Jean-Luc Verna (2/3)
Le Dessin
Le dessin apparaît alors comme rédempteur ; la découverte de cette passion se produit très tôt, et se prolonge dans sa jeunesse à travers les cours au Lycée d’Estienne d’Orves à Nice et surtout à la Villa Arson, malgré les conflits avec ses professeurs et le directeur de l’époque, Christian Bernard, à qui il vouera plus tard une fidèle et sincère reconnaissance. Mais quel type de dessin ? Le dessin académique, bien sur, puisqu’il enseigne cette spécialité depuis quelques années dans cette école d’art de renom, mais sous une forme particulière qui permet d’inscrire sa production dans une démarche contemporaine.
« J’ai toujours dessiné et j’y suis resté parce que c’est là où j’ai le plus de liberté finalement. Au début je dessinais de façon stakhanoviste alors que ce n’était pas la tendance. Maintenant pour une question de temps je ne produis qu’une vingtaine de dessins par an car je refuse de déléguer ou de faire des séries pour répondre au marché. En dix huit ans je n’ai travaillé que par désir. Du coup j’ai perdu du temps mais c’est mon luxe et ma fierté. Plus récemment je me suis mis à la sculpture, j’ai fait une baguette magique de huit mètres en acier vert pour « le Vent des forêts » un centre d’art à ciel ouvert dans la Meuse et prépare deux sculptures avec la Manufacture de Sèvres. Je créé aussi des objets comme les seize cockring en verre exposés à la Conciergerie. Tous ces objets sont l’extension en 3D de mes dessins tout comme moi. »
Jean-Luc Verna, interview par Olivier Marro pour Art Côte d’Azur
L’exagération des raccourcis n’est pas sans rappeler les prises de vue en contre-plongée de Michel-Ange à la Chapelle Sixtine, et sa culture évidente lui permet de détourner des œuvres célèbres dans un véritable effet citatif. Par ailleurs, même si les thèmes semblent empruntés quelquefois à l’univers du « Gothique » - les faunes, nymphes, et autres monstres – et anti religieux, la texture détourne le premier jet pour apporter une nouvelle dimension à l’œuvre. Les rehauts de fard ou de maquillage, les transferts ou les copies multiples des réalisations premières modifient la lecture de base ; à cela s’ajoutent les adjonctions d’objets annexes et l’utilisation de supports variés – les murs, le bois, le travail in situ – qui lui permettent d’acquérir une dimension d’artiste international.
Le travail du trait, avec ses accents et ses transparences, les reflets et les regards délicats confrontés à des accessoires violents ou fétichistes vont bien au delà d’un académisme primaire et basique. Ce dépassement technique est venu à la suite de doutes et de remises en question ; loin d’une satisfaction narcissique due à un savoir faire évident, la quête d’une reconnaissance a constitué le catalyseur de son évolution.
A suivre...