L’exposition de Souheil Salamé est présentée dans la superbe salle des galériens de l’Observatoire Océanologique de Villefranche-sur-Mer, un des principaux centre français en sciences de la mer (biologie cellulaire, biochimie, physique et chimique).
Lieu magnifique au bord de l’eau, Ancien bagne des rois de Sardaigne (galères royales), devenu dépôt de charbon, puis base de recherche financée par la Russie avant d’être repris par le ministère de la Marine puis de l’Education Nationale, ce complexe multidisciplinaire devient en 1985-89, l’Observatoire Océanologique des Sciences de la mer.
Né à Alexandrie, une adolescence au Liban, Souheil arrive à Nice à 18 ans, suit les cours de la Villa Arson (à l’époque EPAD), fait un DEA de cinéma Art et Recherche, s’intéresse aux paysages sonores, travaille sur quelques films, avant de développer un travail mêlant science, technique, observation, et réalisation d’œuvres originales nées de sa passion de la mer.
Dans des lieux choisis pour leur situation, leur beauté ou leur poésie, il prélève de l’eau de mer en bord de plage à l’aide de bidons de dix litres.
L’eau est ensuite bouillie jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’une matière épaisse salée incluant quelques éléments naturels : branchages, plancton, méduse, mais aussi des bouts de plastiques, et autres détritus de nos sociétés industrielles.
Une "cuisine scientifique" qui nécessite une maitrise de nombreux paramètres pour arriver au résultat voulu : des grands carrés de sel cristallisés pris entre deux épaisseurs de verre et inclus dans de grandes boîtes en bois éclairées par l’arrière.
Des œuvres abstraites, matiéristes, à fond blanc, apparaissent alors comme autant de photos en volume du vivant.
Par la magie de la cristallisation, tout se met en place comme dans une réalisation picturale où est perceptible l’émotion, voire la souffrance biologique.
Ce geste artistique est complété par des sons prélevés eux aussi sur le lieu (bruits de mer, musique au loin, enfants qui jouent...), une "photographie sonore" où l’artiste intervient pour mettre en accord le montage sonore avec l’aspect visuel du tableau.
Ce travail, débuté en 1999, qui compte aujourd’hui plus d’une trentaine de cristallisations, a permis un rapprochement inédit avec l’Observatoire Océanologique de Villefranche-sur-Mer.
L’une des œuvres, effectuée à partir d’un point de mesures récurrent (dénommé Point B) situé dans la rade de Villefranche-sur-Mer été acquise par l’Observatoire et sera présentée en permanence dans ses locaux, permettant ainsi de jeter un pont entre science océanographique et création artistique.
D’autres collaborations ont vu le jour avec le CIRM (recherches musicales), divers laboratoires scientifiques et des galeries d’Art (Ponchettes, Soardi, etc.)
Issu de promenades au bord de l’eau les sens en éveil, des rêveries, mêlant émotions sensibles et méthodes scientifiques et techniques, les recherches de Souheil explorent par des voies différentes une même chose : la réalité complexe, universelle, à la limite du visible et de l’analytique et du poétique.