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CHAPITRE 34 : Arden Quin à la Maison de l’Amérique Latine - Chronique réalisée par France Delville pour Art Côte d’Azur.

Le 7 octobre 2011, à la Maison de l’Amérique latine, Paris, l’hommage à Carmelo Arden Quin fut émouvant. Carmelo Arden Quin nous a quittés le 27 septembre de l’année dernière et un certain nombre de ses amis furent heureux d’être réunis pour célébrer sa mémoire.

Après la conférence, les madistes pour une petite fête dans un salon de la Maison de l’Amérique Latine
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Un hommage émouvant... Sofia, son épouse, qui habite l’Argentine, était présente. Avec Catherine Topall et Bolivar elle était allée à Trapani, dans le sud de l’Italie, rejoindre des madistes italiens au vernissage d’une exposition MADI dont j’ai parlé récemment. A la Maison de l’Amérique latine, Catherine Topall, directrice durant des années du Centre Orion (Madi), présenta donc les intervenants, à commencer par Jacques Sauvageot, historien d’art et commissaire de l’exposition Madi à Cholet, non encore terminée.

Hommage de Jacques Sauvageot

Le clip vidéo joint à ce chapitre donne de très brefs extraits des interventions, voici donc retranscrite une partie du discours de Jacques Sauvageot : « Carmelo est l’artiste qui, sinon révolutionne, du moins remet en question l’art abstrait, à un moment où l’art abstrait n’est pas véritablement reconnu. Bien sûr les pionniers de l’art abstrait avaient imposé leur vision depuis 20, 25 ans, mais là où il était, l’art abstrait n’était pas complètement institutionnalisé, et Carmelo remet en question l’art abstrait en anticipant dans les années 35-40 les débats qu’il va y avoir dans les années 50-60, question qui se présentera de : comment l’art abstrait pourrait ne pas être un académisme, puisqu’il se voulait au départ le refus de l’académisme, avec tous les risques qu’il y a dans un système qui quelque part se fossilise, et l’apport de Carmelo a été de percevoir les risques qu’il y avait à ce niveau-là, et d’anticiper sur des propositions, sur des démarches, qui pouvaient contribuer à essayer de faire quelque chose d’un art, qui soit un art toujours vivant. Le deuxième hommage, c’est bien sûr un hommage qu’on peut rendre à l’homme, avec sa soif de vivre, son envie de vivre, de faire toujours avec d’autres, de jouer de façons multiples, de jouer sur toutes les possibilités, de faire ce qu’on appellerait aujourd’hui de la transversalité, ou de la pluridisciplinarité, avant la lettre. S’il n’y a pas l’idée d’un art total qui pourrait tout englober - je crois que ça n’entrait pas dans sa perspective à lui - disons que c’était l’idée de faire un peu de tous les arts, avec des correspondances éventuelles entres tous ces arts, en jouant un peu de tous les instruments possibles. Le troisième hommage que pour ma part je voudrais lui rendre, c’est l’hommage au militant - terme aujourd’hui pas très bien vu - étant entendu que Carmelo a été engagé de multiples façons : il a été engagé dans son travail artistique, il a été engagé dans le fait qu’il a développé un travail collectif, il a été engagé sur la base de choix politiques qui dans le fond n’ont jamais varié. Quand on lit tous les textes qu’il a publiés, on s’aperçoit que sur la cinquantaine d’années pendant laquelle il a écrit des textes, on retrouve toujours un certain nombre de constantes. Parce que pour lui l’engagement n’était pas lié à un discours – avec d’ailleurs le risque de dogmatisme qu’il aurait pu y avoir au niveau de ce discours – mais c’était un engagement qui était avant tout humain, autour d’idées qui sont peut-être des idées générales et généreuses, mais qui pour lui voulaient dire quelque chose. L’idée d’égalité, de fraternité. Des idéaux qui l’ont toujours animé, toute sa vie. Pour ma part, je trouve que c’est un artiste qui n’a pas été reconnu véritablement à sa place. (…) Alors qu’est-ce qui fait que Carmelo n’a pas eu la place, la reconnaissance qu’il méritait ? Je crois que quelque part il l’a recherché. Mais peut-être est-ce aussi parce qu’il n’a jamais été dans une situation où on aurait pu le classer dans un de ces tiroirs… et donc n’a pas jamais faire partie de ces cohortes qui avancent à certaines époques. Donc cette originalité, qu’il a quelque part cultivée, avec cette volonté d’essayer de toujours faire avancer les choses collectivement, contribue, à ce que je pense, que Carmelo n’ait pas obtenu la reconnaissance méritée. D’où le souhait que l’on puisse avoir à l’occasion de cet hommage, que ce soit l’occasion, sinon d’une réhabilitation, du moins de relancer un travail et un intérêt pour l’ensemble de son œuvre. On le limite trop souvent à une période. Récemment encore je discutais avec un ancien conservateur de musée, qui disait : « Oui, oui, Carmelo, c’était très intéressant jusqu’en 1950, après 1950 c’était moins intéressant… Sauf qu’il a vécu 60 ans, encore, après, et qu’il a travaillé de façon différente selon les périodes. On a tendance à gommer toute une période qui est une partie de sa vie. De la même façon que l’on a tendance à limiter son discours à un discours général qui dirait : « voilà, c’est bien la création, ce qui importe avant tout c’est d’être libre », et ainsi de suite… mais en même temps, si on regarde bien, on voit qu’il a proposé un certain nombre de règles, un certain nombre de cadres, qui peuvent être des limites, mais aussi des occasions de les dépasser. Et donc le souhait que l’on puisse avoir, c’est que son œuvre, qui a été magnifiquement répertoriée, inventoriée, travaillée jusque dans les années 58, fasse l’objet de travaux qui permettent d’avoir une vision véritable d’un artiste toujours vivant, un artiste qui s’est toujours renouvelé, et qui aujourd’hui, pour nous, et pour beaucoup, vit encore ».

