les chroniques d’André Giordan et Alain Biancheri en cliquant ici