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Caminiti en roue libre

Martin Caminiti passe le plus clair de son temps à mettre en apesanteur notre univers domestique : vélos, aspirateurs, cannes à pêche, cintres…. Se jouant des codes y compris de ceux de l’art contemporain, inclassable, insaisissable, fluide comme l’air, il délivre son message en quelques lignes…dans l’espace

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Martin Caminiti est directeur de la villa Thiole. Le reste du temps, il travaille dans son atelier à la Halle Spada à mettre en forme d’étonnants objets qui prennent racine dans notre présent et la tangente en quelques tours de roues. Pêcheur par son prénom, cycliste « chemin faisant », Caminiti est né en Calabre (Taurianova) en 1959 ce qui lui vaudra plus tard de se voir refuser une exposition en Italie du Nord. Mais c’est une autre histoire.

La sienne commence à Roquebrune-cap-martin où il débarque à trois mois avec sa famille. Enfant il joue du coté du cabanon Le Corbusier. Ado il passe son CAP de menuisier. Après la Villa Thiole, il intègre la Villa Arson. En cinquième année, alors que l’on aborde la question du socle dans la sculpture, Martin décide de retourner « Roue de bicyclette » l’œuvre clé de Marcel Duchamp qui représente une roue sur un tabouret « La roue est devenue alors socle avec l’illusion d’un déplacement possible et le tabouret sculpture. Ce fut mon premier détournement mais surtout un pied de nez à une interrogation qui n’a jamais été la mienne car j’ai toujours appréhendé l’objet comme un matériau poétique plutôt que comme un concept »

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Du dessin dans l’espace

Le mot est lâché poésie, un de ces termes tant galvaudé. Et pourtant, il semble mieux que tout autre définir son travail comme l’émotion qui se dégage de ses œuvres atemporelles, qui détournent par le langage des formes (ou signes) le quotidien du droit chemin. Avec la plupart des grands créateurs italiens Léonard De Vinci en tête, Martin Caminiti partage le sens du placement dans l’espace. Partagerait-il aussi un don pour le design ? L’autre sport national des italiens après le Totocalcio. Par essence, non ! Excepté si l’on veut bien parler de « design inutile ».

L’atelier de Caminiti
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Un illogisme qui conviendrait à ses oeuvres aux courbes rondes et avenantes mais privées de vertus pratiques, sublimes par leur subtile incongruité ! Car le seul lien que les OVNIS de Martin gardent avec leurs origines manufacturés (Aspirateur Cadillac, mobylettes Ciao) c’est les pièces que leur prélève l’artiste et qui une fois ré-assemblées avec d’autres offrent un « organisme » flambant neuf propice au rêve éveillé. Docteur Frankenstein sommes nous en présence de ready-made ? Non, car les figures libres de Caminiti naissent sur le papier et renaissent une seconde fois dans leur version en trois dimensions. Mais jamais elles n’auront cessé de tracer (tisser) leurs lignes dans l’espace telles d’insatiables arachnides ? D’ailleurs n’ont-elles pas parfois l’allure d’étranges insectes, ces sculptures hyperdoués à capter l’énergie ? L’artiste s’en explique « Je dessine dans l’espace plus que je ne sculpte. Après c’est un travail d’assemblage inspiré de volumes. C’est ainsi que j’ai eu recours aux cannes à pêche. Leur forme graphique est idéale pour passer du trait à la 3D. Quant à la roue en tant que cercle, c’est un point qui revient sur lui-même » Guère étonnant que l’on ait pu dire de cet artiste qu’il conviait le spectateur à rentrer dans une feuille à dessin.

« Par quel mystère ça tient en l’air ces deux hémisphères ? »

Mais au-delà de la mécanique du rêve les sculptures ont pris corps. A Nice, on a pu les contempler dès 1989 chez Lola Gassin, plus récemment à la galerie Pastor, au Château de Carros, à la galerie des Ponchettes. Elles partiront à Nuremberg en juillet dans le cadre du jumelage avec la ville de Nice mais investiront d’abord Monaco en juin, préfaçant ainsi le départ du Tour de France. « Dans mes expos je voudrais mettre un carnet ou chacun pourrait raconter une anecdote sur le vélo. C’est universel, de Shanghai à Budapest tout le monde se souvient d’une chute ou d’une balade inoubliable »

Mécaniques
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C’est en deuxième année à la villa Arson, que Martin commence à imaginer ses sculptures à la pulpe d’objets recyclés. Il a toujours bricolé, des radios, bicyclettes, plus tard des voitures mais pas sa Kangoo, toujours en panne et dont les voix demeurent impénétrables « De nos jours tout est jetable, plus rien ne se répare » regrette-t-il. Mais sa formation de menuisier reste un atout pour couper, façonner, souder, percer, visser dans des pièces qu’il chine ou achète souvent neuves. Quoiqu’il en soit aucune n’est datée. Toutes sont décapées et repeintes. Martin leur donne une seconde vie comme un second pedigree « L’objet ne doit pas être dans une immédiateté de reconnaissance et ne doit jamais mourir. La poésie n’a pas de date de péremption. Aussi je choisis toujours du matériel de qualité qui peut résister au temps »

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Quant à l’interprétation que l’on peut faire de ces œuvres atypiques elle est sans fond. Pour sa part il avance quelques repères : l’arrêt sur image hérité du Futurisme italien de Marinetti et Boccioni, calabrais comme lui. Un courant esthétique qui fit entre autre la synthèse des mouvements d’un cheval en course. Mais d’autres pourront voir dans son travail le décalage dont se repait le burlesque minimaliste de Jacques Tati, lui aussi grand consommateur de cycles et de confort moderne.

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Quant à la musique de Sati faites de contrepoints espiègles elle entretient une parenté avec son univers ludique et rayonnant « Lors de mon expo au musée national du sport une fanfare y a joué du Satie. J’aime ce compositeur pour son coté mécanique » et dont les titres évoquent ses œuvres. Quelle distance sépare les « gymnopédies » de l’une des « anamorphoses » de l’autre ? Et puis il y a Roland Topor, le retour aux origines ! « Le dessin, avoue Martin, j’ai très envie d’y revenir pour explorer encore plus en profondeur mon imaginaire »

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Sur ma tête héliport/ L’hélicoléoptère/ De ses élytres d’or/ Refermant l’habitacle/ Incline ses antennes/ Porteuses d’SOS. Gainsbourg Lunatic asylum

Artiste(s)

Martin CAMINITI

Né en Italie, en 1959, Martin CAMINITI vit, enseigne et crée à Nice. En 1987, il obtient le Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique et une bourse d’études assortie d’un atelier d’été dans le cadre de Sous le regard à la Villa ARSON où il rencontre TORONI, DIBBETS, BROUWN... Choc(s) (…)

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