Carmelo e un addicto a la vida

Sofia Arden Quin lui succéda (en espagnol, et elle a promis de m’envoyer la traduction en français), mais il y a une phrase très compréhensible par tout le monde : Carmelo e un addicto a la vida. Ce qu’avait déjà mentionné Jacques Sauvageot, ce que feront tous les conférenciers, chacun à sa façon. Sofia avait connu Carmelo quelques années avant son départ de Buenos Aires pour Paris le 25 septembre 1948, elle l’avait même accompagné au port, et pris la photo historique montrant Carmelo au bastingage du paquebot « Ravallo ». Départ pour Naples en compagnie de Juan Melé, Grégorio Vardanéga et José Bresciani. Comme le raconte Shelley Goodman, Melé et Vardánega resteront un peu à Naples tandis que Bresciani et Arden Quin reprendront tout de suite le bateau pour Gênes, direction Paris.

Arden Quin embarqué sur le Ravallo
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Lorsque l’art a jailli de sa cage

J’en profite pour mentionner une fois de plus qu’une grande partie de ce qu’il est possible de rapporter aujourd’hui de la vie de Carmelo est dû à l’énorme travail que Shelley Roitman (Shelley Goodman), l’épouse de Volf Roitman a produit, pendant des années, en interrogeant l’artiste, en retranscrivant, mettant en forme, retrouvant des archives. Et cela a donné la biographie incontournable dont j’ai souvent parlé ici : « When art jumped out of its cage ». Pour le Catalogue raisonné des œuvres d’Arden Quin de 1935 à 1958, Shelley et Volf ont permis à Alexandre de la Salle et moi-même de citer de nombreux passages de leur livre pour alimenter la partie biographique. Et donc le tableau de la vie de Carmelo Arden Quin à Buenos dans les années 40 du chapitre 32 (mon chapitre précédent), si c’est un extrait du texte du Catalogue raisonné, en amont il a été puisé dans « When art jumped out of its cage ». Précision des sources.

Dos de la couverture de « When art jumped out of its cage »
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Et si, comme l’évoque Jacques Sauvageot, un catalogue raisonné des œuvres de 1958 à 2010 reste à faire, la biographie d’Arden Quin par Shelley Goodman couvre la vie de celui-ci de sa naissance jusqu’en 2005, année de parution du livre ( Edité par le Madi Museum and Gallery, Dallas, Texas, le 20 février 2005).

Sofia

Et comme Sofia Arden Quin est à l’honneur cette semaine à Paris chez les amis d’Arden Quin avant son départ pour Buenos Aires, la Biographie de Shelley Goodman nous offre plusieurs photos d’elle lorsqu’elle s’appelait encore Sofia Kunst Muller : en octobre 1980 à l’exposition « Vanguardias del 44 en el arte Argentina, Arte Concreto, Arte MADI » au Musée Sivori, Buenos Aires.

Sofia Kunst Muller au Musée Savori, Buenos Aires, 1980, photo courtesy Sofia Kunst Muller
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A l’exposition « MADI Argentina » à la Centoira Gallery de Buenos Aires en 1995, Sofia est au centre de la photo avec Volf Roitman et Carmelo Arden Quin. Sont aussi présents Juan Mélé, Bolivar, Martin Blaszko.

Centoira Gallery, Sofia avec Roitman et Arden Quin, photo Madi Archives
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Et chez les Roitman à Castletownshend, Irlande, en 1998.

