Quand Ben s’installe quelque part, il lui faut de la place, surtout s’il accueille une bonne centaine de ses amis, illustres ou pas. Par ordre alphabétique au " 109 " des œuvres de Marcel Allocco, John Cage, Robert Combas, Baptiste César, Marcel Duchamp, Patrick Moya, Yoko Ono, Bernard Venet, Ultra
Violet pour ne citer qu’eux. Ce qui fait une sacrée équipe !
Tous nous offrent le moyen de contempler des pratiques artistiques délirantes et il y a de quoi s’injecter une puissante dose de caféine avec ces créateurs qui semblent avoir fumé la moquette pour nous amener sur le terrain de la philosophie.
Nous traquons le concept : il peut se trouver au fond d’une baignoire qui ne se remplit jamais. Les questions relatives à la vie et l’art sont formulées de manière plus ou moins triviales au moyen d’installations, de peintures, de sculptures élaborées, d’objets récupérés. Elles dégrossissent la notion d’artiste sans jamais en faire le tour car en définitive : "c’est trop dangereux".
Superbe même si c’est moche...
Tout artiste s’interroge sur les limites de l’art et le public également, surtout après cette visite, s’il n’a pas l’habitude de ce genre de manifestation. On ne trouve pas forcément de réponse aux interrogations, par conséquent on peut s’amuser : "En rentrant chez vous ce soir, allez au grenier, prenez un objet au hasard, dites à haute voix “tiens encore un objet qui se prend pour de l’art“. Ca y est, vous êtes un artiste d’art contemporain" affirme Ben. Et "même si c’est moche, les vrais amis disent que c’est superbe".
Ce type d’humour et de dérision est celui de Fluxus, mouvement qui a décoiffé les années 60, touchant les arts visuels aussi bien que la musique et la littérature, et dans lequel Ben se sent très à l’aise.
Au 109, cette bombe à fragmentation de 500 œuvres retrace seulement une partie des années de création de Ben Vautier. Son art ne se limite pas à ses citations écrites en lettres d’écolier sur des ardoises noires. Des films le montrent dans les années 60 s’employer à traverser la rue enveloppé dans un drap noir sous les regards médusés des passants. Installations, sculptures, peintures : il expose des tableaux de peintres amateurs qu’il signe sous les titres Degas du pauvre ou Bazelitz du pauvre.
Signer les tableaux des autres satisfait son ego. Il assume...
À 83 ans, son esprit est plus libre que jamais. Il y a beau temps que l’artiste a été sacré "roi planétaire du post-modern".
On sourit beaucoup à la visite de cette expo : "Fluxus préconise que la vie est un art et que l’une des fonctions importantes de l’art est le divertissement et non pas l’apport de connaissances".
Et Ben pèse ses mots !