Autour d’eux une vingtaine d’artistes forment le courant des primitifs niçois qui émerge à la fin du gothique et sera actif jusqu’au début de la Renaissance. Ils laisseront une multitude de chefs-d’œuvre jusque dans la plus isolée des chapelles de montagne : Giovani Canavesio, Jean
Miralhet, Jacques Durandi (auquel a été donné le nom d’une station du tramway de Nice). Ce dernier, maître de Louis Bréa, est l’auteur d’un retable conservé au Musée des Beaux Arts de Nice.
Cet âge d’or de la peinture niçoise, entre 1480 et 1520, sera suivi d’une longue période de vide artistique. Ici et là, des dynasties de peintres ont formé de véritables écoles. Transmission, apprentissage et entraide étaient de mise au sein des ateliers familiaux. Ils répondaient aux commandes passées par des ordres ou confréries religieuses et par des familles nobles et argentées.
L’école Bréa est composée de trois frères, Antoine, Pierre et Louis, et du neveu, François.
Ce dernier est davantage connu à Taggia (à dix kilomètres de San Remo) où une partie de ses peintures est conservée dans le couvent des Dominicains. Une seule œuvre est attribuée à Pierre. À l’époque, les œuvres n’étant pas signées, il n’est pas toujours aisé de les attribuer.
Louis Bréa est le plus "reconnaissable" d’entre-eux. Selon les historiens d’art, s’il n’atteint pas le génie de certains italiens, il sera le premier à s’écarter des codes du gothique pour ceux de la Renaissance. Auteur d’une production aussi abondante que de qualité, il est perçu aujourd’hui comme un humaniste universel parce qu’on lit dans sa peinture des messages très osés comme la dénonciation de la violence. Signe d’une grande notoriété, il n’a que 25 ans lorsque lui sera commandée sa piéta, son premier retable connu.
Quarante retables connus
À l’époque, les peintres sont itinérants et travaillent uniquement des sujets religieux, le plus souvent in situ. C’est ce qui explique pourquoi, sauf exception, leurs chefs-d’œuvre se trouvent dans les églises et chapelles. On pourra cependant admirer un Saint Michel peint par Antoine Bréa - quatre mètres sur trois - au musée des Beaux Arts de Nice, tandis que le Konstmuseum de Göteborg en Suède conserve une vierge à l’enfant Jésus de son frère Louis.
Après une restauration achevée l’année dernière, le retable "la crucifixion" de Louis Bréa n’a pas retrouvé l’église Notre Dame de l’Assomption à Cimiez. L’œuvre, fragile, se trouve maintenant au Musée Masséna, dans de meilleures conditions de conservation. Dans l’église, elle est remplacée par un fac-similé qui fait illusion.
Entre 1475 et 1516 Louis aura peint plus de quarante retables. Il reste à parcourir le haut pays niçois et la région (Aix, Marseille, Les Arcs-sur-Argens, Biot etc.) pour faire l’inventaire des crucifixions, flagellations, vierges, représentations de saints... sortis de son pinceau.
Il faudra (une fois fini le confinement) aussi se rendre au musée de l’église de Santa Maria di Castello à Gènes pour voir sa puissante vision d’une montée au Paradis : au milieu d’une foule de personnages tous caractérisés, un seul "individu" regarde directement le spectateur. Pour les spécialistes, il s’agit de son autoportrait.