Carmelo et Sofia chez les Roitman, photo Madi Archives
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Au mur des œuvres de Volf, dont sa pièce historique « Triangle perdu ». La Biographie montre aussi une photo de l’exposition MADI au château de Saint-Cirq-Lapopie en 1993,

MADI à Saint-Cirq-Lapopie, photo Madi Archives
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exposition organisée par Françoise Tournié. Entre autres sont présents sur la photo Lorenzo Piemonti, Volf Roitman, Bolivar, Alexandre de la Salle, Josée Lapeyrère, Arden Quin, Reale Frangi, Jean-Claude Faucon… Et une photo de l’exposition « MADI Hungary and friends » au Festival de Gyor en 1995 : Carmelo Arden Quin est au centre, avec entre autres Bolivar et Giancarlo Caporicci.

Madi en Hongrie, photo courtesy E. Bányász
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Catherine Pinguet et la poésie d’Arden Quin

A la Maison de l’Amérique Latine, au milieu des interventions, de Jacques Sauvageot, Sofia Arden Quin, Bolivar, Joël Froment, Piergiorgio Zangara, Jean Branchet, Alexandre de la Salle, François Delprat et moi-même, celle de Catherine Pinguet marqua un temps nouveau : celui de la réunion des œuvres littéraires de Carmelo Arden Quin, ce qui n’est pas une mince affaire, et le temps de l’intérêt pour icelles. Et cela n’a pu que m’intéresser, car, seule, il y a des années, ce pan de sa production m’avait parlé. Surtout lorsque je lui avais demandé, en 1996, de venir à la galerie de la Salle, Saint-Paul nous lire son rêve de 1945. L’écrivain Arden Quin me passionnait déjà. Ensuite, lors de la confection du catalogue raisonné, Alexandre de la Salle et moi-même avons trouvé essentiel de publier tous les Manifestes, préfaces pour des expositions, du genre mini-manifestes, et tous les textes d’Arden Quin de la Revue Ailleurs. Récemment Julien Blaine s’est manifesté pour dire que l’on négligeait la prose et la poésie d’Arden Quin dans la revue Ailleurs. J’espère qu’on a pu lui renvoyer que la chose avait été réparée, en 2008, dans un livre « de poids », le Catalogue Raisonné (il est très lourd). Donc, pour Catherine Pinguet qui a eu l’heureuse idée d’aller trouver Carmelo sous l’angle de sa poésie, la difficulté était, qu’en dehors des manuscrits perdus (par exemple Eiglemos, édité en même temps que la revue Arturo) Carmelo avait du mal à lâcher ses inédits, étant sans cesse en train de les réécrire, et de vouloir rééditer ce qui l’était déjà. Cela a été le cas du recueil des « Cartes de jeu », il me l’a offert en me disant : « De toutes façons, je vais le changer, et faire une nouvelle édition ». En février 1996 à Saint-Paul, l’invitation stipulait qu’en plus de l’exposé de son rêve « Pedro Subjectivo » et de son texte « Hommage à Spinoza », Carmelo devait apporter son Antigone. Il est venu sans, « devant le réécrire ». Cette Antigone sera-t-elle retrouvée ?

