Sauvages. Sauvages comme libres. Sauvages comme indisciplinées. Sauvages comme vagabondes. « L’institut des archives sauvages » de la Villa Arson c’est un nouveau système de classification. Exit les méthodes de rangement classiques, ici l’art a sa propre institution, avec catégories, fonctions et usages qui lui sont propres. Une trentaine d’œuvres proposent d’autres systèmes d’archivages, un travail original tant dans sa forme que son contenu, sortons des sentiers battus et des classes habituelles ! Lâchons-nous l’Art est partout !
Les artistes ont tenu à envoyer valser les principes, en créant de nouveaux processus, de nouvelles logiques et offrant par la même occasion de nouveaux usages aux objets, aux documents, aux œuvres. Oubliée la lecture sur table, le déballage de classeurs, de livres, ici les cabinets de curiosités de la Renaissance, la Bibliothèque d’Alexandrie ou les archives de la NASA se réinventent, s’expriment avant même de les consulter. Le travail de l’Institut consiste à repérer et comprendre la singularité des dispositifs artistiques de l’archive, les logiques spécifiques. Cette « archivologie » ne préside plus, déconstruire les schémas de construction et de fonctionnement, tel est le principe de cette nouvelle exposition pour le moins inspirée.
L’institut des archives sauvages s’inscrit dans un cycle de réflexion mis en place par le centre d’art de la Villa Arson depuis 2006. Un jeu de déconstruction fait de paradoxes et d’ambivalences.
Vous pouvez profiter d’un regard d’initié grâce à l’accueil des visiteurs par les étudiants de l’Ecole d’art de la Villa Arson. Un parcours d’exposition entre jeux, œuvres, démarches artistiques, projets initiatiques et documentations. Afin de mieux appréhender l’exposition, laissez-vous guider par ces jeunes médiateurs culturels avisés : rendez-vous les mercredis et dimanche à 15h (accès libre et gratuit sans réservation).
Trois questions au directeur de la Villa Arson, Eric Mangion
L’Institut des Archives Sauvages, c’est une exposition collective actuellement à La Villa Arson et ce jusqu’au 28 mai… Plus d’une vingtaine d’artistes, justement comment ont-ils été sélectionnés pour ce projet ?
Eric Mangion : Il s’agit d’un collectif, nous sommes cinq commissaires d’exposition. Au départ il y a eu beaucoup d’échange par mail, c’est un choix collectif ; on échangeait sur des œuvres que l’on connaissait ou que l’on découvrait.
Pourquoi ce thème des « archives sauvages » ? Vous avez le sentiment que l’on range trop facilement les choses et les idées dans des cases ?
Eric Mangion : C’est un peu ça (rires). Cela correspond surtout à un phénomène de société, surtout à l’heure des nouvelles technologies qui archivent tout : google, les différents réseaux, certains logiciels… Le monde s’auto-archive en permanence et nous avons voulu réagir à ce propos et voir comment les artistes se positionnaient… C’est-à-dire une approche plus originale par rapport à cet archivage dans notre société. On note un autre phénomène, un peu lié au phénomène global : depuis quelques années, beaucoup d’artistes travaillent sur la question des archives. Nous avons voulu faire une exposition qui dresse le bilan de ces positions artistiques.
Vous êtes arrivés en 2006 à la Villa Arson, quelle est votre dynamique culturelle ? Vos orientations, vos choix, vos objectifs, votre volonté…
Eric Mangion : Il y en a plusieurs, principalement deux… D’abord la Villa Arson est un lieu spécifique : c’est avant tout une école. La première chose à faire, c’est de travailler en lien avec cette école et donc d’inscrire ces expositions dans un cadre pédagogique. C’est pour ça que la plupart de nos expositions répondent toujours à un thème, afin de permettre aux étudiants et aux enseignants d’en débattre et de développer des réflexions. Il y a ensuite un second niveau, local, où la Villa Arson essaie de développer un public « de proximité ». Ce qui n’est pas toujours évident, pour beaucoup il y a encore cette image de « villa inaccessible sur sa colline »… Nous travaillons en réseau, c’est ainsi que BOTOX[S] a vu le jour en 2007 (ndlr : Fédération de plusieurs acteurs de Nice et de la région pour défendre, représenter et soutenir l’art contemporain sur la Côte d’Azur et plus particulièrement à Nice), et qui regroupe aujourd’hui une vingtaine de structures. L’idée est de participer à une dynamique collective sur un plan local. Et enfin, un plan national et international, pour faire en sorte que la Villa Arson soit vue, visitée, critiquée par des publics venus de tous les horizons. Trois choses cohérentes et finalement indissociables.
La plupart des expositions sont menées de manière critique : on essaie toujours de traiter le sujet à travers ses paradoxes et ses ambivalences…
Comme c’est le cas pour « L’Institut des archives sauvages »…
Eric Mangion : Exactement, on traite le thème des archives et il n’y a aucune archive consultable ! Il s’agit de prendre le contre-pied de la classification.