« Ce que je cherche toujours, c’est d’offrir la possibilité à l’auditeur/spectateur de trouver un point de focalisation et de fixation visuelle. Cela me parait essentiel. Sans aller jusqu’au happening loin de là, je propose toujours un minimum d’action pour que le texte se présente comme une chose vivante et immédiate et prenne une texture quasiment physique. Il ne s’agit donc pas de lecture à proprement parler, mais de donner à voir le texte entendu. »
(Bernard Heidsieck)
Né à Paris en 1928, Bernard Heidsieck décide de rompre au milieu des années cinquante avec la poésie écrite, pour la sortir hors du livre. À une poésie passive, il oppose une poésie active, « debout » selon sa propre expression.
Il est l’un des créateurs, à partir de 1955, de la Poésie Sonore et, en 1962, de la Poésie Action. Il utilise dès 1959 le magnétophone comme moyen d’écriture et de retransmission complémentaire, ouvrant ses recherches à des champs d’expérimentation nouveaux.
Tout en restant attaché à la sémantique, Bernard Heidsieck s’émancipe peu à peu des contraintes de la langue. Il en explore toutes les dimensions formelles que ce soit par la spatialisation du texte, dans les partitions qu’il écrit, ou par la présence de son corps dans l’espace.
Le son revêt avec lui une dimension plastique, notamment grâce à sa diction exceptionnelle basée autant sur le souffle que sur une articulation parfaite ou sur les inflexions sans cesse renouvelées de sa voix.
Au fil des années, son écriture se réinvente pour mieux rendre compte de notre quotidien, de notre univers social, politique ou économique, au travers de ses principaux événements, comme dans son extrême banalité. Il développe en 1955 ses premiers Poèmes-Partitions. Puis, il ne cesse de travailler par séries avec les Biopsies entre 1966 et 1969 (au nombre de 13). De 1969 à 1980, ce sont les 29 Passe-Partout.
De 1978 a 1986, il écrit Derviche/Le Robert composé de vingt-six poèmes sonores. Puis à partir de 1988, Respirations et brèves rencontres (Soixante poèmes produits à partir d’archives d’enregistrements de souffles d’artistes).
Parallèlement à sa propre activité, il organise en 1976 à Paris le premier "Festival International de Poésie Sonore" à l’Atelier Annick Le Moine, et en association avec Michèle Métail, "Les Rencontres Internationales de Poésie Sonore" à Rennes, au Havre et à Paris au Centre Georges Pompidou.
Il participe pendant de nombreuses années à l’organisation du festival "Polyphonix" dont il assure un certain temps la présidence. Il réalise plus de cinq cent quarante lectures publiques de ses textes dans une vingtaine de pays.
L’exposition produite à la Villa Arson est la première qui réunira une vingtaine de pièces sonores. Toutes les oeuvres seront extraites de ses principaux poèmes. L’espace labyrinthique du centre d’art permettra de composer une déambulation dans la voix et dans les mots de l’artiste, rendant sa présence la plus incarnée possible afin de restituer sa dimension corporelle et plastique, sa matérialité.