Maraudeur galaxique

La brièveté du clip qui accompagne cette chronique ne donne que quelques bribes de la conférence de Catherine Pinguet (déjà produite au Musée de Cholet dans l’exposition MADI), en voici donc de larges et passionnants extraits, avant qu’ils ne paraissent sous forme d’article :
« Carmelo Arden Quin était-il poète ? Se serait-il lui-même dit poète ? Difficile de répondre. A vrai dire, jusque récemment, je ne connaissais que son recueil de poèmes Rituel des cartes de jeu, publié à compte d’auteur dans une maison d’édition créée pour l’occasion, Amonel. J’ignorais - jusqu’à ce que l’on me demande de préparer cette lecture - les recueils de poésie restés inédits. Il y a également ceux qui ont disparu et n’ont pas été retrouvés dans sa maison de Savigny-sur-Orge. Catherine Topall m’a parlé d’un recueil, Steno Rane, non retrouvé, qui mettait en scène un « maraudeur galaxique » et se présentait sous la forme de La Complainte du vieux marin de Coleridge – à ceci près que les aventures du maraudeur ne se situaient pas en mer mais dans l’univers. Quatre manuscrits ont été retrouvés – ce qui signifie que Carmelo Arden Quin a beaucoup écrit, mais aussi qu’il retravaillait sans cesse ses poèmes. Comme ils ne sont pas datés, difficile de savoir à quel moment ils ont été rédigés, corrigés, tapés à la machine – d’autant qu’il existe parfois plusieurs versions. Dans tous les cas, l’écriture poétique était pour Carmelo une activité importante – à des moments de sa vie plus qu’à d’autres, notamment dans les années 1960, lorsque paraît chez José Corti un recueil, Opplimos. Puis, quand il devient membre du groupe poétique La Phalène et qu’il édite sa revue Ailleurs (8 numéros de 1963 à 1966). De Carmelo, on connaît les nombreux manifestes, pré-manifestes MADI, écrits et publiés à l’occasion d’expositions et de catalogues. Il est peu probable que lire ses textes, tout du moins ses poèmes, permette d’éclairer son œuvre plastique (sauf quelques aphorismes). D’ailleurs, quand on interrogeait Carmelo sur sa poésie, il disait qu’il n’y avait rien à comprendre, que chacun était libre de la lire et de l’interpréter comme bon lui semblait. Ou encore que les éclaircissements et les commentaires qu’il pouvait apporter ne devaient pas être pris au pied de la lettre, car volontiers démentis par la suite. Disons qu’il y avait chez lui une pensée de la contradiction, qu’il assumait, voire revendiquait comme telle. Il le dit dans l’un de ses écrits : « Je me sens plus à l’aise dans la contradiction que dans le choix d’un principe » Et il ajoute : « mais le principe existe-t-il ? »
Je songe aussi au poète chilien, Godo Iommi, ami de Carmelo, avec qui il avait fondé le groupe poétique La Phalène, qui écrit dans le 1er numéro de la revue Ailleurs : « La poésie se trouve, avant tous les contraires, dans la profonde contradiction ». Et de citer Isidore Ducasse, le comte de Lautréamont : « Je ne tends qu’à connaître la contradiction de mon esprit avec le néant. » Dans un proche registre, la poésie de Carmelo a pour caractéristique d’être un mélange de jeu et de sérieux. Comme il le dit lors d’une interview (avec Marie-Odile Andrade, revue Artension, n°6), en 1988 : « Moi, je crée dans le jaillissement et la rigueur ».

Pour cette lecture, j’ai privilégié l’aspect ludique, la forme brève, la lecture de courts extraits, mais il existe également un grand nombre de poèmes qui obéissent à des règles et des contraintes, qui se répondent les uns les autres, forment un univers mythique et onirique complexe. Carmelo Arden Quin a réalisé des livres MADI, à partir de découpages, de peintures et de poèmes. Celui de 1949, intitulé Ionnel, n’a pas été retrouvé.

Ionnel
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Un madigramme appelés amas (c’est-à-dire les lettres A M S disposées en étoiles) fut exposé à la galerie Colette Allendy en 1950. Carmelo Arden Quin reviendra sur le mot « amas », dans le dernier numéro de la revue Ailleurs, en déclarant : « Ne pas concevoir de représentation plastique ou poétique hors du mouvement des amas ». Après Ionnel, deux livres similaires suivront Soleil et Nature – le dernier en hommage à Mallarmé (un des poètes de prédilection de Carmelo avec Rimbaud, Lautréamont, Baudelaire et Laforgue). Ces livres s’inspirent des Calligrammes d’Apollinaire, revisités sous forme géométrique et constructiviste. En 1987, Carmelo Arden Quin publie un autre livre Madi, édité à 60 exemplaires. Trois ans plus tôt, dans MADI maintenant/MADI adesso (1984), il avait écrit au sujet du poème madi qu’il reposait sur la pluralité et la ludicité Qu’il venait rompre avec une conception traditionnelle du livre et offrait une autre dimension au discours. La référence à Un coup de dés de Mallarmé est à nouveau présente (harmoniser lieu et concept, espace et métaphore). Le poème madi est présenté comme un « objet plastique concret, maniable ». Il s’agit d’une « œuvre mentale qui joue avec la sémantique et se joue de celle-ci ». Cette œuvre, est-il précisé, « passe d’un plan de l’espace à un autre, qui peut être sans principe ni fin ». « Le poème madi fonde un jeu poétique nouveau. D’où sa ludicité ». « Il cherche à combiner SPACIALITÉ et DISCOURS. »

Au début des années 1960, avec les autres membres du groupe La Phalène, Carmelo Arden Quin participe à des actes poétiques qui nous renseignent sur son rapport à l’écriture. Il s’agit de déclamer en public Lautréamont, Nerval, Rimbaud – ou encore de distribuer de poèmes-objets. Au cimetière du Père-Lachaise, un acteur vêtu d’une cape noire lit le poème « La Belle rousse » de Guillaume Apollinaire devant la tombe du poète. De l’Acte poétique aux Buttes-Chaumont, une photographie est publiée dans le 1er numéro de la revue Ailleurs, en miroir d’un article de Godo Iommi, « Lettre de l’Errant ».
Mais, rapidement, Carmelo Arden Quin prend ses distances : tout d’abord, il est contre la participation d’acteurs. Et surtout, il remet en cause l’improvisation et s’oppose à Godo Iommi qui, lui, se dit prêt à abandonner toute écriture écrite. Carmelo s’explique dans le cadre d’un article, Dès le seuil, publié dans le 2e numéro d’Ailleurs – article qui se présente sous forme de journal daté du 9 février 1962 au 5 juin 1963. Il critique l’improvisation (synonyme pour lui d’automatisme oral) car l’improvisation s’inspire de l’écriture automatique surréaliste (qu’il condamne et juge obsolète). Il précise : « Je me refuse à participer à tout acte qui ne soit préalablement décidé dans une réunion organique. Nous pouvons atteindre de hauts sommets du merveilleux conceptuel, mais ce n’est pas flanqués d’acteurs en mal d’ovations villageoises, de poètes lauréats et d’autres opportunistes d’égale impudence que nous l’accomplirons ».

De cette mise au point, on retiendra que Carmelo Arden Quin privilégie l’écriture écrite, et non pas orale, qu’il juge nécessaire, au sein d’un groupe, une concertation et des décisions communes (on est là aux antipodes de l’improvisation), et qu’il parle d’atteindre « un merveilleux concept » (deux termes : merveilleux et concept, pour le moins antinomiques). En fait, cela rejoint ce qu’il a dit sur le jaillissement et la rigueur. Dans toute sa poésie (comme on va le voir), l’imaginaire est foisonnant, mais dans un même temps, il est structuré, travaillé a posteriori, reconstruit.
Dans les années 1960, Carmelo prend ses distances avec l’improvisation, mais il reste attaché à ce qu’il appelle des « entreprises d’un ailleurs », comme par exemple :
Rechercher de moulins à vent sans itinéraire précis.
Rechercher des trésors cachés lors d’expéditions « au hasard », dans des lieux « détecter intuitivement », dans des ruines ou des coins perdus de la forêt. C’est ce qu’il appelle « l’imprévoyable total », l’objectif étant de trouver l’inconnu et l’imprévu. C’est ainsi qu’il se rend en Bretagne, en quête de l’esprit celtique. Et plus régulièrement, dans la forêt de Fontainebleau. Une précision : Carmelo Arden Quin était marxiste et athée – il l’a dit et répété. Mais dans de nombreux poèmes, où le monde végétal et animal sont omniprésents (surtout la nature sous sa forme luxuriante, avec le vert et le bleu comme couleurs dominantes), les influences animistes et panthéistes sont évidentes. C’est ce qu’il appelle dans un poème « une logique païenne ».
Dans un recueil inédit intitulé Le Lys d’hermine, composé de 148 poèmes, on retrouve la tradition celtique et toute une galerie de personnages :
Rhope et Miséma, Thorme de Nylé et Vélesa (« Le voyage nommé »)
Thion le marin (« L’acrobate »)
Sorde et Gymnée (« Abus des mots »)
Rö et Gÿ (« Quoi qu’il en soit »)
Odoah, Psylle et Jocyn (« L’amour »)
Dorcy-viorne (« Le marchand de bois »)
Xys (« Festin »)
Mais dans ce recueil, on trouve également quelques allusions à la mythologie grecque (Diogène, Psyché et Eros), et aussi des androïdes (« Ailleurs » et « Nature »), un maraudeur venu des étoiles (« Ainsi de suite »), un martien (« fin en soi ») et un automate made in China, qui ne cesse de répéter que l’aventure poétique de Lucrèce, Leopardi, Lautréamont et Mallarmé est « née de l’eau salée » (« Le poème naïf »).
Et dans ce recueil, comme on l’a vu avec le livre Madi, et que l’on retrouve dans tous les écrits de Carmelo (en vers comme en prose), on assiste à de très nombreuses créations de mots – néologismes qui pourraient d’ailleurs donner lieu à un petit lexique.
Pour Le Lys d’hermine :
Un Veinigreur (« La Couronne »)
ils estent et hippent au lac (« Nel et Nelle »)
l’Ontale (« L’alerte ») – un ritolé (« Accompagnement ») – abonir la vie (« Charisme ») et surtout NYANTHS (une mystérieuse tribu que l’on retrouve dans plusieurs poèmes).
On trouve aussi des variations qui rappellent les Proverbes mis au goût du jour de Paul Eluard et de Benjamin Péret, comme l’expression « ménager la chèvre et le chou » qui devient « Blie baille distraitement entre chou et chèvre ».
Second recueil inédit de poésies, Nidle, composé de 144 poèmes répartis en douze fragments de chants. Il a dû être composé après à la fin des années 1960 puisqu’il est dédié à la mémoire de la danseuse et amie Rita Parr (qui meurt au printemps 1968). Dans ce recueil, dès le second chant apparaît le spectre d’une femme, au corps transparent, vêtue de lin et qui décline son nom.

Je voulais l’admettre
dans mon champ de vision
mais je n’avais plus l’audace
des jours anciens
En 1961 paraît chez José Corti un recueil intitulé Opplimos, avec pour sous-titre Amonel.

Un manuscrit de 148 pages a été retrouvé, dont les 36 premières pages constituent le recueil publié chez Corti (et à mon avis, les aphorismes les plus réussis sont précisément ceux qui n’ont pas été publiés). Pourquoi cette interruption ? Là encore, difficile de répondre, ne connaissant pas les relations que Carmelo Arden Quin entretenait avec José Corti. Mais une chose est sûre, Carmelo retravaillait continuellement ses recueils de poésies. D’après ceux qui ont travaillé avec lui, il acceptait difficilement, voire pas du tout, les conseils – ce qui n’était pas fait pour faciliter la publication de ses poèmes. Et puis, c’est bien connu, le registre poétique (à de rares exceptions près, dont Corti à l’époque), n’est pas le domaine préféré des éditeurs. Le recueil Opplimos se présente sous forme d’aphorismes, une forme brève et concise que Carmelo Arden Quin maîtrisait et affectionnait tout particulièrement. Dans sa chambre, on a retrouvé plusieurs cahiers où étaient notés des aphorismes. Sa référence en la matière était Malcolm de Chazal, poète de l’Ile Maurice, écrivain, philosophe, peintre et visionnaire. Pourquoi cette prédilection pour les aphorismes de Malcolm de Chazal ? Plusieurs raisons : acuité, fulgurance, l’assurance dans le propos, l’idée et la volonté de pratiquer l’art sous toutes ses formes (qui étaient chères à Carmelo). L’œuvre même de Malcolm de Chazal - qui se présente comme une « littérature/peinture », ou encore, de « surpoésie ». Je vous lis un de ses aphorismes, publié dans son livre le plus célèbre, Sens-plastique : « Nous sommes encore à l’état bourgeois de la poésie […]. La poésie ne saurait être vivante et libérée tant que les poètes n’oseront pas changer le sexe des mots à loisir afin de libérer des dissonances et des consonances pour rencontrer les besoins de la musicalité du verbe ». Malcolm de Chazal disait de sa poésie qu’elle devait être sentie, avant d’être comprise. Vouloir la saisir uniquement l’intelligence revenait à faire fausse route. Par sens plastique, Malcolm de Chazal entendait une manière de voir et d’exprimer la vie en cultivant ce qu’il appelait un « sixième sens », ou encore, « le subconscient réactivé », c’est-à-dire la faculté de se servir de tous nos sens en même temps, « comme un faisceau lumineux » dit-il, « pour forcer les ténèbres de l’inconnu. » Cette alchimie des sens – qui chez de Chazal donne lieu à une cosmogonie aussi singulière qu’inédite – a dû plaire à Carmelo Arden Quin. Mais aussi, et peut-être plus encore, la fascination de Malcolm de Chazal pour les couleurs. Des couleurs qui renvoient chez lui à des notions temporelles (la journée passe plus rapidement dans une chambre rouge que dans un salon jaune, et dans un salon jaune que dans un boudoir vert), des couleurs qui correspondent au comportement de l’homme et à sa vision de la nature. D’ailleurs, il n’y va pas par quatre chemins puisqu’il déclare : « L’homme qui n’a pas senti l’œil de la fleur se poser sur lui n’est pas artiste », sous-entendu artiste peintre. Le grenat est la couleur « hypnotique ». Salon grenat endort la conversation. Le jaune est montagneux. Le vert est le meilleur stabilisateur des formes. Le mauve est couleur express, qui court le plus vite, etc. etc. Chez Malcolm de Chazal comme chez Carmelo Arden Quin, les aphorismes ne donnent pas lieu à des maximes de type moraliste, mais à des formules dont l’une des caractéristiques est l’assurance et l’autorité du propos. Dans Opplimos, Carmelo s’exprime parfois à la première personne, comme pour donner plus de poids à ses déclarations : Je trouve le crapaud doté d’une beauté singulière/Tout mon corps désire la sobriété du rire/Je ne crois pas que Tout ait une dimension quelconque/Je pense être un grand romancier/Cette présomption suffit à m’enlever toute velléité d’écriture de ce genre/J’ai pour règle de suivre l’avis de ma volonté si elle n’est pas trop contraignante.
Chez Carmelo Arden Quin, la pratique de l’aphorisme fait appel au trait d’esprit, aux courts circuits de la pensée, à l’énonciation de préceptes qui peuvent donner lieu à des déclarations paradoxales, voire saugrenues : « L’univers évolue dans des laps de temps contigus au parapet/Le commencement d’un récit est l’œuf que pond une cariatide/Le tir groupé fait de la Seine un affluent/Une vallée parle et dit : « J’offre au chasseur, autant qu’au gibier, la possibilité de durer »/ Pourquoi la saisie de la rose ? , demande le bourdon à l’homme de loi ».

Puis, sans trop chercher à créer l’effet de surprise : « Le réel est chose décevante, s’il n’est source d’insolite/La proposition n’est rien, s’il n’y a de nom à ritualiser/On ne peut analyser à partir de l’émotion, ni créer sans elle/Egrener à rebours les heures dites creuses, et pallier de la sorte aux situations affectives sans lendemain ». Dans Opplimos, l’athéisme de Carmelo Arden Quin est bien représenté. Et là, il se démarque de Malcolm de Chazal qui était en Dieu – mais un croyant « pas très catholique » - disciple de Swedenborg (le philosophe et mystique suédois) et était influencé par la tradition occultiste : « J’adore nier dieu sous toutes ses formes/Je ne crois pas à l’absurdité de l’existence mais à celle de dieu/La croyance en dieu est venue de l’art de souffler le verre/J’apprécie pensée et pratique zen : jeux de concepts, gestes exempts de vérité, exercices mentaux ludiques/Je pense arriver à l’essentiel en parlant du chant du grillon.
Et pour finir, des aphorismes d’Arden Quin qui peuvent être mis en rapport avec son travail de plasticien : « La symétrie se présente comme une opportuniste de la forme/Je souhaiterais pratiquer l’art du néant/Je suis pour le tracé le plus immédiat/En peinture, j’ai abandonné tout dessein pour ne pas me contredire/Avec l’image madi, je vois émerger l’absolu/J’aime créer de l’insolite à partir de trois fois rien/Je soupçonne l’artiste d’être le plus souvent un formulateur de mensonges »
Catherine Pinguet a commencé là un travail très approfondi, et qui va maintenant traverser tous les manuscrits retrouvés : bonne navigation à elle !

Barocco

Pour ma propre intervention, improvisée, le terme de baroque est venu tout naturellement. Car il m’était venu naturellement un jour où Jacques Sauvageot me demandait comment je définissais Arden Quin, et j’étais allée voir si les acceptions de ce mot pouvaient correspondre à ce que j’essayais d’exprimer. Et j’ai été servie ! Car à l’origine, barocco, mot portugais, désignait une « perle irrégulière ». Et quand on sait que Jean-Jacques Rousseau trouvait à la musique baroque une particulière beauté de la dissonance, j’ai senti que j’avançais. Mais moi, j’avais été spontanément plutôt guidée par le mystère de l’art baroque en peinture, et par l’extase de la Sainte-Thérèse du Bernin, son côté « voilé » : montrer pour cacher, multiplier les plis pour révéler. Ce dont la psychanalyse si chère à Arden Quin a fait (par l’intermédiaire de cette autre « perle irrégulière » qu’est Jacques Lacan), une jouissance autre. Irrégularité et dissonance sont dans le ton. Est-ce que j’exagère ? Carmelo avait peut-être appris en tant que jeune garçon dans la Pampa à jouir de choses qui le dépassaient, et à vouloir réinstaller sans cesse leur décor, afin, d’encore et encore être surpris par le dépassement, le dé-bordement. Virtuose du rêve éveillé, Arden Quin ? Pour l’avoir approché, je le penserais. Ainsi la sortie du cadre serait une opération métaphysique permanente de sa part, et poétique, archi-poétique. Certains pensent qu’il est plus grand peintre que poète. Et si c’était un peintre poète ? Mais pas un peintre et un poète : un peintre dont la peinture serait fondée sur les mêmes nécessités que la poésie… Catherine Pinguet me rejoint, avec cette notation sur Malcolm de Chazal… Et si donc Carmelo avait inventé une poésie de la peinture singulière, un vocabulaire plastique qui, dans le silence, s’articule comme une genèse, une cosmogonie, elle aussi construction en puzzle d’une civilisation. Codée bien sûr. Comme si Carmelo avait pratiqué l’art de rêver, depuis l’enfance, en inventant Castaneda avant la lettre. Et comme si son rêve de Pedro Subjectivo n’avait été écrit que parce qu’il allait rencontrer Pichon-Rivière : parce que tout à coup il y avait une adresse.

Ne peut-on l’imaginer, tout enfant, Carmelo Alvès/Oyarzún, réceptable de curieuses possessions, dans des dimensions encastrées comme dans les « Ruines circulaires » de Borgès ? Si sa famille est émigrée, si plusieurs langues l’habitent, n’est-il pas prédestiné à métisser des bribes de l’universel, dans sa création du monde ? D’où l’irrégularité, dans sa recherche de la règle. Qu’on appelle la Loi, la loi du monde. L’interrogation d’une génèse, d’une cosmogonie, est partout dans sa poésie. Il refait le monde, des initiés viennent construire la Demeure. Les anciens passaient leur temps à concevoir des « de natura rerum », parce qu’ils avaient du temps pour contempler. Le ciel, particulièrement, les voies lactées. Structures, mais explosions de formes incontrôlables. François Duprat, spécialiste de littérature sud-américaine a mis l’accent sur les glissements de langues chez Arden Quin. C’est très important. Toute langue, toute forme, dérive chez Arden Quin. On pourrait même parler de clinamen, et de champs non-unifiés selon les théories du chaos. Ce sera pour une autre fois. Mais le spoutnik Arden Quin tourne sur son orbite et soudain s’échappe. Etoiles filantes, ses œuvres. L’enfant avait construit des cerf-volants, en attendant mieux. Mais l’ombilic du rêve, la dimension fantastique des deux arts d’Arden Quin, peinture et écriture, révèlent – font résonner - qu’il était initié à cette qualité de réel que procure le rêve, et réciproquement. C’est dans le rêve que ça paraît réel, car le rêve fort, intense, transperce notre rapport au monde. Le rêve nous éveille, nous rend présent. Le « peu de réalité » de Breton, Arden Quin le dépasse parce qu’il est du côté de Garcia Marquez, où le pire est sûr, l’incroyable aux portes, les objets irradiants. C’est que Carmelo Jéronimo est mort d’une balle de révolver. Tout peut donc arriver, à chaque instant, et c’est ainsi qu’a vécu Carmelo sous nos yeux, dans l’urgence saisir le volcan dans l’objet : « Ces objets forment un cercle glorieux : la conscience ». Bolivar dit que Carmelo voulait du silence pour la poésie, faire taire les mots. Qu’aucun mot n’était à la hauteur. C’est ainsi que sa poésie est hermétique, mais c’est au sens de l’initiation, il s’agit d’égarer pour retrouver la route, pas question de livrer quoi que ce soit. Ce serait trahir. Sur la route du rêve éveillé de Carmelo, Pedro, « l’ami de mes cinq ans », est mort. Dans une carriole qui avance. Le cheval traîne un mort. Et la vie continue, le chemin de la carriole est quand même un chemin. Comme si rien dans le paysage ne pouvait être indifférent, traité distraitement : la question est toujours au plus haut.

La violence infligée par Arden Quin à la Peinture

Et lorsqu’ Alexandre de la Salle parle de la violence infligée par Arden Quin à la Peinture, bien sûr il s’agit du cadre, mais dans la troisième dimension : ouvrir le mur au tableau, et le tableau au mur, c’est les mettre dans une interpénétration qui subvertit la place de chacun, l’ordre où d’habitude on les établit. Subversion permanente de ce que l’on pourrait attendre. Donner du connu, ce serait trahir. « Secret à vie », aura-t-il écrit dans son dernier recueil. N’est-ce pas limpide ? Limpide comme la mare de Narcisse : un miroir sans fond. Comment ne pas finir sur Mallarmé : « L’Azur » : « Il fallait toute cette poignante révélation pour motiver le cri sincère et bizarre de la fin, l’azur ». L’azur habite l’œuvre poétique d’Arden Quin, si mystérieuse qu’une partie n’est pas encore éditée, elle trouble trop. Mais dans le poème d’Arden Quin du 4 mai 1962 (page d’« Ailleurs » n°2, imprimée dans cet ouvrage), un extrait est parlant, rendu au chaos - nietzschéen, qui restitue sa part d’étoile - de par sa structure éclatée, et qui pourtant a un effet d’oracle :
" L’orientation émouvante. Le centre de coordination des bandes étroites mouvements de la S. L’ARBRE DOUX la voûte céleste avec une précision de quelques minutes DE PRÉSENCE là aussi".

Spécifiquement, l’œuvre bi-polaire d’Arden Quin peut être ressentie comme révélation d’un au-delà de l’Espace, de sa mise en scène dans un cérémonial, dont on ne peut rien expliquer : l’objet doit s’imposer, évident, inéluctable, muet tel l’oracle, et justement, car l’oracle ne dit ni ne cache, mais donne à entendre. Mais pour une « construction » du monde. Avec l’Autre, et l’autre.
Le livre-objet qui sert de catalogue à l’exposition Arden Quin aux Beaux-Arts de Metz en 1994, Carmelo Arden Quin le dédicace à Alexandre de la Salle en ces termes : « Pour Alex, amitié/admiration/tout cela et plus dans/la Confrérie Madi/Bien à toi/Carmelo".

Livre-objet de l’exposition de Metz
DR

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